Salir les rues, un acte politique en Algérie?

Salir les rues, un acte politique en Algérie?

Le gouvernement algérien se dit décidé à « nettoyer » ses villes. Mais les algériens le veulent-ils vraiment?

Les villes algériennes ne sont pas propres (pour ne pas dire qu’elles sont sales, dignité nationale oblige). Sur nos trottoirs le spectacle est d’une tristesse nauséabonde : des  mégots par ci, des papiers et des bouteilles, – toutes marques confondues-, par là. Les ordures traînent par terre, les poubelles débordent. Tellement que c’est la première chose à laquelle a voulu s’attaquer le premier ministre, Abdelmalek Sellal, installé tout récemment.

« Il faut nettoyer le pays » avait-il asséné, provoquant la surprise. Mais s’est-il seulementdemandé pourquoi nos villes sont si sales, les algériens si indisciplinés sur les horaires de collecte des ordures et pourquoi ils aiment tant balancer leurs bouts de papiers, leurs mouchoirs et autres détritus par les fenêtres (des maisons autant que des voitures)? Non, ce n’est pas parce qu’ils sont sales. Loin de là. Preuve en est, lorsque l’on  rentre chez eux, c’est toujours, ou presque, nickel. L’Algérie est peut être aussi sale tout simplement parce que les algériens, en salissant, y trouve une façon d’exprimer leur rupture avec l’espace public. En rejetant cet espace qui n’est plus le leur, ils contestent ceux qui sont censés le nettoyer et le diriger. Salir les rues peut être vu comme une sorte d’acte politique à travers lequel les algériens prennent beaucoup de plaisir à dire à ceux qui les dirigent : « Nous rendons visible, les saletés que vous faites derrière notre dos !». Sauf que toute cettecontestation politique très subtile qui consiste à faire croupir l’Algérie dans les saletés, veut être combattue. Et en plus de Abdelmalek Sellal, le tout nouveau ministre de l’environnement, Amara Benyounès, a lui aussi déclaré la guerre aux saletés dans nos villes

Pour lui, « les règles d’hygiène et d’environnement doivent être strictement respectées » par les citoyens.

Il envisage même de passer aux sanctions. En contre partie, il promet des villes bientôt « saines et dignes » de nous autres algériens. Certaines promesses sont tellement douces, apaisantes que l’on s’oblige à y croire, même sans y croire. Et tant pis pour la contestation politique.