Saïd Sadi à l’occasion d’une conférence à l’Université de Tizi Ouzou: “L’État n’est plus en mesure de réparer ses dégâts”

Saïd Sadi à l’occasion d’une conférence à l’Université de Tizi Ouzou: “L’État n’est plus en mesure de réparer ses dégâts”

“Le pouvoir est aujourd’hui dans l’impasse et il peut encore tenter de faire dans la provocation en Kabylie”, a prévenu Saïd Sadi.

Intervenant au cours d’une conférence-débat qu’il a animée, hier, conjointement avec Arab Aknine et Saïd Doumane, à l’invitation du comité des étudiants d’Oued Aïssi dans le cadre de la célébration du 37e anniversaire du Printemps berbère, Saïd Sadi n’a pas raté l’occasion de commenter, bien que laconiquement, la gouvernance actuelle du pays par le pouvoir en place.

“L’État est défaillant, il n’est même plus en mesure de réparer ses dégâts. Nous avons devant nous un pouvoir prédateur”, a jugé l’ex-leader du RCD en mettant un accent particulier sur l’utilisation de l’islamisme et l’aliénation culturelle comme instrument de domination.

Dans ce sillage, Saïd Sadi a expliqué que l’islamisme n’a jamais eu de racines en Afrique du Nord, mais qu’il a été introduit en premier lieu en Algérie où il a servi la stratégie du pouvoir qui en a fait un monstre sans savoir qu’il allait devenir une menace pour lui.

Mais le comble, a-t-il ajouté, est que l’on continue à l’utiliser même dans la justice comme le montre le cas du journaliste militant, Idir Tazerout, qui vient d’être lourdement condamné pour avoir résisté à un groupe d’islamistes dans son village. “Les tenants du pouvoir ont également peur de la compétence et de la réussite des enfants du peuple et c’est pour cela qu’ils ont arabisé et islamisé l’école et l’université du peuple tout en formant leurs enfants ailleurs : ils ont pris le pouvoir par la force et demain leurs enfants leur succéderont par la compétence”, a-t-il analysé.

Pis encore, a prévenu le Dr Sadi, “le pouvoir est aujourd’hui dans l’impasse et il peut encore tenter de faire dans la provocation en Kabylie”. Mais comme à son habitude, l’ancienne figure d’Avril 1980 n’a pas dressé son constat sans développer quelques orientations à suivre si l’on veut éviter de tomber dans le piège du pouvoir sur lequel il ne faut d’ailleurs plus compter.

“Pour que l’espoir puisse revenir dans ce pays, il faut commencer par protéger et renforcer les espaces démocratiques encore existants, et si on veut préserver l’espérance démocratique en Algérie, il faudrait protéger la Kabylie parce que si cette région est protégée, l’espoir démocratique peut se greffer ailleurs”, a préconisé Saïd Sadi, estimant que la dynamique de restauration citoyenne passe par la renaissance de la citoyenneté et que dans cette démarche, il faut absolument, dit-il, que la communauté universitaire soit recréée en renforçant les passerelles entre toutes ses composantes.

“Il ne faut pas seulement redonner à l’université son niveau de performance par la formation, mais également devoir faire revenir le débat à l’université pour en faire la matrice qui doit irriguer la cité kabyle et aussi pour faire barrage avec sagesse au piège de la violence, de l’intox, de la division et de la culture des slogans que veut le pouvoir”, a conseillé Saïd Sadi, avant de rappeler que “c’est là même l’esprit et le message d’Avril 1980”.

Pour sa part, Saïd Doumane, un des animateurs d’Avril 80, a souligné que “le combat amazigh est loin d’être terminé comme le fait croire le pouvoir avec la pseudo-officialisation de la langue amazighe”. “Nous sommes au milieu du gué et c’est maintenant que le combat est plus difficile”, a-t-il expliqué, alors qu’Arab Aknine a tenu à prévenir sur le danger de la disparition de tamazight si elle ne venait pas à être prise en charge. “Et ce n’est pas du pouvoir qu’il faut attendre sa prise en charge, mais à nous de nous retrousser nos manches”, a-t-il appelé de ses vœux.