Toujours distancé par le candidat socialiste dans les intentions de vote, le président sortant fait le forcing pour tenter de revenir dans la course à moins d’une semaine du scrutin.
Toujours à la traîne dans les sondages, le président candidat Nicolas Sarkozy joue une de ses dernières cartes dans la campagne présidentielle française, en mettant la croissance au centre du débat, quitte à désorienter son camp mais aussi ses partenaires allemands. A six jours du premier tour dimanche d’une élection dont le socialiste François Hollande apparaît chaque jour davantage comme le favori, Nicolas Sarkozy a balayé d’un revers de main les mauvais sondages.
«Les sondages, ça va, ça vient et on sait la crédibilité qu’ils ont», a-t-il affirmé hier, tandis que la presse fait état de doutes croissants sur sa stratégie au sein même de son camp. Dimanche, sur la place de la Concorde, lors d’un grand meeting en plein air à Paris, Nicolas Sarkozy s’était efforcé de galvaniser les dizaines de milliers de partisans venus l’acclamer. Et il a surpris en se prononçant en faveur de l’ouverture d’un débat sur le soutien de la Banque centrale européenne (BCE) à la croissance en berne de la zone euro. Il venait ainsi sur les thèmes de François Hollande qui, depuis le début de sa campagne, insiste sur la nécessité de placer la croissance au centre des politiques européennes, et pas seulement la rigueur budgétaire. «Sur le rôle de la Banque centrale dans le soutien à la croissance, nous allons aussi ouvrir le débat et nous allons faire avancer l’Europe», a lancé le président candidat, en pointant du doigt les «limites des règles» du traité de Maastricht qui donne pour mission première à la BCE de veiller à contenir l’inflation. «Il est bien temps qu’il arrive à la lucidité au terme de son mandat», lui a répliqué M.Hollande. «Dommage. Il l’avait oubliée (la croissance, ndlr) en chemin pendant cinq ans», a-t-il ajouté. Cette déclaration de Nicolas Sarkozy est aussi une entorse à un accord conclu en novembre dernier avec Angela Merkel, hostile à toute remise en cause de l’indépendance de la BCE, consistant à ne pas évoquer publiquement l’action de la Banque centrale sur les marchés pendant la crise. Le gouvernement allemand a «la conviction profonde» que la BCE doit exercer son mandat «de manière totalement indépendante», une conviction «connue à Paris», a rappelé hier le porte-parole de la chancelière. L’intention manifestée par Angela Merkel de venir, à un moment ou un autre, soutenir Nicolas Sarkozy dans sa campagne, ne s’est par ailleurs toujours pas concrétisée. Le discours de Nicolas Sarkozy sur la croissance renforçait cependant l’idée hier d’un certain flottement dans sa stratégie face à un François Hollande qui se targue de rester constant sur ses engagements. «Une semaine de campagne ne laisse plus guère de marges aux candidats qui comptent, pour changer leur stratégie de premier tour», constatait le quotidien la République des Pyrénées en soulignant les «tendances accablantes» des sondages contre Nicolas Sarkozy. Le candidat de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon, révélation de la campagne, a même asséné hier que c’était «cuit» pour Nicolas Sarkozy. Car l’avance de François Hollande reste toujours aussi nette au second tour, qui aura lieu le 6 mai (54 à 56% des intentions de vote) Le président sortant semble loin d’atteindre son objectif de sortir nettement en tête au premier tour dimanche prochain afin de créer une dynamique susceptible de changer la donne.
D’après les derniers sondages, les deux rivaux sont au coude à coude, sous les 30%, et les tendances les plus récentes sont plutôt favorables au socialiste. Au second tour, François Hollande est sûr de pouvoir compter sur un report écrasant des voix du candidat de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon (donné entre 13 et 16%) et de l’écologiste Eva Joly (2 à 3%).
Ce qui est loin d’être le cas pour Nicolas Sarkozy avec les voix de la candidate du Front National Marine Le Pen (14 à 17%). Quant aux électeurs du centriste François Bayrou (environ 10%), ils se partageraient à parts égales entre les deux hommes au second tour.