Sarkozy déclare l’Etat responsable dans l’abandon des harkis

Sarkozy déclare l’Etat responsable dans l’abandon des harkis

Nicolas Sarkozy a officiellement reconnu samedi la responsabilité du gouvernement français dans « l’abandon » des harkis après la fin de la guerre d’Algérie en 1962.

Cinquante ans après les accords d’Evian qui ont mis un terme au conflit, le président de la République, candidat à sa réélection, a également proposé la construction d’un monument national à Paris qui leur serait dédié.

Lors de la campagne de 2007, le futur chef de l’Etat avait promis que, s’il était élu, il reconnaîtrait « officiellement la responsabilité de la France dans l’abandon et le massacre des harkis, afin que l’oubli ne les assassine pas une nouvelle fois ».

À la fin des hostilités en Algérie, la France a abandonné les quelque 200.000 harkis, supplétifs musulmans de l’armée, qui ont été victimes de représailles. La France en a finalement accepté 40.000 sur son territoire, dans des camps d’urgence surveillés par les forces de l’ordre.

« La France se devait de protéger les harkis de l’Histoire. Elle ne l’a pas fait. Elle porte désormais cette responsabilité devant l’Histoire », a déclaré samedi le chef de l’Etat au cours d’un discours prononcé à la préfecture de Perpignan devant des harkis et descendants de harkis.

« C’est cette responsabilité que je suis venu reconnaître ici, à Perpignan, au nom de la République française », a-t-il ajouté.

Des associations de harkis ont salué cette annonce, évoquant un « grand soulagement ».

« Aujourd’hui pour nous c’est un symbole fort », a réagi Dalila Naceri, présidente de l’association Femmes et filles de harkis. « Ça signifie enfin la reconnaissance que la France a fait des choses pas très sympathiques. C’était une question d’honneur, c’était important dans nos consciences, pour que les harkis puissent partir dans la dignité. »

SIGNAL VERS L’ÉLECTORAT HARKI

Début mars, Nicolas Sarkozy avait déclaré que la France avait une « dette » vis-à-vis des harkis, sans aller jusqu’à annoncer les excuses et réparations promises il y a cinq ans.

Accompagné notamment de la secrétaire d’Etat à la Jeunesse Jeannette Bougrab, fille de harki, Nicolas Sarkozy a visité samedi un des camps d’urgence ayant accueilli des rapatriés d’Algérie, situé à Rivesaltes (Pyrénées-Orientales), où il s’est recueilli et a déposé une gerbe.

Se rendant ensuite à la préfecture, le président a remis les insignes de grand officier de la Légion d’Honneur au général François Meyer au nom de son engagement pour le rapatriement et l’intégration des harkis.

Dans son discours, il a insisté sur la responsabilité des autorités françaises dans le sort des harkis, évoquant une directive du gouvernement de l’époque qui condamnait leur rapatriement et réclamait des sanctions contre les officiers de l’armée qui, à l’image de François Meyer, organisaient ces transferts vers la Métropole.

« Cette note (…) marque malheureusement sans aucune contestation possible la responsabilité du gouvernement français dans l’abandon d’une partie des harkis », a-t-il fait valoir.

A huit jours du premier tour de la présidentielle, le président-candidat fait ainsi un signal à l’intention d’un électorat traditionnellement acquis à la droite.

« Je m’en moque que ce soit pour les élections. L’essentiel est que cela soit fait », estime Dalila Naceri, qui reconnaît toutefois que « la communauté harki vote généralement à droite » et que ceux de ses membres qui étaient « résignés à ne pas aller voter » pourraient changer d’avis.

Une journée nationale d’hommage, instaurée en 2001 par Jacques Chirac, commémore officiellement le souvenir des harkis tous les 25 septembre.

En 1995, l’ancien chef de l’Etat avait reconnu la responsabilité de l’Etat français dans la rafle du Vel’ d’Hiv’ en 1942 à Paris, où plus de 13.000 juifs avaient été arrêtés par les forces de l’ordre françaises et déportés vers les camps d’extermination allemands.