Ce scandale vient se greffer aux attaques sur les autoroutes et dont ont fait l’objet plusieurs car-carriers chargés de transférer les véhicules neufs vers les dépôts et les show-rooms.
Ce qui n’était au départ qu’un simple soupçon s’est finalement avéré vrai : plusieurs véhicules neufs ont été désossés au port de Djen Djen, situé dans la localité de Taher, à Jijel, mais aussi des centaines de pièces de rechanges et d’accessoires pour les voitures de tourisme, les poids lourds et les engins de travaux publics, ont été dérobés de cette enceinte portuaire.
Ce port, pourtant soumis à des conditions de contrôle et de surveillance très rigoureuses, connaît une activité très intense en matière de transit et de dépôt de milliers de véhicules en provenance d’Europe, d’Inde, de Chine ou encore du Japon. Selon les premiers éléments de l’enquête menée par la section de recherche, relevant du groupement de la Gendarmerie nationale de Jijel, tout a commencé par de précieux renseignements faisant état du vol de pièces de rechanges et d’accessoires automobiles acheminés par un fourgon de marque Peugeot Boxer vers un magasin.
La complicité de deux agents de sécurité (dépendant du port et non de la société de gardiennage), ayant facilité la tâche à ce véhicule identifié pour circuler en toute quiétude, les enquêteurs ont alors tendu une souricière à son conducteur à la sortie du port. Finalement, le mis en cause allait acheminer un important lot d’accessoires pour véhicules légers, dérobé de véhicules importés de l’étranger par des concessionnaires, vers son local commercial de pièces détachées, basé au village Tassousst, dans la commune Émir-Abdelkader.
Le conducteur en question n’était pas seul le jour de son arrestation. Il était accompagné par le propriétaire de ce commerce. Lors de leur exploitation, ces deux individus ont reconnu avoir acquis la marchandise auprès de deux agents de sécurité dudit port et qui ont été interpellés à leur tour le même jour à la commune de Taher. Finalement, cette affaire n’est qu’un déclic !
De grandes complicités au port
Selon la même source, les firmes automobiles Peugeot, Renault, Citroën et Nissan sont touchées par cet acte de vol. En effet, révèlent les enquêteurs, des pièces de rechanges et des accessoires automobiles de ces quatre concessionnaires ont été identifiés alors que d’autres objets restent encore non identifiés.
Parmi les objets volés, on citera, entre autres, des postes de radio, des caisses à outils à l’effigie de Nissan, mais aussi des accessoires des camions poids lourds, eux aussi touchés par cet acte gravissime. Pis encore, les enquêteurs ont appris, hier, que des mémoires d’engins de travaux publics — des pièces qui coûtent entre 120 et 150 millions de centimes — ont disparu du même port. “Si, pour le moment, les gendarmes ont circonscrit leur enquête uniquement à Jijel, ces nouveaux renseignements ont changé la donne pour soupçonner carrément l’existence d’un réseau national. Les gendarmes soupçonnent d’autres complicités des services exerçant dans le port de Djen Djen et qui ont, probablement, déjà permis aux voleurs et aux trafiquants de s’attaquer aux véhicules neufs et de quitter en toute quiétude cette enceinte. Les enquêteurs attendent à ce que les victimes réagissent et déposent des plaintes pour mieux avancer”, a précisé, hier, le lieutenant-colonel Abdelhamid Keroud, chargé de communication à la GN. Il est vrai que l’enquête ouverte par la section de recherches de Jijel devra aboutir au démantèlement de tout un réseau spécialisé dans le vol de pièces de rechanges et d’accessoires automobiles dans ce port connu pour être le point de chute de milliers de véhicules.
Mais, entre-temps, les dégâts sont là : des centaines de véhicules neufs, livrés à leurs propriétaires dans les show-rooms et les dépôts, ont été dépourvus de pièces et d’accessoires. Le préjudice est doublement évalué. Du côté des concessionnaires, le manque à gagner s’élève à plusieurs milliards, alors que du côté des acquéreurs, des voitures neuves circulent avec de graves handicaps.
Ce scandale met au goût du jour les accusations portées à l’encontre des maisons mères par les clients. Ces derniers sont allés jusqu’à déposer des plaintes contre les représentations des firmes étrangères basées en Algérie, arguant que leurs voitures sont désossées ou dépourvues d’accessoires payés rubis sur ongles.
Notamment les clients qui ont passé des commandes sur des véhicules personnalisables et livrés dans des conditions strictement très sécurisées au vu de leur coût onéreux. Ne parlons pas des voitures livrées avec des égratignures sur des peintures métallisées, sans ampoules et veilleuses, sans balai d’essuie-glace, sans tapis, sans logos ou encore avec des vitres et pare-bises fissurées.
Une chose est sûre, cette enquête fera toute la lumière sur un phénomène qui dure depuis des mois, voire depuis des années. Cette affaire nous rappelle les attaques sur les autoroutes dont ont fait l’objet plusieurs car-carriers chargés de transférer les véhicules neufs vers les dépôts et les show-rooms, d’une part, et le trafic de véhicules via ces mêmes car-carriers avec la complicité des conducteurs chèrement payés pour veiller au grain.
F. B