La majorité parlementaire s’apprête à élire aujourd’hui un nouveau président de l’APN. Saïd Bouhadja, qui demeure convaincu qu’il reste “le président légal et légitime de l’Assemblée”, affirme, dans cet entretien, que cette affaire “ne sera pas sans conséquence”.
Liberté : Le FLN a proposé un candidat à votre succession à la tête de l’APN. Le RND le soutient. Quel commentaire en faites-vous ?
Saïd Bouhadja : Ma position est claire. Toutes les décisions émanant du bureau de l’Assemblée sont illégales. La séance plénière de demain mercredi est illégale et donc le nouveau président forcément illégitime. Et quoi qu’il arrive, ils n’auront pas ma démission. Je reste et je demeure le président légal et légitime de l’APN. Parce qu’il s’agit là de la politique du fait accompli dans l’État de droit. Leur démarche prouve leur incapacité à régler un problème avec le président d’une Assemblée élue. Leur recours d’ailleurs à la “baltaguia” pour un objectif illégal démontre clairement qu’ils sont en panne de solutions.
Vous avez déjà eu à déclarer que ce conflit dépasse la personne de Saïd Bouhadja. Selon vous, quel est le véritable enjeu ?

Je ne sais pas quels sont leurs objectifs, mais je crois que la question dépasse la personne de Saïd Bouhadja et l’Assemblée. Comme ils ont déclaré l’incapacité et la vacance du poste de président de l’APN, alors que je suis présent et en bonne santé, je suis en droit de penser qu’ils ont d’autres visées.
Lesquelles ? Pouvez-vous être plus précis ?
Je préfère m’astreindre à cela.
Certains vous reprochent de ne pas avoir agi. Vous auriez pu déposer plainte ou alors réquisitionner la police lorsqu’il a été procédé au verrouillage de l’accès à l’APN, mais aussi à votre bureau…
D’expérience, il est établi que le recours à la justice ne mène à aucun résultat. Tout comme je ne peux pas réquisitionner la police alors que même ma garde rapprochée m’a été retirée. Il faut comprendre que des décisions graves ont été prises alors que j’étais encore dans mon bureau.
Que comptez-vous faire maintenant ?
J’ai un enregistrement dans lequel ces mêmes membres du bureau de l’Assemblée, qui ont déclaré l’incapacité et la vacance du poste de président, font l’éloge de ma personne. Et il s’agit d’un enregistrement officiel, puisque mes réunions avec le bureau de l’Assemblée sont enregistrées. Dans cet enregistrement donc, que je rendrai public le moment venu, ils reconnaissent les réalisations que j’ai accomplies et louent ma façon de diriger les séances plénières. Ils reconnaissent le fait que c’est la première fois dans l’histoire de l’Assemblée que 19 projets de loi ont été votés en l’espace d’une année. Aussi, que j’ai pu faire apaiser les esprits à l’Assemblée, et faire régner une atmosphère de débat paisible.
Y a-t-il d’autres actions plus concrètes ?
Il y a une mobilisation des troupes en ce moment. La famille révolutionnaire, dans son ensemble, est de mon côté. De larges pans de la société civile, aussi. Ce qu’ils ont fait est immoral et incivique, et il faut savoir que les Algériens ont atteint un degré de maturité qui leur permet de faire la distinction entre les bonnes et les mauvaises intentions. Et ils ne vont pas se taire. Je ne pense pas qu’une telle démarche illégale restera sans conséquence.
Vous avez écrit à Abdelaziz Bouteflika, tout comme vous avez déclaré que la présidence de la République était du côté de la légalité. Pourquoi n’y a-t-il aucune réaction ?
J’ai écrit au président de la République, et je ne suis pas pressé. Nous avons le souffle long. Parce qu’une entité d’un parti politique ne peut pas s’exprimer à la place du président du même parti, qui est le président de la République. Cette affaire ira très loin, et la guerre durera longtemps. Nous n’avons pas l’intention de nous arrêter là. Cette affaire intéresse en premier lieu le président Abdelaziz Bouteflika parce qu’il s’agit, dans ce cas de figure, de porter atteinte aux acquis et aux réalisations qui ont été accomplis pendant son règne. Et je parle là de la consécration de l’État de droit, de la séparation des pouvoirs et du respect des institutions de la République.
Entretien réalisé par : Mehdi mehenni