Sellal avait sermonné les gestionnaires,Entreprises publiques… Par quoi commencer?

Sellal avait sermonné les gestionnaires,Entreprises publiques… Par quoi commencer?

Un travail de coordination du propriétaire qui est l’Etat devra être mené pour aider ces entreprises

Nous en sommes à cinquante ans d’indépendance. N’avons-nous pas encore compris que la performance des entreprises ne se décrète pas, qu’elle ne s’ordonne pas?

Dans un de ses poèmes les plus beaux, Kabbani disait à peu près ceci: «Cela fait vingt ans que je suis sur un livre d’amour, j’y suis pourtant, j’y suis toujours, et à la première page!» C’est ce à quoi nous fait penser le fait que le gouvernement, par la voix du Premier ministre, intime l’ordre aux entreprises de mieux faire! Nous en sommes à cinquante ans d’indépendance quand même. N’avons-nous pas encore compris que la performance des entreprises ne se décrète pas, qu’elle ne s’ordonne pas. Combien nous faudrait-il encore de temps pour comprendre que cela se cultive? Oui, cela se cultive!

On peut dire tout ce qu’on veut, mais la performance d’une entreprise demeure le résultat d’un comportement avant d’être quoi que ce soit.

Certes, généralement, on dit à nos étudiants que la performance d’une entreprise est un rapport entre son efficacité et son efficience, mais ce qu’il y a lieu de ne pas perdre de vue, c’est que c’est le comportement qui fait l’efficacité de cette entreprise et c’est aussi le comportement qui en détermine l’efficience.

Culture d’entreprise

Or, un comportement, cela pousse et cela s’entretient comme une plante, comme un être humain. On le désire ou pas ce comportement, ensuite, on le planifie sur un terme donné, puis on lui alloue les ressources nécessaires et on en contrôle la réalisation au fur et à mesure pour en corriger l’évolution sur le temps. On ne peut, en aucun cas, venir comme ça et dire aujourd’hui on va être performant, aujourd’hui on va être efficace.

Ce qu’il ne faut pas ignorer, d’un autre côté, c’est que la performance est largement dépendante de la culture d’entreprise, car à l’image des individus, il existe des entreprises qui ont la hargne de vaincre, de relever des défis, de se surpasser lorsque c’est nécessaire et il en existe qui n’ont ni l’envie ni la capacité de bouger les… méninges.

Là où l’on peut réellement intervenir, par contre, c’est dans le domaine du partenariat des entreprises publiques avec celles privées qui, tout en s’orientant vers le partenaire étranger ne devrait en aucun cas se détourner de celui national lorsque celui-ci fait preuve de savoir-faire et de connaissances intéressantes.

Il appartient à l’Etat d’encourager ce partenariat entre nos entreprises et celles privées, qu’elles soient de chez nous ou d’ailleurs. Pour ce faire, il a pour mission d’assainir l’environnement de l’investissement, car pour attirer les boîtes étrangères, il faudrait leur assurer par la législation un environnement qui soit propice à l’effort d’investissement et à l’action. Par ailleurs, aller au partenariat avec les entreprises étrangères ne signifie pas s’allier à n’importe quelle entreprise pourvu que le nom sonne d’ailleurs. Il est connu que parmi les effets bénéfiques du partenariat, le transfert des connaissances, de la maîtrise technologique et du savoir-faire figurent en première position, or cela n’est possible que lorsqu’il s’agit d’entreprises importantes, de grandes entreprises qui aient fait leurs preuves dans leurs secteurs relatifs.

Toutefois, et avant d’aller vers ce partenariat avec le secteur privé, il y a lieu de mettre en place une stratégie au sens plein du terme pour le secteur industriel. Sans cette stratégie, on a beau tenter de replâtrer, on finira toujours par se retrouver à la… première marche.

En effet, seule une stratégie pour le secteur, scientifiquement élaborée et rigoureusement mise en application, pourra permettre, non seulement à avoir un travail coordonné et harmonieux, mais aussi à profiter des synergies qui devraient être dégagées et à canaliser les effets d’entraînement. Pour tout dire, le fait que, comme l’a souligné le Premier ministre Sellal, cela ne fait pas plaisir d’avoir à déverser tant d’argent de la poche du contribuable dans des entreprises lorsque celles-ci se plaisent dans des positions de canards boiteux et ne tentent même pas de remédier à leur situation.

Bien sûr, cela ne concerne pas toutes nos entreprises publiques, mais il y en a quand même qui méritent cette dénomination au vu de leur état.

Nous en sommes, pour certains, encore au modèle des années 1960 de l’entreprise publique où l’Etat providence mettait la main à la poche pour compenser les mauvais résultats de la rentabilité sociale.

Et, quand bien même il nous arrive de parler avec des concepts modernes et à propos de modèles récents, certains de nos dirigeants des entreprises publiques continuent toujours à nager dans la conception de bien du beylik. Il continue à leur manquer cet engagement si nécessaire et cette hargne de bien faire les choses.

Le double rôle des managers

Tout compte fait, nous avons les moyens financiers, nous avons les hommes, nous avons de quoi et comment importer la technologie, il ne nous manque que deux choses, à savoir comment optimiser l’utilisation de toutes ces ressources, et c’est là le rôle des managers, et comment tirer profit de la connaissance des autres et c’est là encore le rôle des managers.

En Algérie, cela n’est un secret pour personne, le management est le grand malade de l’activité économique. Et tant que l’on n’y prête pas attention, nous pourrons continuer à nous lamenter tant que nous pouvons, cela ne changera rien à la situation.

Au contraire, comme les autres avancent et nous pas, nos entreprises économiques ne cesseront de voir leur situation se dégrader. Un autre problème qui se pose à nos entreprises publiques est le manque d’ambition de leurs managers et lorsqu’elles existent, ces ambitions sont souvent insuffisantes. Il est nécessaire de se pencher sur cet aspect des choses et de fouetter chez nos gestionnaires cette fierté d’être manager.

Il faut tout de même reconnaître que la pénalisation de l’acte de gestion était et demeure un facteur incroyablement limitatif en ce sens qu’il freine l’élan de tout gestionnaire qui désire prendre des risques, alors même que l’un des aspects les plus importants du management est la prise de risque.

Les cadres incarcérés pour «mauvaise» gestion sont encore trop présents dans l’imaginaire des autres qui les regardent, pour certains, comme un avertissement et, pour d’autres, comme un exemple. Le traumatisme est grand.

Si telle est la situation actuelle des entreprises publiques en ce début du troisième millénaire, c’est que ceux qui se sont succédé à la tête du secteur, surtout après l’époque de Boumediene, ont dû échouer quelque part. Nous reviendrons sur ce sujet une autre fois.

Pour l’instant, un travail de coordination du propriétaire qui est l’Etat devra être mené pour aider ces entreprises, mais par où commencer? Par le management? Par la formation des hommes? Par la mise en place d’une stratégie pour le secteur? Tout dépend de ce que veut réellement l’Etat de ces entreprises.