Ce qu’on appelle encore le phénomène de « mouvements de redressement » minant les partis politiques a, tout compte fait, ouvert la voie à une situation inédite. C’est, en effet, la première fois depuis 1995 que l’on s’achemine vers une construction politique où il n’existe pas de bloc politique central, mais un émiettement des forces politiques dont on ne sait encore la position vis-à-vis d’une question aussi capitale pour le pays.
Par bloc politique central, on entend la coalition qui se place avec force au centre de l’échiquier politique afin de permettre au chef de l’Etat de gérer les différents antagonismes et clivages et, dans le même sillage, disposer d’un relais politique, aussi bien au sein de la société que dans les institutions, notamment les assemblées élues nationales ou locales.
Lors du mandat de Liamine Zeroual, ce bloc était constitué du RND, FLN et MSP, avec cet ordre d’importance en termes de sièges dans les assemblées, même si cette coalition ne devait s’affirmer en tant que telle qu’à l’issue des législatives de 1997.
Toujours en 1995, et avant son élection, Liamine Zeroual bénéficiait déjà du soutien d’une noria de partis politiques et d’associations réunies autour de lui depuis la CDN (conférence du dialogue national de 1994). Ce qui n’était qu’une coalition allait ensuite se transformer en Alliance présidentielle autour du candidat Abdelaziz Bouteflika, pour sa première élection, puis pour celles qui suivirent.
En 1999, on avait assisté, en effet, à des « mouvements de redressement », ceux dans la foulée du « coup d’Etat scientifique » du FLN, dont le plus spectaculaire a vu la direction du RND tomber entre les mains d’Ahmed Ouyahia au détriment de Tahar Benbaïbèche, premier secrétaire général lequel vient à peine, d’ailleurs, de signer son come-back politique, à l’occasion de la vague d’agréments de nouveaux partis. Fracture qui n’est toujours pas replâtrée et dans laquelle, finalement, Abdelaziz Belkhadem n’aura joué qu’un rôle d’intérimaire, de pompier ou de tout ce qui se rapproche, en fait, du rôle de sauveur dans une situation, disons désespérée.
Rien de tel aujourd’hui. Alors qu’une année seulement nous sépare de la présidentielle, ni le FLN ni le RND ne semblent en mesure de surmonter rapidement leurs divisions internes.
Le FLN peine à remplacer Belkhadem alors que tous ses opposants semblaient d’accord pour le chasser de son poste. Au RND, on ne comprend toujours pas pourquoi Bensalah n’arrive pas à s’entendre avec les anti-Ouyahia, et ce, malgré le départ de ce dernier. Il y a, ici, un non-dit de taille autour des objectifs des « redresseurs », au FLN comme au RND, dont la mission aurait dû être terminée par le simple fait d’avoir obtenu le départ de ces deux dirigeants accusés de vouloir succéder à Abdelaziz Bouteflika.
On ne sait encore combien cette confusion pourrait encore tenir en haleine journalistes et observateurs, mais on constate déjà que ces deux partis politiques, majoritaires à l’APN, au sénat et dans les assemblées locales, sont paralysés et incapables de décider de quoi que ce soit, ni même de sortir avec une position commune sur les questions de l’heure.
Mahdi Maloufi