Le président français, Nicolas Sarkozy, a fait appel, il y a quelques jours seulement, à l’ancien Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, pour le charger d’une mission sur la coopération économique entre l’Algérie et la France et le développement de l’investissement entre les deux pays.
Nommer un «Monsieur Algérie» en ce moment précis, dans un contexte de crispation des relations entre Alger et Paris, exprime un besoin, ou plutôt une inquiétude bien française qui pense avoir perdu pied en Algérie en matière de parts de marché. Pourtant, la réalité est tout autre.
Des officiels français se sont félicités, à plusieurs occasions, des opportunités offertes à leurs opérateurs économiques qui ont réussi tout de même là où beaucoup se sont plantés. Ce n’est un secret pour personne que des groupes français ont pu avoir accès à des marchés qui leur ont même permis d’échapper à la disparition pure et simple.
Lorsque l’ancien Premier ministre affirmait, dans un communiqué qu’il a rendu public, il y a quelques jours, que sa mission consiste à «identifier et à lever les obstacles entre la France et l’Algérie pour leurs investissements économiques respectifs», l’on ne peut évacuer trois importantes questions, à savoir qu’est-ce qui empêche les relations algéro-françaises de prospérer ? Quels types d’obstacles M. Raffarin se doit de lever ?
La nomination de l’ancien Premier ministre a-t-elle été décidée parce que les canaux traditionnels des relations entre les deux pays ne suffisent plus ou ne fonctionnent plus ? Tout le monde sait pourquoi les relations entre les deux pays sont au plus mal aujourd’hui.
Les rapports entre Alger et Paris échoppent, en effet, sur plusieurs dossiers. D’abord le contentieux sur la mémoire, ensuite l’affaire du diplomate Hasseni, celle des circonstances de l’assassinat des 7 moines de Tibhirine.
La tension a été telle que la visite du président Bouteflika à Paris a été annulée. Ainsi, il est crédule de penser que les entraves à lever ont trait seulement à la coopération économique et à l’investissement.
Bien que la lettre de mission de Sarkozy n’ait pas abordé les autres volets des relations entre les deux pays, comment motive-t-il alors la nomination de «Monsieur Algérie» ? En affirmant que la France «demeure l’un des tout premiers partenaires économiques de l’Algérie.
Pour autant, nul acquis n’est définitif et nous devons veiller à maintenir et autant que possible accroître nos positions et marché», Sarkozy soutient, cependant, que «certaines difficultés rencontrées par les entreprises françaises nécessitent un accompagnement extérieur».
Le président français laisse entendre par ailleurs que la mission de Jean-Pierre Raffarin est venue sanctionner les discussions qui ont eu lieu à Alger les 21 février et 20 juin derniers entre le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant, et le Premier ministre algérien, Ahmed Ouyahia.
Levant le voile ainsi sur une partie des entretiens entre les deux hommes, il indique dans la lettre de mission qu’ils (Ahmed Ouyahia et Claude Guéant) «se sont accordés sur l’opportunité de confier de part et d’autre le suivi de ces relations à une personnalité de haut niveau, dont le rôle serait notamment de coordonner la coopération économique franco-algérienne ainsi que le développement des investissements français en Algérie et algériens en France». La nomination de M. Raffarin répond donc un accord déjà conclu.
Reste à savoir si du côté algérien, l’on pense à faire de même, notamment nommer une sorte de «Monsieur France». Chose impensable, au demeurant, vu la manière dont on conçoit la problématique française du côté algérien.
A une partie de ces questionnements, l’on aura certainement quelques bribes de réponses, dans les prochains jours.
L’ambassade de France à Alger aurait prévu une sortie médiatique dans laquelle elle pourrait apporter des éclaircissements sur l’évolution des relations algéro-françaises. Mais auparavant, c’est la secrétaire d’Etat au Commerce extérieur qui effectuera une visite en Algérie la semaine prochaine.
Said Rabia