C’est fait. Bien sûr, ils seront là,» a déclaré le Commissaire du salon international du livre à l’Agence France presse.
Le patron des Editions Casbah ne craint pas le ridicule. Comme si de rien n’était, il a choisi l’AFP pour lui faire savoir que les Egyptiens seront présents au Salon international du livre qu’Alger prévoit d’abriter du 27 octobre au 7 novembre prochains.
«Il n’y a jamais eu d’interdiction, » at- il rajouté sans complexe à propos de la participation de l’Egypte à cette importante manifestation. Il est dit que le pays de pharaons sera représenté par la bibliothèque d’Alexandrie, ce lieu grandiose et historique de l’intellectualisme arabe. Smaïl Meziane a la mémoire courte.
Du coup, il ne se souvient plus qu’il ait déclaré, haut et fort et publiquement, que les Egyptiens n’étaient pas les bienvenus en Algérie parce qu’ils ont malmené l’équipe nationale de football.
Il a eu cette intelligence rare de trouver un lien fort entre le football et le livre. Il s’est même permis à ce titre de s’ériger en tant que défenseur «des constantes et de la souveraineté nationales » et de parler au nom de tout le peuple algérien.
Ce qui est curieux, c’est que ceux des responsables qui l’ont nommé Commissaire du Salon international du livre n’ont pas jugé utile et nécessaire de réagir à de telles insanités alors qu’il est plutôt question d’échange de pensées intellectuelles pures et saines. En fermant les yeux et les oreilles sur de tels dépassements, ils se mettent même en porte à faux par rapport aux évolutions positives enregistrées entre les deux pays au niveau politique.
Ils ont dû oublier que le président Moubarak est venu rendre visite, en juin dernier, au président Bouteflika et que des poignées de mains et des embrassades bien chaleureuses ont été échangées entre eux.
Enfin, heureusement que la réaction ne s’est pas faite timide du côté des universitaires et intellectuels algériens, qu’ils soient à l’intérieur ou à l’extérieur du pays. Ils ont acculé Smaïl Meziane qui par des écrits, qui par la signature d’une pétition, pour qu’il recule.
Il a donc tenté de colmater les brèches causées par sa grosse bévue. Il décide alors d’évoquer un problème de sécurité. En effet, il avait estimé que son refus d’inviter les Egyptiens était lié à des considérations d’ordre sécuritaire. Pour lui, les Egyptiens, une fois à Alger, allaient se trouver en danger. Il aurait peut-être craint la réaction des fans des Verts qui profiteraient de cette présence pour crier vengeance.
Il ne s’est pas dit que c’est parce qu’il y a des énergumènes comme lui qui le suggère en rabâchant les causes et les faits d’un malheureux incident que les choses pourraient davantage s’envenimer. Il doit quand même voir que l’on est bien loin du Caire et d’Oum Dourmane. Même que l’ère Saâdane a pris fin et qu’une autre étape devra être franchie sur de nouvelles bases et une nouvelle approche.
Le Commissaire du Salon international du livre veut faire preuve de sagesse en soulignant qu’«en concertation avec les Egyptiens, il a été décidé de restreindre à un stand de 100 m² la présentation de leurs éditeurs.» Il pense que c’est mieux ainsi pour «éviter tout incident.»
Mais il est évident que c’est la décision des éditeurs arabes de boycotter le salon au cas où les Egyptiens ne seraient pas invités qui a obligé Meziane à changer de ton et d’optique. Voilà une histoire drôle dont l’Algérie aurait pu s’en passer pour éviter de patauger, encore une fois, dans l’absurde.
Ghania Oukazi