Le président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Saïd Sadi, garde l’intime conviction que le changement du système en Algérie est inéluctable. «L’effondrement du système interviendra. C’est à la fois une évidence historique et une fatalité politique», a-t-il asséné hier, dans son discours liminaire aux travaux du conseil national du parti réuni en session ordinaire à Alger.
Le changement, plus tôt il interviendra, mieux c’est, devait souligner le président du RCD qui, lucide, a averti des risques d’éclatement que la nation court si du temps est encore perdu. «Si on perd encore un peu plus de temps, la nation algérienne va éclater », craint-il. «Bouteflika et Tewfik sont absorbés par la sauvegarde du régime qu’ils en oublient la sauvegarde de l’espace national», a-t-il affirmé, évoquant une dynamique de sécession chez les Touareg dans le Sud et un sentiment de larguer les amarres, devenu important en Kabylie. Pour Saïd Sadi, le pouvoir est totalement déconstruit et le système est dans l’incapacité de générer une offre politique sur laquelle il aurait été peut-être possible de se positionner. Le président du RCD, qui cite ce que le pouvoir commet en termes d’actes pratiques, tels que le statut de l’avocat, le code communal, etc., devait aussi relever qu’il n’est manifestement aucunement dans l’intention du régime de s’amender. D’ailleurs, Saïd Sadi ne croit pas à un amendement du système de l’intérieur.
«Il est illusoire, voire même dangereux de croire qu’il y a une solution qui viendrait de l’intérieur du système. Ils (les tenants du pouvoir, ndlr) sont usés, divisés mais surtout ils ont peur.» A juste titre, le président du RCD a fait remarquer que tous les partis politiques, à l’exception de ceux qui avaient pris les armes, ont tenté, le RCD y compris, d’élargir les espaces à l’intérieur des institutions. Mais tous ont tiré la conclusion que les choses ne peuvent s’amender de l’intérieur. Mais pourquoi le changement considéré comme une «fatalité politique » épouse-t-il, ici, un processus long ? Saïd Sadi, qui affirme que le pays traverse toujours une situation pré-insurrectionnelle, trouve à cela deux raisons : la nature de l’armée et la clientélisation de larges segments de la société. «L’Algérie devrait être comparée non pas à la Tunisie et l’Egypte mais à la Libye et à la Syrie. L’armée est inculte et violente.»
Cela étant, le président du RCD met à nu la contradiction chez le pouvoir en posant la question lancinante de savoir pourquoi il (le pouvoir) engage des réformes politiques alors qu’il estime, comme il l’a fait jusque-là, que les mécontentements exprimés dans la rue posent des problèmes sociaux. Saïd Sadi a fait savoir que 30 milliards de dollars ont été dépensés depuis janvier 2010 pour éteindre les foyers de tension, ceci alors qu’à l’époque de Zeroual, le pays en entier fonctionnait avec 9 milliards de dollars par an.
«Le retour de manivelle sera dévastateur», prédit-il. Evoquant, par ailleurs, l’attitude du monde occidental vis-à-vis des luttes des peuples des pays du Sud, Saïd Sadi a noté que «c’est pour la première fois que les grandes puissances ont compris qu’il ne s’agit plus de composer avec les pouvoirs mais d’enregistrer les aspirations des peuples». Cela Saïd Sadi le comprend comme «une révision fondamentale de leurs stratégies», et que le choix des USA et de l’UE d’accompagner les peuples en lutte se veut «d’éviter que les chutes des régimes despotiques ne soient remplacées par des dictatures théocratiques ».
S. A. I.