Ribéry : «Le nul de l’Algérie face à l’Angleterre a valeur de victoire»

Ribéry :  «Le nul de l’Algérie face à  l’Angleterre a valeur de victoire»

Le Bayern Munich est arrivé à Doha, capitale du Qatar, afin d’y effectuer un stage hivernal d’une semaine qui sera conclu par un match amical face à Al Ahly d’Egypte. La délégation du club allemand comptait dans ses rangs Franck «Bilal» Ribéry, le Français musulman qui a épousé une Algérienne et qui a donné des prénoms algériens à tous ses enfants. Nous l’avons approché pour une interview qui, ayant su notre nationalité, il n’a pas hésité à répondre favorablement à notre sollicitation. Le voilà donc qui évoque différents sujets liés à son club et au football algérien.

Tout d’abord, un mot sur le choix du Bayern Munich de faire son stage hivernal au Qatar plutôt que dans un autre pays ?

Comme vous le savez, nous sommes ici à Doha pour un stage hivernal d’une semaine ponctué par un match amical contre le Ahly du Caire samedi prochain. Je pense que le choix du Qatar est motivé par la bonne impression laissée par les installations de ce pays à la direction du Bayern puisque l’équipe s’était déjà préparée à l’académie Aspire qui répond aux attentes de toute équipe européenne en matière de préparation. L’Europe est frappée en cette période par une vague de froid et de neige, ce qui ne convient pas pour une préparation optimale en prévision de la reprise des championnats. Nous nous attellerons à profiter du climat doux qui sévit en ce moment au Qatar et des formidables installations de l’académie Aspire afin de bien nous préparer pour la Bundesliga et la Ligue des champions.

Doit-on comprendre que le Bayern Munich table beaucoup sur la seconde partie du championnat ?

Il faut dire que le Bayern ne pouvait pas jouer les matches de la phase aller avec la même régularité, puisqu’il nous est arrivés de jouer chaque trois ou quatre jours. Cela a engendré des blessures et des pépins musculaires. La préparation que nous faisons est destinée justement à combler nos lacunes physiques et à remettre tous les joueurs à niveau afin de repartir sur de bonnes bases.

Quelles sont vos ambitions pour le reste de la saison ?

Je pense que la compétition sera rude entre les équipes de tête de la Bundesliga, mais je reste confiant quant à la capacité du Bayern à conserver la tête du classement jusqu’au bout et à remporter le titre. C’est pour ça que nous nous devons d’être bien préparés sur tous les plans : physique, technique et mental.

Vous avez terminé la phase aller en comptant trois points d’avance sur le champion sortant, le Borussia Dortmund. Ne craignez-vous pas d’être coiffés au poteau à la fin du championnat ?

Je ne le pense pas. En tout cas, nous ne craignons aucune équipe. Cela dit, il faut se montrer prudents et rigoureux jusqu’au bout. Les supporters du Bayern verraient très mal ceux du Borussia Dortmund fêter le titre. Ainsi est la rivalité entre les deux clubs. Le public du Bayern veut qu’on soit toujours les champions. L’année dernière, nous comptions 14 points de retard sur Dormund, mais nous en avons 3 d’avance cette année.

Avez-vous des ambitions personnelles en cette nouvelle année 2012 ?

Evidemment. Avant toute chose, mon souhait est de voir ma famille en bonne santé. Je souhaite aussi être épargné par les blessures. Sur le plan sportif, j’espère remporter le triplé avec le Bayern : championnat, Coupe d’Allemagne et Ligue des champions. Cette dernière compétition nous tient particulièrement à cœur parce que la finale se déroulera sur notre terrain, l’Allianz Arena.

Tous ces objectifs n’engendrent-ils pas de la pression sur vous de la part des supporters ?

Il faut accepter la pression. Les supporters du Bayern sont exigeants. Je me fais toujours un devoir, ainsi que mes coéquipiers, de donner le meilleur de nous-mêmes afin d’être dignes de ce club. Je dis toujours : «Nous sommes dans un club de champions, nous devons être tout le temps champions.» Nous sommes tenus de viser les titres chaque saison. Malheureusement, nous n’avons pu gagner aucun titre la saison passée, mais nous nous devons de nous rattraper.

Pensez-vous que le Bayern pourra jouer sur les trois fronts ?

Nous avons de grandes chances de remporter les trois titres. Certes, la Coupe d’Allemagne, dans notre échelle des priorités, est le titre qui a la moindre importance pour nous, mais chacun de nous veut être présent le 12 mai 2012 sur le terrain du stade de Berlin pour la finale. D’abord, c’est la compétition qui est la plus facilement accessible, puisque quatre matches seulement nous séparent de la finale, dont les demi-finales face à Stuttgart. Ensuite, nos supporters rêvent de faire le déplacement de Munich jusqu’à Berlin, la capitale fédérale, afin d’assister à la finale. Ce serait vraiment un cadeau formidable pour notre public.

Qu’en est-il de la Ligue des champions ?

Tous nos supporters croient en la finale qui aura lieu le 19 mai à Munich. Ce serait très spécial de jouer sur notre terrain pour le titre de meilleur club d’Europe. Chacun de nous rêve que cela arrive. Le rêve n’est pas irréalisable. Il suffit juste  d’être rigoureux et performants et d’y croire.

Tous vos coéquipiers et les supporters y croient. Y croyez-vous, vous aussi ?

J’ai l’intuition que nous sommes plus que jamais proches d’arriver à la finale de la Ligue des champions. Nous avons su nous qualifier pour les huitièmes de finale en nous extirpant d’un groupe très relevé où il y avait Manchester City, Naples et Villarreal. Donc, je suis confiant.

Pouvez-vous nous dire un mot sur le football algérien ?

D’abord, je réitère mon bonheur d’avoir visité ce pays qui m’est très cher et dont j’ai apprécié l’hospitalité des gens et la beauté des paysages. J’y avais passé 10 jours durant lesquels j’avais été accueilli partout à bras ouverts et cela restera l’un des plus beaux séjours de vacances de ma vie. Pour ce qui est du football algérien, j’essaye de suivre son actualité du mieux que je peux. Le monde entier reconnaît que l’Algérie constitue une mine intarissable de talents, à la tête desquels l’artiste Madjer à la talonnade historique et au parcours remarquable avec le FC Porto, ainsi que Belloumi que je considère comme un vrai magicien du ballon. D’ailleurs, je n’ai toujours pas compris comment un joueur de ce talent n’a pas embrassé de carrière professionnelle à l’étranger. Je n’oublierai pas de citer la sélection d’Algérie de 1982 à la participation marquante au Mondial d’Espagne avec sa victoire contre la RFA.

Quelle est votre appréciation sur la participation de l’Algérie au Mondial-2010 en Afrique du Sud ?

Au vu des résultats obtenus et même si l’Algérie n’a pas pu se qualifier pour le deuxième tour, je pense que sa participation a été honorable. Tout le monde s’attendait à ce qu’elle soit écrasée par l’Angleterre et même par les Etats-Unis, mais sa prestation est allée à l’encontre de tous les pronostics, surtout face aux Anglais avec toutes leurs stars. Pour moi, le nul obtenu dans ce match a valeur de victoire. Face aux Américains, la chance n’a pas été du côté algérien qui a perdu dans les derniers instants du match. Vraiment, j’apprécie de voir la sélection algérienne disputer de grands tournois, tels la Coupe du monde et la Coupe d’Afrique des nations.

Un commentaire sur le limogeage de Rabah Saâdane, l’entraîneur qui avait mené l’Algérie au Mondial ?

Je n’avais pas cru à l’information surtout qu’il s’agit d’un homme qui avait travaillé avec cœur et sincérité. A ma connaissance, il n’a pas fauté. C’était déjà méritoire pour lui d’avoir pris la sélection dans des conditions difficiles et d’avoir pu, malgré cela, arriver en demi-finale de la Coupe d’Afrique des nations et aller en Coupe du monde qui ne figurait pas dans les objectifs qui lui avaient été assignés. Comment limoger un entraîneur qui a eu tant de succès et qui a permis à la sélection de faire un saut qualitatif ? C’est aussi aberrant qu’incroyable.

Donc, vous étiez partisan de laisser Saâdane continuer ?

Oui. Avec tout mon respect pour la Fédération algérienne de football, j’aurais aimé qu’il poursuive sa mission.

Que pensez-vous de la nomination de Vahid Halilhodzic comme sélectionneur ?

Vahid est un grand entraîneur à la carte de visite étoffée, que ce soit avec les clubs qu’avec les sélections. Je pense que la décision de le nommer a été pertinente. Cependant, les grands entraîneurs ne réussissent pas forcément partout. Cela dépend surtout des conditions et de l’environnement dans lesquels ils évoluent. Cela dit, je lui souhaite pleine réussite, ainsi qu’au football algérien.

Vous dites que vous suivez le football algérien. Que pensez-vous des joueurs composant la sélection nationale ?

La sélection renferme de bons joueurs dont la majorité ont participé à la Coupe du monde. Il y a Madjid Bougherra qui jouait chez les Glasgow Rangers, Karim Ziani qui a évolué à Wolfsburg et dont le style de jeu me plaît beaucoup, ainsi que Nadir Belhadj, Matmour, Boudebouz, Anthar Yahia et bien d’autres dont je ne me rappelle pas les noms.

Que pensez-vous de la décision de certains parmi eux d’émigrer vers les pays du Golfe, plus spécialement au Qatar ?

C’est quelque chose d’on ne peut plus normal. De très grands joueurs ont joué au Qatar. Il faut respecter leur choix. Personnellement, je ne possède pas beaucoup d’informations sur le football qatari, mais j’ai entendu plein de belles choses à son propos. Mamadou Niang, qui joue aux côtés de Nadir Belhadj (à Al Sadd, ndlr), et le Brésilien Zé Roberto m’ont beaucoup parlé du football qatari.

Pourra-t-on voir un jour Ribéry jouer pour un club du Qatar ?

Je ne peux pas répondre à cette question à l’heure actuelle. Seul Allah Sait ce qui va se passer. Cela dit, tout reste possible en football.

Dernière question : nous avons entendu dire que vous avez ouvert un bar islamique. Pouvez-vous nous en expliquer le concept ?

J’ai effectivement ouvert un bar il y a quelques jours. Je voulais offrir un nouveau concept d’une pratique traditionnelle. Dans ce bar, ne sont servis que les boissons gazeuses, les jus et la chicha avec ses différents arômes. Je suis musulman, je ne pourrai pas faire quelque chose qui déplaise à Allah.