Rio de Janeiro,Quand la milice fait la loi

Rio de Janeiro,Quand la milice fait la loi

José Padilha, réalisateur du film « Tropa de Elite 2 », sorti en 2010, avait dénoncé avec brio le pouvoir de nuisance des milices de l’Etat de Rio. Le cinéaste s’est attaché à montrer de manière quasi documentaire comment ces organisations criminelles, essentiellement composées de policiers, avaient réussi à infiltrer tous les leviers de pouvoir.

Il arrive que des faits divers dépassent la fiction, cette fois, ils auraient pu l’inspirer. Un reportage de « RJ-TV » du réseau Globo, diffusé mardi 13 mars, a détaillé les agissements du groupe criminel « Nous sommes la famille », l’une des milices les plus violentes de l’Etat de Rio de Janeiro.



Cette milice de la municipalité de Duque de Caxias (une ville de 800 mille habitants située à environ 15 km de Rio), continue de terroriser la population en dépit de l’arrestation de ses chefs, les élus municipaux Jonas Gonçalves da Silva, dit «Jonas le nôtre», et Sebastiao Ferreira da Silva, dit «Chiquinho le Grand».

Le gang composé de policiers militaires, d’ex-policiers et de politiciens locaux exploitait les machines à sous, la vente des bouteilles de gaz, les connexions clandestines au câble et à internet (système appelé «gatonet), le transport alternatif et faisait payer des taxes aux commerçants en échange d’une protection.

Les miliciens s’adonnaient aussi au trafic d’armes et de stupéfiants. Les trafiquants de drogue qui souhaitaient agir dans la région devaient s’acquitter d’un droit.

La cupidité n’ayant pas de limites, la milice avait aussi l’intention de diversifier ses activités en contrôlant le cimetière de la municipalité. Les enquêteurs ont découvert qu’une société avait été crée par les malfaiteurs pour infiltrer l’administration du cimetière. Le but étant de capter le budget mensuel de la mairie.

Selon la police, les miliciens imposaient leur loi en pratiquant des assassinats collectifs, des tortures, des mutilations, des destructions et des dissimulations de cadavres. Les leaders communautaires qui avaient le courage de s’opposer aux exactions de cette organisation étaient assassinés ou, pour les plus chanceux, expulsés.

Les habitants de la région subissent encore aujourd’hui le diktat de la milice dans les 15 quartiers qu’ils contrôlent. Les personnes qui veulent faire leur course doivent acheter chez les commerçants qui sont indiqués par les bandits, en dépit des prix prohibitifs.

La population vit avec la peur au ventre. Les vingt-cinq membres de la milice, qui avaient déjà fait l’objet de poursuites lors de l’opération « Cape noire » initiée à la fin de l’année 2010, ont été remis en liberté en novembre 2011. Le procureur de justice, Décio Alonso a indiqué au journal O Globo que sur les douze personnes qui ont témoigné contre les criminels, dix ont été assassinées.

De notre correspondant au Brésil : Mehdi CHERIET