Sécurité routière durant le Ramadan : Attention ! Vous êtes flashés avant le f’tour

Sécurité routière durant le Ramadan : Attention ! Vous êtes flashés avant le f’tour

cette voie, les automobilistes ont vraiment respiré. Avant, c’était un enfer d’emprunter cet axe. Au fil du temps, il est devenu un point noir, non seulement en termes d’embouteillages durant les heures de pointe, mais aussi en termes de délinquance routière. Pourtant, la vitesse limitée à 80 km/h est largement suffisante pour bien rouler”, explique un agent de la sécurité routière relevant de l’Escadron de la sécurité routière de Réghaïa.

À deux heures de la rupture du jeûne, les esprits sont déjà échauffés. On a l’impression qu’il y aurait une espèce de “consensus au volant” des automobilistes à appuyer sur le champignon au prix de leur vie et de celle des autres. À 18h30, un fourgon est intercepté pour avoir roulé sur deux voies à la fois, en chevauchant, parfois, la bande d’arrêt d’urgence. Indifférent, le chauffeur ne semble pas être aussi inquiété. “J’habite juste à côté (Bab Ezzouar, ndlr). Je tue le temps. Mais je ne comprends pas pourquoi ils fouillent mon fourgon en utilisant un chien policier”, lâche d’un air lassé ce conducteur qui ne savait pas qu’il venait de mettre en danger deux véhicules. “Si vous êtes fatigué, je vous conseille de vous reposer quelques instants”, lui suggère un gendarme. La fouille terminée, il reprend la route non sans oublier de fermer la porte latérale. Le même scénario se reproduira moins de deux minutes après et, cette fois-ci, avec un conducteur d’une citadine. Visiblement épuisé, ce père de famille somnolait et répondait, en bâillant, au gendarme.

“C’est ça le Ramadhan. J’ai l’habitude de rouler comme ça et je n’ai jamais commis le moindre accident sur la route, sauf une fois à cause d’un camion qui m’a percuté. Son conducteur m’avait accusé, arguant que je dormais au volant”, témoigne cet automobiliste qui ne se rendait pas compte qu’il tenait à peine, avec une seule main, le volant. “Généralement, on arrête des automobilistes juste pour les éveiller. Une fois qu’ils reprennent leurs esprits, nous les invitons à reprendre leur chemin naturellement. C’est vous dire que ce n’est pas évident de convaincre les automobilistes durant le Ramadhan”, développe encore un autre agent chargé d’identifier de loin les profils des conducteurs dangereux. Mais les pires scénarios se déroulent de l’autre côté de la RN61 où deux types de radars sont déployés une heure avant la rupture du jeûne. Il s’agit des radars Gatso, un appareil embarqué sur le véhicule, et Topographe, un appareil mobile que déploient les gendarmes à quatre kilomètres du barrage fixe de Réghaïa.

“Cet axe devient extrêmement dangereux dès 19h”, nous explique le chef de barrage. Slaloms, dépassements dangereux, circulation à grande vitesse sur la bande d’arrêt d’urgence et des pics de vitesse allant de 120 à 150 km/h, c’est le lot quotidien à l’entrée d’Alger en ce mois de Ramadhan. “Je travaille à Boudouaou et j’habite Koléa. Voulez-vous que je rompe le jeûne sans mes enfants et ma femme ? Je baisse le rideau à 19h à cause de mes fidèles clients, nombreux à faire leurs emplettes dans mon magasin. Du coup, je dois récupérer le temps perdu. Je ne vois pas le mal si je roulais à 120 ou 130 km/h, même si la vitesse est limitée à 80 km/h, car la route est pratiquement vide”, tente de nous convaincre ce commerçant qui reconnaît sa récidive. Ce n’est pas le cas de ce conducteur de camion, originaire de Tizi Ouzou, qui livrait du poulet à Alger. “Cette route est très étroite. Je roule entre 70 et 80 km/h et j’estime que c’est déjà beaucoup. J’ai hâte de livrer la marchandise, certes, mais pas au rythme de ces conducteurs qui ne respectent guère le code de la route”, témoigne cet automobiliste, non sans ironiser : “J’ai remarqué une chose bizarre ici à Alger. Même si vous êtes en position de stationnement, on vous fait des appels de phares et on vous insulte.” Pour le chef de barrage de Reghaïa, “il n’y a pas un jour sans qu’on nous signale un chauffard sur cet axe. En plus de l’excès de vitesse, on les intercepte le téléphone à la main. C’est la raison pour laquelle on a démultiplié les patrouilles et les radars durant le mois de Ramadhan. On le fait à titre préventif. Après, tout dépend de l’attitude du conducteur, de ses urgences justifiées et autres impératifs qu’on prend en considération. À défaut, on sévit au nom de la loi”. Pour le commandant Abdelkader Beziou, chargé de la communication au commandement de la Gendarmerie nationale, “il s’agit de maintenir le cap pour réduire davantage les accidents de la route. On se félicite pour cette baisse de 25% de sinistres durant les quatre premiers jours de ce mois sacré. Mais on pourrait faire mieux si les automobilistes venaient à s’impliquer”. Révélant que tous les moyens humains et matériels sont déployés, M. Beziou a exhorté les automobilistes à respecter le code de la route. “L’hypovigilance, donc le facteur humain, est la raison principale des accidents. On doit conjuguer les efforts pour convaincre les chauffards à se rendre à l’évidence qu’ils mettent la vie des autres en danger”, a encore développé notre interlocuteur.

Selon les statistiques de ce corps d’armes, plus de 60% des accidents surviennent entre 18h et 20h durant le mois de Ramadhan. Du reste, à Alger-Ouest, les autres unités veillaient à la fluidité de la circulation, mais aussi au contrôle des alentours des mosquées et des lieux publics pour faire rségner la sécurité et l’ordre public. “Nos unités travaillent de jour comme de nuit. Le mois de Ramadhan est spécifique en termes de flux des personnes vers les lieux de détente et les marchés, mais aussi en termes de circulation routière qui connaît des congestions dès le cinquième jour”, a affirmé M. Beziou.

Reportage réalisé par : Farid Belgacem