Révision de la Constitution : quel mandat pour les députés ?

Révision de la Constitution : quel mandat pour les députés ?

La future Assemblée nationale, issue des législatives du 10 mai prochain, revêt un cachet éminemment politique et stratégique pour le pouvoir mais aussi pour la classe politique.

Ce scrutin à plusieurs enjeux constitue une étape décisive pour la suite du processus des réformes politiques initiées depuis avril dernier. C’est ce qui explique les opérations de charme lancées par le gouvernement en direction du peuple pour l’amener à s’impliquer pleinement à travers un vote franc et massif. La future Chambre basse du Parlement ressemblera à coup sûr à une constituante qui ne dit pas son nom.

Revendication mise en avant par plusieurs partis, à l’image de ce qui a été fait en Tunisie, le pouvoir avait rejeté cette demande préférant respecter le calendrier institutionnel. Toutefois et au regard du nombre de partis qui vont participer au scrutin, tout porte à croire que tous les courants qui activent sur la scène politique nationale seront représentés au sein de cette Assemblée pour permettre une diversité d’avis et d’opinions.

L’Algérie aura droit à une Assemblée mosaïque au lendemain du scrutin du 10 mai au cours de laquelle aucun courant ne risque de décrocher la majorité absolue avec le système de la proportionnelle. On assistera aux jeux d’alliance pendant toute la législature. Les partis seront dans l’obligation de négocier et contracter des alliances pour constituer une majorité notamment dans la formation du gouvernement et le vote des lois surtout les plus importantes qui demandent une majorité absolue.

La future Chambre du Parlement constitue la première pierre du nouvel édifice institutionnel que le régime veut mettre en place pour assurer le parachèvement du processus de réformes et la refondation de l’État. Les futurs députés auront la lourde tâche d’examiner, débattre et adopter la mouture de la future Constitution qui sera soumise par le chef de l’État dans le sillage des réformes politiques amorcées en avril dernier, comme conséquence logique des retombées du Printemps arabe.

Les parlementaires auront la responsabilité de dessiner les contours du cadre constitutionnel et institutionnel pour les futures années. C’est d’ailleurs ce que le chef de l’État à rappeler dans son message adressé dimanche dernier au SG de l’UGTA. “C’est sur ces bases largement démocratisées que nous appelons les Algériennes et les Algériens à élire avec sérieux et responsabilité leurs députés en mai prochain, pour doter le pays d’une nouvelle Assemblée nationale digne de la confiance du peuple, qui sera mandatée pour participer, au nom de la nation, à la révision constitutionnelle. Cet immense chantier politique et institutionnel est l’opportunité pour les jeunes de s’approprier la tâche d’insérer notre pays plus profondément, dans la paix et la sérénité, dans la voie de la modernisation en consolidant l’État et en fortifiant la nation en phase avec les rythmes de la mondialisation. C’est une tâche exaltante qui attend chacun. Nous y voyons bien aujourd’hui, l’unité de la trajectoire historique de notre pays”. Il est, également, attendu à ce que le président de la République s’exprime de nouveau sur les enjeux de l’échéance du 10 mai dans son discours qu’il prononcera ce week-end à Oran lors des festivités commémorative du 24 Février. Il s’agit d’une feuille de route qui clarifie les missions et le rôle assigné à la future législature. Dès sons installation, la Chambre basse du Parlement sera destinataire, en été prochain, d’un projet de mouture de la Constitution qui sera soumis par le premier magistrat du pays. Les futurs députés auront à examiner, modifier et enrichir le texte constitutionnel.

Les parlementaires auront à dessiner la nouvelle configuration constitutionnelle du pays pour les prochaines années. Le projet enrichi et modifié sera ensuite soumis aux débats à la Chambre haute (le Sénat) pour adoption. Une fois le texte adopté par les deux Chambres et validé par le Conseil constitutionnel, le président de la République aura à décider de soumettre le projet à un référendum populaire ou juste le faire adopter par les deux Chambres du Parlement réunies en congrès. Les textes organiques récemment votés par les deux Chambres du Parlement pourraient également connaître d’importantes modifications sinon un lifting pour les mettre en conformité avec la nouvelle loi fondamentale du pays. Tels sont les enjeux qui expliquent le forcing du gouvernement qui cherche à crédibiliser les élections et à donner l’image d’un pays où la démocratie est en marche. Le futur scrutin constitue un test politique sérieux que le pouvoir veut réussir. Aussi, les législatives de mai prochain revêtent un cachet particulier en raison des enjeux politiques et stratégiques qui les caractérisent sans oublier leurs incidences directes sur l’autre échéance qui se profile à savoir la présidentielle de 2014. Parmi les résultats attendus du rendez-vous de mai prochain, la recomposition de la carte politique et la structuration de grands pôles par famille politique comme cela se fait sous d’autres cieux.

La future Assemblée nationale pourrait constituer le premier terrain de décantation politique attendu depuis longtemps. Tout cela est conditionné par la réussite du futur scrutin et sa crédibilité, enjeu qui fait débat et polémique actuellement au sein de la classe politique. Bien avant l’entrée en lice de nouveaux partis, une guerre de positions est déjà engagée entre ceux qui siègent au sein de l’actuelle Assemblée. Les acteurs politiques montent au créneau et multiplient des déclarations, certains pour exprimer des appréhensions sur la régularité du scrutin, d’autres pour brouiller les cartes et semer le doute au sein de la population qui n’a pas encore donné son avis. Tous les coups sont permis, ce qui présage d’une bataille féroce sur le contrôle de la future Chambre basse.

M a o