Retour sur une année de gestion du premier ministre en l’absence du président Sellal, un homme sur tous les fronts

Retour sur une année de gestion du premier ministre en l’absence du président Sellal, un homme sur tous les fronts

Son sens de l’humour, son jargon populaire et sa rhétorique ont fini, au fil du temps, par le singulariser du reste du personnel politique.

Et depuis quelques mois, il accompagne son activité d’une certaine solennité. Sa dernière prestation devant les cadres de l’éducation nationale est à ce titre édifiante.

“Ce n’est pas avec la poésie qu’on mettra en place une politique de défense nationale”, dit-il, sur un ton ferme, dans le pur style du personnage. Abdelmalek Sellal, qui boucle une année à la tête du Premier ministère, est sans aucun doute un personnage atypique du paysage politique national. Sans attache partisane, ayant fait l’essentiel de sa carrière dans l’administration, boute-en-train aux formules à l’emporte-pièce, il a réussi en quelques mois à éclipser le président Bouteflika, malade.

Même si son poste ne le prédestinait pas particulièrement à occuper les devants de la scène, un poste assimilable à un chef de cabinet, Abdelmalek Sellal a enfilé depuis quelques mois un costume qui fait de lui aujourd’hui pratiquement le premier personnage du pays. Signe de cette nouvelle dimension : fini les blagues et les calembours dont ses admirateurs, interlocuteurs et autres qui en raffolent.

Depuis sa gestion de l’attaque spectaculaire du site gazier de Tiguentourine en janvier dernier, Abdelmalek Sellal qui a dû, pour une fois, s’initier à l’exercice fort délicat de communication devant la presse internationale, a pris du galon. En mai, quelques jours après l’hospitalisation du président Bouteflika à l’hôpital du Val-de-Grâce, il se rend à Addis-Abeba, au sommet de l’UA, où il rencontre d’illustres dirigeants : le président François Hollande, le secrétaire d’État, John Kerry, et José Manuel Barroso, président de la Commission européenne.

Des rencontres diplomatiques qui lui confèrent une stature à l’international. Lors de ses sorties à l’intérieur du pays, remises au goût du jour, il n’hésite pas à se hasarder à s’exprimer sur des dossiers jusque-là apanage exclusif du chef de l’État, comme la diplomatie ou encore la défense. “Il n’y aura pas de Printemps arabe en Algérie. Nous y travaillons et sommes sur la bonne voie”, lançait-il, il y a quelques jours à Jijel. Dans un contexte régional trouble, il rappelle la position de l’Algérie, à la manière d’un chef d’État en exercice. “Notre pays subit des pressions de toutes parts l’obligeant à jouer son rôle de puissance régionale, mais notre politique est claire et l’a toujours été ; c’est ce qui nous permet de maintenir la stabilité de notre pays”. À l’intention des jeunes du Sud, il prend une série de mesures et délivre plusieurs messages.

Il n’hésite pas à se rendre dans les wilayas qui n’ont jamais été dans les bonnes grâces de Bouteflika : Tizi Ouzou et Béjaïa. Là où il passe, il sort de sa hotte, un chéquier. Même le grincheux Hannachi, président de la JSK, qui se plaint de ce que Sonatrach prenne en charge certains clubs seulement sera gratifié de l’aide d’une entreprise publique, en l’occurrence Cosider. Du coup, nombre d’observateurs s’interrogent si Abdelmalek Sellal n’est pas préparé pour présider aux destinées du pays.

Dans l’entourage du Premier ministre, l’on assure qu’“il n’est pas particulièrement chaud” à l’idée de postuler un jour à la magistrature suprême d’autant que lui aussi a quelques soucis de santé. Mais vu la situation politique générale du pays marquée par le statu quo, l’opacité qui entoure les intentions de l’actuel chef de l’État et l’absence d’indices pour un changement démocratique, la carte Sellal, un homme qui fait l’unanimité au sein du sérail, peut être envisagée.

K. K