Révision des listes électorales: Une journée dans une APC

Révision des listes électorales: Une journée dans une APC

Cette journée dans les bureaux d’inscriptions aux listes électorales est certes mitigée du point de vue de l’influence, mais elle montre un certain engouement pour la joute électorale du 27 novembre prochain. Enfin, mieux en tout cas que les législatives du mois de mai dernier…

«Les élections locales arrivent à grands pas. C’est l’occasion d’apporter un vrai changement dans notre chère ville. Chaque voix compte, c’est pour cela qu’on lance un appel à tous les citoyens, quelles que soient leurs orientations politiques, qui ne sont pas inscrits dans les listes électorales, de se rendre avant le 13 septembre à l’APC pour le faire.» Ce message est un SMS que reçoivent ces derniers jours les habitants de la ville de Rouiba (banlieue est d’Alger).



En effet, la société civile de cette riche commune de la capitale a décidé de prendre le taureau par les cornes pour sensibiliser les habitants, particulièrement les jeunes, sur l’importance de leur devoir électoral. Ainsi, les services concernés ont submergé les téléphones, boîtes mail et boîtes aux lettres des Rouibéens par ces appels citoyens. Nous avons alors décidé de faire un tour au niveau du bureau d’inscription électorale de Rouiba pour voir si ces messages de sensibilisation avaient eu un impact. On arrive aux environs de 9h du matin en cette belle journée de septembre. On demande à l’agent d’accueil de nous diriger vers ce fameux bureau d’inscription.

Et comme il fallait s’y attendre, il était complètement désert. On se croirait au Texas, dans un film western, avec les bruits des mouches qui tournaillent, dans ce siège qui, au fait, se trouve être l’ancienne salle de sport de la ville. On reste dans le bureau en face des fonctionnaires qui racontent leurs aventures de l’Aïd, avant qu’un quart d’heure plus tard, un jeune d’une trentaine d’années n’arrive.

La proximité et les amis

Il s’appelle Nabil et travaille dans une entreprise privée. Il n’a jamais voté de sa vie. «D’ailleurs la politique en Algérie ne m’intéresse guère. Je n’avais jamais pensé qu’un jour j’allais voter mais comme un ami se présente dans la liste électorale, il m’a convaincu de m’inscrire pour l’aider à gagner ces élections», raconte-t-il en avouant qu’il ne savait même pas qu’une élection était prévue en novembre si son ami ne le lui avait pas dit. «La politique ne me branche pas du tout. Quand il est venu me parler, j’ai répondu: «’Machi ».

on a voté au mois de mai? Il a dû m’expliquer la différence entre les locales et les législatives», poursuit-il, fier de comprendre mieux la politique, mais surtout fier de voir son ami du même âge, tenter l’aventure électorale pour changer les choses. Au moment où l’on a terminé de discuter avec Nabil, on voit un groupe de jeunes se diriger vers nous en nous apostrophant: «Il se trouve où le bureau d’inscription aux élections?». Il ne nous en fallait pas plus pour interroger ces jeunes, la vingtaine à peine entamée, sur ce qui les a poussés à venir s’inscrire, qui plus est en groupe. Ont-ils été sensibles à l’appel de la société civile? «’Lala » (non) c’est un ‘wlid houma » (un gars du quartier) qui nous a dit de s’inscrire pour voter.

Il est candidat, on va faire campagne pour lui, il nous a promis que s’il devenait maire il nous trouvera du travail à l’APC», raconte l’un d’eux en soulignant qu’il ne comprenait rien aux élections. «El Mouhim andiroulou el houle ou anvotiwe aâlihe (le plus important c’est de lui faire de l’ambiance et voter pour lui», assurent-ils tout sourire. On décide de les suivre jusqu’au guichet pour voir comment l’opération se déroule.

Une opération qui prend cinq minutes

La préposée leur demande leurs extraits de naissance, leurs certificats de résidence ainsi que la photocopie de la carte d’identité. Elle vérifie soigneusement si tout était conforme, avant de les inviter à revenir dans quelques jours pour récupérer leurs cartes de vote. Néanmoins, l’un de ces jeunes l’interpelle et lui demande leurs numéros d’inscription dans la liste électorale. Plus tard, il nous explique que c’est pour remplir le formulaire de parrainage pour la candidature de leur ami. «Il lui faut 1100 signatures, ‘rana ndjamaâoulou fihoum » (on est en train de les collecter)», font-ils savoir avant de quitter le siège de l’APC, tout heureux d’avoir obtenu cette fameuse inscription qu’ils espèrent leur ouvrira les portes du monde du travail. On en profite pour interroger les agents de l’APC sur cette opération de révision électorale, sans se présenter comme journaliste afin d’éviter la fameuse langue de bois.

On nous répond que contrairement aux élections législatives, il y a plus de monde qui est venu s’inscrire. Ils justifient cela du fait que la proximité qui caractérise les élections locales font que les citoyens se sentent plus concernés. «En plus dans notre commune, il y a cette année beaucoup de listes. Beaucoup de candidats qui n’ont jamais fait de politique sont tentés par l’aventure, ils ont donc sensibilisé leurs proches pour s’inscrire», assure un fonctionnaire de l’APC qui soutient que l’opération de sensibilisation a, elle, joué un rôle mais qu’ils estiment minime. Si à Rouiba, l’engouement est palpable ce n’est pas le cas de beaucoup d’APC de la capitale, dont les responsables des bureaux d’inscription nous avouent se tourner les pouces.

Comme c’est le cas d’une APC de l’ouest d’Alger où l’on a passé plus de deux heures à poireauter pour enfin ne rencontrer que Khaled, un jeune étudiant qui s’est inscrit de peur que sans la carte de vote «on ne l’arrête pour l’embarquer pour le service militaire…». Cette journée dans les bureaux d’inscriptions aux listes électorales est certes mitigée du point de vue de l’influence, mais elle montre un certain engouement pour la joute électorale du 27 novembre prochain. Enfin, mieux en tout cas que les législatives du mois de mai dernier…