Scoliose idiopathique : Les enfants scoliotiques dans la détresse

Scoliose idiopathique : Les enfants scoliotiques dans la détresse

La prise en charge chirurgicale de la scoliose a pratiquement disparu en Algérie dans les structures de santé publiques l Les transferts pour soins à l’étranger sont interdits l Des centaines d’enfants scoliotiques, notamment des filles, ne savent pas à quel saint se vouer.

La scoliose idiopathique est une déformation de la colonne vertébrale qui survient pendant la croissance, sans cause décelable et en dehors de tout contexte pathologique. Souvent, la scoliose est dépistée à titre systématique au même titre que la carie dentaire par le médecin scolaire, le médecin de famille ou le pédiatre. C’est parfois l’asymétrie du triangle formé par la taille et le bras de l’enfant qui intrigue les parents, ou l’impression qu’il a une grosse hanche, une épaule plus haute, un omoplate qui pointe ou bien une jambe plus courte. C’est l’examen clinique de l’enfant qui permet de faire la différence sur la notion de « bosse » ou de « gibbosité », expliquent les spécialistes.

La cause la plus fréquente est la mauvaise attitude assise à l’école, l’inégalité de longueur des membres inférieurs (la courbure disparaît en équilibrant le bassin), la raideur ou rétraction d’une hanche, etc. Bien qu’un facteur héréditaire paraisse certain, beaucoup d’autres hypothèses ont été avancées mettant en cause des facteurs neurologiques, musculo-ligamentaires, mécaniques ou biochimiques. Il est établi par les spécialistes que la scoliose dorsale et dorsolombaire idiopathique se constituent avant l’âge de 6 ans, et même probablement lors de la première année. Les filles sont 8 fois plus atteintes que les garçons. La déformation est inesthétique et a d’importantes répercussions psychologiques, a tenu à souligner le Pr Kaced lors du premier congrès de la Société algérienne de médecine physique, et elle a des répercussions sur l’état de santé des personnes, comme la diminution de la capacité respiratoire avec insuffisance respiratoire et répercussions.

C’est devant ces complications graves que les enfants sont soumis à des consultations, a signalé le Pr Kaced, président de la Samer. Elle a insisté sur la prévention de la scoliose en effectuant un dépistage systématique des enfants scolarisés. Un dépistage qui doit se faire à l’âge de 6 ans, notamment chez les personnes à risques et qui doit être refait à 9 ans et à 15 ans pour les filles et à 12 ans et 16 ans pour les garçons. « Il est important de dépister et de prévoir l’évolution d’une petite scoliose afin de décider du traitement qui empêchera cette évolution naturelle », a-t-elle indiqué. Les résultats de son étude portant sur l’évaluation de la prévalence de la scoliose idiopathique réalisée en 2006 qu’elle a présentée, ont montré que 2,6% d’enfants scolarisés à Alger sont atteints de courbures scoliotiques. Deux filles pour un garçon en sont atteints.

L’étude a donc porté sur 196 élèves d’un échantillon de 19 529 enfants suivant un cursus fondamental dans la capitale et souffrant d’une scoliose idiopathique. Cette unique enquête a montré que sur l’échantillon étudié, 868 élèves présentaient des courbures scoliotiques, consultés, dont 220 présentaient une déformation du 2e degré et 196 souffraient d’une scoliose idiopathique contre 4 qui l’ont développée. Le Pr Kaced a expliqué, en outre, que 8,9% ont eu un traitement conservateur, c’est-à-dire sans passer par le bloc opératoire, contre 2,3% de cas chirurgicaux, soulignant que sur les 89,5% cas surveillés, « beaucoup ne le sont plus actuellement à cause du changement de domicile ».en précisant que l’enquête en question a duré trois mois, alors que le suivi des patients s’est étalé sur deux ans.

Elle a déploré, par ailleurs, l’absence d’équipes dans les services spécialisés, ainsi que des équipements pour faire face à cette maladie. « Il y a une insuffisance de services qui prennent en charge la pathologie scoliotique, comme il y a aussi un manque d’équipes spécialisées, notamment dans la chirurgie. Depuis 2008, un dépistage systématique est organisé dans des écoles mais les enfants orientés ne sont pas pris en charge », a-t-elle encore déploré. Elle en appelle aussi à la mise en place d’une stratégie nationale pour la prise en charge de cette maladie en renforçant la formation des médecins de santé scolaire et des généralistes. Comme elle plaide pour la formation de spécialistes et la création d’équipes multidisciplinaires voire des pôles d’excellence. Elle appelle à la mise en place d’un comité national de la scoliose qui est aujourd’hui un véritable problème de santé publique en Algérie.

Par Djamila Kourta