Alors, Sammy Oussedik, vient de lancer un think tank dénommé Ibtikar. Pourquoi lancer une pareille initiative et pourquoi maintenant?
Ibtikar n’est pas, à proprement parler, un think tank. Nous nous rapprochons plus du Think to Do. À savoir que nous avons comme spécificité d’articuler réflexion et action. Nous ne sommes pas un parti politique classique ni un think tank, nous sommes autre. chose. Cette autre chose qui est en lien direct avec, d’une part, la crise des formes de médiation classique tant politique, que sociale ou culturelle, et d’autre part, la rareté des espaces de réflexion dans notre pays. Alors pour résumer, nous sommes une pensée en action.
Quels sont les profils qui constituent les membres d’Ibtikar et comment Ibtikar agit-il et compte agir, puisque vous parlez là d’action, concrètement?
Ibtikar, qui sera lancé au début 2016, sera constitué de profils divers. Ouvert aux citoyens, aux associations et en lien avec les forces politiques, Ibtikar est un mouvement inclusif, transgénérationnel, dont la préoccupation première est de réinvestir le champ de l’avenir.
La réflexion et les actions d’Ibtikar s’enchâsseront dans un socle de valeurs dont, au premier chef, la défense de la démocratie, l’Etat de droit, le pluralisme, la réversibilité des options politiques (alternance), la liberté de conscience, le droit des minorités… Nous allons organiser la réflexion autour de cinq pôles: – économie et finances – politique extérieure et défense – énergie, environnement et aménagement du territoire – droit, justice et liberté – culture, société et santé. Ces pôles auront deux fonctions stratégiques: préparer, pour le moyen long terme, un corpus de visions et propositions.
Alimenter l’action par des propositions en lien avec l’actualité de notre pays et ainsi intervenir comme acteur dans les débats cruciaux qui ne manqueront pas de se poser dans un avenir proche.
En termes d’actions, nous interviendrons en défendant des positions sur les politiques menées ou à mener et nous nous coordonnerons avec les autres forces politiques, sociales et culturelles pour être présents sur le terrain.
Mais pour peser véritablement sur les orientations du pays, il convient d’atteindre la sphère décisionnelle. Or, n’étant pas un parti politique, comment comptez-vous le faire?Votre coopération avec les partis sera-elle à ce point intime?
La crise de la médiation politique est aujourd’hui universelle. Les partis politiques traditionnels ont quelque difficulté à organiser cela. Pour notre part, notre analyse est qu’il convient, d’abord, de participer à rééquilibrer le rapport de forces actuel qui est en défaveur des forces de progrès. Ce que nous apprend l’histoire, c’est qu’il n’y a aucune conquête du pouvoir sans un long travail sur la société. À nous d’y participer efficacement avant de penser à l’exercice d’un quelconque pouvoir.
Il existe d’autre think tanks ou groupes de réflexion en Algérie. Comment comptez-vous approcher ces autres organisations? Allez-vous inscrire votre démarche dans une logique de rivalité, étant donné que les valeurs que défendra chacune d’entre elles ne sont pas toujours les mêmes, ou, au contraire, comptez-vous privilégier la recherche des points de convergence?
Je me félicite de cette dynamique. Tout ce qui peut entamer l’hégémonie de la pensée est à encourager. Pour notre part, nous avons inscrit dans notre ADN, l’action collaborative. Je vous disais plus haut que nous avons comme ambition de participer à rééquilibrer le rapport de forces aujourd’hui défavorable aux forces de progrès. Et pour cela il nous faut imaginer et organiser des articulations vertueuses entre nous. Pour notre part, nous nous sommes déjà rapprochés de certaines de ces organisations, à savoir Care et Nabni, afin de leur présenter notre démarche et d’envisager, à l’avenir, des formes de collaboration. En conclusion, un des enjeux à venir sera, aussi, de mettre au coeur de notre action le fait que, entre forces et organisations qui oeuvrent au progrès et à l’instauration d’une démocratie effective, ce qui nous rapproche est plus important que ce qui pourrait nous diviser.