«Le facteur humain est responsable de plus de 90% des accidents de la route», disent les différents responsables dont les activités ont un lien avec ce secteur, qui étaient invités hier au Forum du quotidien El Moudjahid consacré à cette question.
S’il faut les croire sur parole, il n’en de meure pas moins que le problème est bien plus complexe qu’il ne paraît. Pour le directeur de la circulation routière au ministère des Transports, Tahar Messaoud Nacer, qui préfère plutôt parler d’«insécurité routière» et d’«actes de délinquance routière», les statistiques relatives aux accidents de la route «sont partielles» et «ne reflètent pas l’ampleur du problème».
Il fait état de «300.000 accidents par an» tous sinistres confondus, avec le triste record de plus de 4.000 morts et des milliers de blessés.
Le facteur humain, lié principalement à la vitesse, justifie amplement, selon lui, le durcissement de la loi rentrée en vigueur récemment.
Des peines pouvant aller à l’emprisonnement et de fortes amendes prévoit le nouveau texte. «Il faut orienter notre travail vers l’humain. Il faut informer (des nouvelles mesures), sensibiliser (sur les dangers) et convaincre» les usagers, affirme encore M. Messaoud Nacer.
Mme Dalila Benidir-Yazid, directrice du Centre national des permis de conduire (CENAPEC), voit dans cette situation un «refus délibéré de la part de certains conducteurs de respecter le code de la route». Pour le directeur général du Centre national de préservation et de sécurité routières (CNPSR), El Hachemi Boutalbi, si la responsabilité du conducteur n’est pas à démontrer, il faut néanmoins lui «garantir ses droits».
«Il faut lui assurer le minimum de conditions pour sa sécurité», notamment en terme de «qualité des routes, de signalisation, de parkings», ajoute-t-il. M. Boutalbi donne l’exemple d’accidents qui se produisent à proximité d’un lieu où se déroulent des travaux «parce que la signalisation n’a pas été placée suffisamment loin pour avertir les conducteurs», dit-il.
Outre ces constats, les représentants de la gendarmerie nationale et de la sûreté nationale, respectivement le lieutenant-colonel Ali Bellouti et Aïssa Naili (sous-directeur de la prévention routière), estiment que le parc roulant est de loin disproportionné par rapport aux infrastructures routières existantes. Selon eux, 85% du transport national se fait sur les routes où circulent plus de 5,2 millions de véhicules.
Un responsable de la compagnie d’assurance SAA estime à son tour que les accidents les plus graves sont causés par le transport des voyageurs et de marchandises. Pour lui, la solution est de «diversifier le mode de transport» et d’inclure notamment le rail et les liaisons maritimes pour le transport des conteneurs et autres marchandises.
Le président de l’association des agences de contrôle technique des véhicules est venu quant à lui indiquer des astuces aux services de sécurité pour mieux juger du respect des règles de sécurité par les conducteurs des poids lourds. «Vous savez, dès que le conducteur sort de chez le contrôle technique, il desserre le robinet de pression des freins des remorques arrière pour, paraît-il, économiser du carburant.
Alors qu’au moindre coup de frein, le poids de la marchandise risque de pousser le camion vers l’avant, ce qui provoque des accidents aux conséquences incalculables», explique-t-il. Néanmoins, outre ce facteur souvent présenté comme élément fondamental des accidents de la route, ces responsables reconnaissent tout de même qu’il reste encore beaucoup à faire en matière d’infrastructures.
Messaoud Nacer, par exemple, reconnaît que la signalisation routière (sous toutes ses formes) «doit être mise à niveau». Idem pour les ralentisseurs qui continuent à être mis en place «sans respect de la réglementation » les concernant. Le problème des normes, constate-t-il, concerne également les «ronds-points» dont certains sont qualifiés de «gigantesques».
M. Nacer confirme, par ailleurs, la création d’un centre de régulation de la circulation à Alger qui gèrera une centaine d’intersections déjà identifiées. Pour les représentants des services de sécurité, les barrages de contrôle sur les autoroutes sont «nécessaires pour réguler le flux de la circulation» mais également pour «assurer la sécurité».
Une question sur l’utilité de deux barrages (l’un de la gendarmerie et l’autre de la police) distants de moins de 2 km n’a trouvé aucune réponse.
A noter que très souvent, après des centaines de mètres et parfois jusqu’à deux kilomètres de bouchon avant de passer un barrage autoroutier, les usagers recourent à l’excès de vitesse pour compenser le retard mis dans ces encombrements désormais permanents même tôt dans la matinée.
Mohamed Mehdi