Le 1er décembre dernier, le think-tank “Défendre” l’Entreprise a organisé sa septième rencontre publique de l’année 2011 consacrée aux résultats des derniers classements de l’Algérie dans le rapport Doing Business que la Banque mondiale publie chaque année.
Sur le classement de183 pays, l’Algérie a rétrogradé De 14 positions en trois années. 136éme place en 2010, notre pays est classé au 143e rang en 2011 et à la 148éme position en 2012. « Au-delà de la constatation de la position peu envieuse de notre pays dans ces classements, ce sont surtout les causes de la stagnation de notre économie qui ont concentré l’essentiel des débats » souligne le think-tank “Défendre” l’Entreprise.Pour le comité exécutif du think-tank sur les résultats de la rencontre du 1er décembre dernier. Il est devenu patent aujourd’hui que les blocages dont souffre l’économie algérienne sont dus à un défaut de gouvernance : absence de vision économique, rôle non défini de la place de l’État dans la sphère économique, une administration démotivée et forcée à naviguer à vue, participation quasi inexistante des autres parties prenantes (entreprises, société civile…) dans les choix de politique économique.
Une situation propice à la corruption qui a atteint des proportions record comme l’attestent les différents classements internationaux. Un phénomène qui est aggravé par l’absence de mécanismes de contrôle réellement effectifs de la dépense publique. « Poursuivre dans cette voie conduira inéluctablement l’Algérie vers un désastre ! C’est l’avertissement formulé par tous les observateurs sérieux, préoccupés par la situation de l’Algérie » souligne le think-tank “Défendre” l’Entreprise.
IL FAUT DOTER LE PAYS D’UNE VÉRITABLE GOUVERNANCE
Que faire dans ces conditions ? S’interroge le think-tank. « La réponse n’est pas à chercher très loin » estime-t-il. Il s’agit de doter le pays d’une véritable gouvernance ! Il faut corriger les tares dont souffre la gouvernance algérienne
Il faut donner une ambition économique à notre pays qui valorise ses atouts. En plus de sa mission de régulation, il faut délimiter de façon très précise le rôle de l’État dans la sphère économique. Il faut transformer l’Administration en un corps d’agents professionnels motivés, focalisés sur la qualité des services qu’ils fournissent aux citoyens et aux entreprises.
Il faut instituer des mécanismes d’association de la société civile et des entreprises aux grands choix politiques. « Ces transformations ne sont pas faciles à décider et à mettre en œuvre. Mais elles ne sont pas impossibles ; puisque plusieurs pays qui ont connu des blocages similaires ont réussi à les mettre en œuvre avec succès » affirme le Think-tank, citant l’exemple de la Malaisie et la Géorgie.
« Ces deux pays ont en effet réussi de façon exceptionnelle leurs réformes pour offrir à leur économie les conditions d’une croissance forte et soutenue » indique-t-on. Que nous apprennent les expériences de ces deux pays ? Trois leçons essentielles paraissent pertinentes pour l’Algérie. La première leçon c’est la volonté politique pour engager les réformes nécessaires et faire preuve de courage pour s’attaquer aux blocages institutionnels.En Malaisie c’est l’ex premier qui a Mahathir lancé à la fin des années 90 son plan “Vision 2020” qui a fixé les objectifs économiques du pays à long-terme. En Géorgie, c’est le Président Mikheil Saakashvili qui, après la Révolution des Roses en 2003, a engagé une réforme majeure de libéralisation qui a fait de son pays l’un des plus ouverts au monde à l’initiative privée.
Dans chaque cas, la mise en œuvre de ces réformes a été accompagnée par des mesures courageuses destinées à faire sauter les résistances au changement. C’est la seconde leçon : faire preuve de courage. Par exemple, en Géorgie, on a dû licencier plus des trois quarts des policiers et près de 90 % des douaniers pour lutter contre la corruption.
En Malaisie, Najib Tun Razak, le nouveau Premier ministre, a crée un organe de coordination des réformes confié à un manager venu du privé et dont les décisions s’imposent à l’ensemble des autres ministères. Enfin, et c’est la troisième leçon, dans chacun de ces pays, on a mis en place des mécanismes qui permettent à la population de participer aussi bien au choix des politiques qui les concernent que dans l’évaluation des performances des services publics.
Cette participation est en outre renforcée par une transparence la plus grande possible dans les programmes gouvernementaux qui font l’objet d’une large diffusion auprès de tous les publics. « Si ces pays ont réussi des réformes aussi profondes, il n’y a aucune raison pour que l’Algérie n’en fasse pas aussi bien, sinon mieux. Et cela, d’autant plus que nous avons des atouts que ces pays n’ont pas : des ressources financières importantes qui permettent d’aller encore plus vite.
Ce qu’il faut c’est une volonté politique ferme d’engager des réformes de fond dans le mode de gouvernance qui a prévalu jusqu’ici » affirme le Thin-tank, pour qui, la réforme de l’Administration est un passage obligé. « Tant que l’Algérie n’aura pas mis en place une Administration professionnalisée – c’est-à-dire, compétente, motivée et comptable de ses actions – aucun progrès économique n’est possible » estime-t-on.
L’autre changement majeur qu’il est indispensable d’opérer, suggère le Think-tan, « c’est la participation des acteurs du développement aux grands choix économiques ». « Il est impossible en effet pour le gouvernement de continuer à faire cavalier seul dans la conduite de l’économie nationale.
C’est d’abord une impossibilité technique car il ne pourra jamais seul résoudre la complexité croissante de l’environnement des affaires. Mais c’est surtout une impossibilité méthodologique car le développement économique est fondamentalement fondé sur la confiance entre les acteurs. Sans cette confiance, la nécessaire mobilisation de l’ensemble des acteurs autour des objectifs de l’ambition économique algérienne sera vaine » explique le comité exécutif du think-tank
L’ÉTAT ALGÉRIEN « DOIT ACCEPTER DE REMETTRE EN CAUSE SA GOUVERNANCE »
« Il est donc indispensable que l’État algérien accepte de remettre en cause sa gouvernance » estime le think-tank. De façon pratique, il devra engager des réformes qui clarifieront de manière nette son rôle dans l’économie. Il devra abandonner son rôle d’intervention directe dans les marchés ; et, au contraire, renforcer considérablement son rôle de régulateur. On l’a vu partout, cette redéfinition du rôle de l’État est au cœur du processus de transition économique. C’est par là seulement que pourront réussir ce qu’on appelle les réformes dites de “deuxième génération” dans tous les pays en transition.
Cette redéfinition suppose trois changements majeurs : Développer la capacité de l’État dans son rôle de régulateur, réduire l’intervention de l’État comme opérateur économique et Définir une stratégie globale et cohérente d’amélioration du climat des affaires.
« Relancer l’économie algérienne vers une croissance autoentretenue est un objectif à notre portée. Nous en avons les moyens pour l’engager immédiatement. Prendre du retard dans les réformes indispensables rendra les choses plus complexes, creusera davantage les nombreux déficits dont souffre l’Algérie et obérera gravement son avenir » souligne le comité exécutif du think-tank “Défendre” l’Entreprise.
A.S
