Rafik Saïfi ne veut pas donner d’avis sur la décision prise par Anthar Yahia, Matmour et Belhadj de mettre fin à leur carrière internationale. Il se contente de dire que c’est une décision personnelle qui concerne les trois joueurs. L’ex-international algérien nous dira, toutefois, que le meilleur hommage qui lui a été rendu est l’accueil des héros qui leur a été réservé, lui et ses camarades, à leur retour d’Oum Dourmane avec le billet qualificatif pour le Mondial sud-africain. L’ex-Mouloudéen nous dira, à la fin, qu’il songe à mettre fin à sa carrière de joueur et d’entrer dans le monde du coaching.
Plusieurs spécialistes ont donné leurs avis sur la décision des trois joueurs, Anthar Yahia, Matmour et Belhadj, de se retirer de la sélection. Qu’en pensez-vous, en votre qualité d’ancien joueur des Verts qui a passé 12 années avec l’équipe nationale ?
Il est vrai qu’on a joué ensemble pendant quelques années en sélection, mais je ne peux m’immiscer dans des décisions personnelles avec lesquelles je n’ai aucune relation. Ils sont responsables et libres de leurs décisions. Il y a un entraîneur en place et des responsables, qui peuvent donner leurs avis sur le sujet. Les concernés ont donné leurs explications, cela est suffisant, et moi je n’ai rien à y voir.
Mais il s’agit de vos anciens camarades, et il n’y a pas de mal à nous donner votre avis.
Franchement, je n’ai absolument rien à dire, mis à part qu’ils sont libres de leurs décisions. Cela dit, vous me donnez, là, l’occasion pour répondre sur ce qui a été dit autour de cette affaire.
Allez-y.
Beaucoup a été dit sur le fait que des joueurs retraités ont été honorés et pas Saïfi. Cela ne me dérange pas du tout. Je ne me mêle ni de ceux qui ont été honorés ni de ceux qui les ont honorés.
Mais le fait de ne pas avoir au moins la reconnaissance des responsables après 12 années de loyaux services rendus à la sélection ne vous dérange-t-il pas ?
J’ai déjà été honoré, mais pas de la part des responsables.
Par qui, alors ?
De la part du peuple algérien, des millions d’Algériens et des supporters de l’Equipe nationale. Mais aussi de la part de mes parents, que Dieu les préserve. Avez-vous oublié l’accueil chaleureux qui nous a été réservé, à l’aéroport, lors de notre retour du Soudan ? Voir des millions de gens vous attendre dans les rues de l’Algérie, c’est le meilleur hommage pour moi dans toute ma carrière de footballeur. Je n’oublierai pas ces moments tant que je suis en vie. Je n’ai pas besoin d’autre hommage.
Mais vous méritez au moins un clin d’œil de la part des responsables de la sélection, n’est-ce pas ?
Inutile de nous perdre dans des futilités, vous savez bien comment les choses fonctionnent. Je devais être parmi les premiers à être honorés en ma qualité de l’un des plus anciens joueurs de la sélection, mais j’ai été ignoré. Peut-être parce que j’étais un joueur local, qui a évolué dans son pays avant d’aller en Europe. Ou peut-être pour une autre raison. De toutes les façons, cela ne me dérange pas. L’amour des gens pour moi, et l’hommage qui m’a été rendu par le peuple algérien, sont le meilleur hommage qui soit.
Revenons sur le cas des trois joueurs qui se sont retirés. Disons qu’Anthar Yahia et Belhadj sont épuisés et ont atteint le seuil de la retraite, mais qu’en est-il de Matmour, âgé tout juste de 26 ans ? Pensez-vous que sa décision de retrait temporaire est opportune ?
Comme je l’ai déjà dit, il est libre de ses actes, et je n’ai pas le droit de m’immiscer dans ses décisions ou dans sa vie. Il y a un sélectionneur et des responsables, et c’est à eux de commenter et de chercher les raisons de sa décision de retraite.
Pensez-vous qu’il y a des joueurs qui ont beaucoup donné à la sélection et qui méritent de partir par la grande porte en les honorant même symboliquement et en les remerciant pour tous les services rendus à l’Equipe nationale ?
Absolument, et ils sont nombreux. Raho a beaucoup donné à l’équipe et il mérite un meilleur sort. Idem pour Zaoui, qui mérite d’être honoré. Il y a d’autres joueurs également. Avant nous, il y avait Tasfaout qui a rendu d’énormes services à la sélection et Dziri aussi. Avons-nous oublié tout ce qu’il a fait pour la sélection sans que personne ne s’intéresse à lui après sa retraite ? Ils méritent tous d’être honorés. Mais, Dieu merci, ces gens-là ont été tous reconnus par le peuple algérien. Si vous demandez au public algérien de vous donner son avis sur ce que Saïfi, Tasfaout, Raho, Dziri ou Zaoui, et les autres que je ne peux pas citer tous, ont donné à la sélection, ils vous diront beaucoup de choses. C’est le meilleur hommage pour nous. Je profite de l’occasion pour ouvrir une parenthèse et dire que le fait de ne pas être honoré au moment de ma retraite ne me dérange pas.
Comment voyez-vous l’image de la sélection après le retrait de trois de ses cadres ?
On n’a rien à craindre sur l’avenir de la sélection. De grands joueurs, qui ont beaucoup donné à la sélection, ont arrêté et notre équipe a continué de réaliser de bons résultats. On s’est arrêtés à notre tour, et l’équipe a continué dans la même voie. Après l’arrêt de ces joueurs actuels, la sélection poursuivra son chemin et pourra réaliser des résultats meilleurs. La vie continue comme on dit. Une génération est venue derrière nous ; il y aura une relève pour ceux qui viennent de se retirer dernièrement, et qui pourrait faire mieux que ce que nous avons fait. Cette nouvelle génération est consciente de sa mission de reprendre le flambeau des mains de l’ancienne génération. Elle sait qu’elle doit donner de la joie au peuple algérien. On est derrière ces joueurs en tant que fidèles supporters, et ils n’ont qu’à mener la sélection à bon port.
Pensez-vous que cette génération, composée de joueurs comme Feghouli, Cadamuro, Guedioura et Boudebouz, est capable de rééditer votre exploit, en menant l’Algérie au Mondial du Brésil 2014 ?
Pourquoi pas ? C’est une génération de jeunes joueurs qui sont en train de réaliser un bon parcours jusque-là. Je crois qu’ils sont capables d’atteindre cet objectif. Ils sont même capables de réaliser de meilleurs résultats que ceux que nous avons réalisés. Ils sont conscients que ce que nous avons réalisé ne doit pas partir en fumée, et ils savent que leur mission est de défendre la place que nous avons atteinte et faire en sorte d’améliorer, à chaque fois, les résultats. Dans le cas de la qualification au Mondial, ils doivent essayer de faire mieux.
Passons, maintenant, à autre chose, et parlons de votre histoire avec le monde du coaching. On a appris que vous vous préparez activement à devenir entraîneur. Le moment est-il venu pour mettre fin à votre carrière de joueur ?
Après le Mondial 2010, j’ai pris la décision de mettre fin à ma carrière. Les responsables d’Amiens m’ont approché juste après et m’ont proposé leur projet ; j’ai décidé de continuer et de signer un contrat de deux ans. Maintenant que je suis arrivé au terme de mon contrat, je songe sérieusement à la retraite. A 50 %, c’est fini. Je veux prendre tout mon temps lors des vacances pour réfléchir à la question avec ma famille. Mais je vais vous ajouter quelque chose.
Allez-y.
Les responsables d’Amiens m’ont proposé de prolonger pour une saison supplémentaire, mais la proposition ne me convient pas. J’ai décidé, donc, de quitter cette équipe. Je vais prendre en tous les cas une décision finale cet été. S’il y a des propositions convenables, je vais continuer à jouer ne serait-ce que pour une seule saison. S’il y a aussi des propositions pour travailler comme entraîneur adjoint ou dans les petites catégories, j’accepterai aussi.
Comment cette idée d’entrer dans le monde du coaching a-t-elle germé dans votre tête ?
Il est difficile pour un joueur qui a consacré toute sa vie au football de quitter ce monde après sa retraite. J’aime le football ; je le respire même. J’ai décidé, donc, de rester dans le monde du football. J’ai commencé à étudier, ici en France, en prenant part aussi à des stages depuis la saison dernière. Je suis titulaire d’un diplôme d’entraîneur de premier degré qui me permettra d’entraîner à l’avenir. Je ne dirai pas que je serai un grand entraîneur, mais je veux apprendre comme c’est le cas des entraîneurs qui prennent en main les grands clubs actuellement.
On peut, donc, vous voir comme entraîneur ou adjoint, la saison prochaine, dans le cas ou vous décideriez de prendre votre retraite de joueur ?
Pourquoi pas ? Je peux travailler dans les petites catégories, entraîneur adjoint ou manager général. Il se peut que je sois aux côtés d’un grand entraîneur pour apprendre avec lui.
On peut même vous voir entraîner un jour le Mouloudia, une fois expérimenté dans le monde du coaching…
Pourquoi pas ? Le Mouloudia est mon premier et dernier amour. C’est ma deuxième famille. C’est l’équipe qui a fait Saïfi et qui m’a fait un nom en Algérie et à l’étranger. C’est grâce au MCA que j’ai joué en France. Je lui serai reconnaissant toute ma vie. Et si la chance se présente pour un retour dans ce club, je ne fermerai pas la porte. Entraîner le Mouloudia est un rêve pour moi, et je ferai de mon mieux pour le servir comme je l’ai fait lorsque j’étais joueur dans les années 1990.
Une dernière question. Dans le cas ou vous décideriez d’arrêter, allez-vous rentrer en Algérie ou pas ?
Entre les deux, une fois en Algérie et une autre en France.