Saïd Sadi : “Il n’y a pas de peuples maudits, mais des peuples démissionnaires”

Saïd Sadi : “Il n’y a pas de peuples maudits, mais des peuples démissionnaires”

Il appelle la société à se dresser en rétablissant le débat, en réhabilitant la culture de la tolérance et en bannissant les extrémismes politiques et religieux. “Avril 80 est un message de pédagogie qu’il faut méditer et suivre”, dira-t-il.

“Le régime est en train de se fasciser de plus en plus. Il ne cesse de suivre une politique d’étouffement général, économique, social et politique, et aussi d’aliénation du peuple à travers son hégémonie idéologique, culturelle et linguistique, mais il n’y a pas de peuple dépossédé de son espoir, il n’y a pas de peuples maudits ou bannis, mais seulement des peuples démissionnaires”, a lancé, hier, le Dr Saïd Sadi en guise d’appel à un véritable sursaut de la société pour faire aboutir le combat démocratique et la question de tamazight en Algérie.

Intervenant dans la salle pleine à craquer de la maison de la culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou où il a animé, conjointement avec Mouloud Lounaouci, Arab Aknine, Saïd Doumane et Amar Zentar, une conférence-débat sous le thème “Le 20 Avril : fidélité et perspectives”, l’ex-président du RCD a souligné que “si la société réussit un nouveau sursaut, on est sauvé ; si le contraire se produit et qu’on ne change pas de vision, l’histoire ne saura nous attendre” car, a-t-il estimé, les dégâts causés par le pouvoir sont très importants, plus particulièrement dans la région de Kabylie où il y a, a-t-il martelé, “une volonté de paralyser la population par la pauvreté, une volonté de faire fuir l’investissement, donc d’étouffement économique et social général, des pressions policières, une volonté de folklorisation de tous ses symboles générant ainsi une terrible régression culturelle, et aussi une volonté manifeste de salafisation et de survalorisation des félons et kabyles de service”. Mais la pire et la plus pernicieuse des politiques du pouvoir est, de l’avis de Saïd Sadi, celle de l’arabisation qui pose un double problème, à savoir celui de priver le citoyen d’accéder aux sources de la rationalité et celui d’imposer une hégémonie linguistique qui empêche tout épanouissement de la culture amazighe.

“Le pouvoir n’est, certes, plus dans la négation conceptuelle de la dimension amazighe comme ce fut le cas avant Avril 80, mais il est dans une autre phase qui est celle de son blocage technique et de sa pollution à travers le travail qu’il mène pour tenter d’imposer sa transcription en caractères arabes. Et si le pouvoir fait tout pour maintenir tamazight dans une position toujours inférieure à la langue arabe, c’est parce qu’il sait pertinemment que la langue qu’il tente de perfuser dans les esprits est une langue artificielle et que tamazight est une langue populaire qui a traversé des siècles grâce à la résilience culturelle”, a expliqué Saïd Sadi non sans soutenir que si l’attachement des hommes du pouvoir à la langue arabe était sincère et porté par des convictions, ils n’auraient pas placé leurs enfants au lycée français Alexandre-Dumas d’Alger.

“On ne peut pas semer l’ignorance dans le peuple juste pour le dominer”, dira-t-il en qualifiant cette politique de “véritable crime d’État”. C’est d’ailleurs contre cette politique que Saïd Sadi appelle la société à se dresser en rétablissant et densifiant le débat, en réhabilitant la culture de la tolérance et en bannissant les extrémismes politiques et religieux.

“Avril 80 est un message de pédagogie qu’il faut vraiment méditer et suivre”, dira-t-il. Abondant dans le même sens, Arab Aknine, Mouloud Lounaouci, Saïd Doumane et Amar Zentar ont, tour à tour, souligné l’urgence de la prise en charge populaire de la question de tamazight car, notaient-ils unanimement, “il n’y a plus rien à attendre du pouvoir en place dans un pays qui est victime d’un hold-up au profit d’une caste qui a dilapidé 800 milliards de dollars, alors qu’on continue à importer l’ail de la Chine”.