Christopher Ross en visite dans un centre de réfugiés sahraouis
Le Front Polisario a, de son côté, appelé hier la France qui demeure un soutien inconditionnel du trône marocain à reconnaître le droit des Sahraouis à l’existence et à l’autodétermination.
Le gouvernement marocain s’est-il fourvoyé en décidant de retirer sa confiance de manière unilatérale à l’envoyé spécial de l’ONU pour le Sahara occidental? Cette manière de procéder est loin de faire l’unanimité comme veulent le sous-entendre la classe politique ou certains médias de notre voisin de l’Ouest. «Cette décision va enliser davantage le conflit dans l’immobilisme et aura un impact direct sur le processus de négociation (avec le Front Polisario, Ndlr), déjà plombé par les échecs répétés», a estimé Abdelfettah El Belamachi, directeur du Centre de la diplomatie parallèle et du dialogue des civilisations, à Rabat, cité dans une dépêche de l’AFP datée du 26 mai. Comment aurait dû procéder la diplomatie marocaine pour manifester sa désapprobation au sujet du rapport transmis par le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies qui a épinglé le Maroc sur la question des Droits de l’homme? «Le gouvernement marocain aurait pu protester officiellement au lieu de prendre cette décision, car c’est le secrétaire général de l’ONU qui décide du retrait ou du maintien de confiance à M.Ross», a ajouté l’expert. Le représentant personnel de Ban Ki moon pour le Sahara occidental serait soupçonné par Rabat de vouloir jouer la carte sahraouie. Une hypothèse soutenue par un autre spécialiste marocain. «Je crois que M.Ross voulait jouer la carte du référendum et le Maroc rejette cette option», a affirmé Mustapha Naïmi, de l’Institut universitaire de la recherche scientifique à Rabat dans une déclaration à l’agence France Presse. «Par cette décision, le Maroc adresse un message de défiance à tous ceux qui privilégient l’option référendaire. Il veut montrer qu’il est catégorique à ce niveau. Mais en même temps, aucune solution ne se profile à l’horizon», a fait constater M.Naïmi. Voici ce que disait, il y a tout juste douze ans, ce spécialiste de la région sahraouie: «Au moment où il fallait entamer un processus régional en vue de déboucher sur une autonomie locale, on a préféré gagner du temps. Il ne reste actuellement qu’un seul prix à payer pour prouver que le principe d’autodétermination ne passe pas obligatoirement par le référendum, c’est l’autodétermination.» (Extrait d’un entretien accordé pour, Le Matin du Sahara, le 26 juin 2005). C’est sans doute pour rattraper le temps perdu que le royaume chérifien a décidé de récuser Christopher Ross et de ne discuter qu’autour de sa proposition de projet d’autonomie. Ce que rejette catégoriquement le Front Polisario qui a appelé le nouveau président français, François Hollande, dont le pays demeure un soutien inconditionnel du trône marocain à promouvoir «le droit à l’existence et à la justice au Sahara occidental». Paris sera-t-elle à l’écoute? «Notre voeu est qu’avec l’avènement de la gauche au pouvoir, la France d’aujourd’hui fera entendre sa voix avec force pour faire prévaloir la primauté du droit, la démocratie, le respect des droits de l’homme, le droit à l’existence et la justice au Sahara Occidental»,espère le secrétaire général du Polisario, Mohamed Abdelaziz, qui s’est exprimé à travers un entretien publié, hier, par le quotidien algérien Le Soir d’Algérie. «Cela confortera inéluctablement la paix dans la région méditerranéenne et contribuera à l’édification d’un Maghreb arabe démocratique auquel aspirent l’ensemble de ses peuples, sans exclusion aucune», a souligné le président de la République arabe sahraouie démocratique (Rasd). Il faudrait pour cela que François Hollande déploie toute une panoplie d’efforts pour faire fléchir la position marocaine. Un défi pour la diplomatie française qui a désormais changé de cap…