Retour des algériens vers le marché auto d’occasions

Retour des algériens vers le marché auto d’occasions

De ses Aurès, le Batnéen Mustapha, la quarantaine dépassée, est venu chercher la bonne occasion.

Auparavant, il a sillonné, en vain, les deux marchés de voitures de Biskra et de Sétif avant de se rendre à Tidjelabine.

«Mon souhait est d’acquérir une Peugeot 307 ou une Golf série 4, mais les prix exigés m’ont quelque peu surpris» nous confie ce visiteur insatisfait qui venait de repérer une belle Peugeot 406 année 99 couleur bleu gauloise.

«Combien ?» demande Mustapha, d’un ton hésitant, au propriétaire du véhicule étendu sur la banquette avant.

«78 millions et demi», rétorqua une voix du fond du véhicule. «Vous en voulez..?», «Aux environs de 85 millions».

Que de discussions du genre Mustapha a entendues. Mustapha scrute déjà une autre Golf TDI.

On aurait proposé au propriétaire 85 millions de centimes mais il n’est pas près de la céder à moins de 93 millions de centimes.

«J’ai eu vent qu’à Tidjelabine on trouvait de bonnes occasions, cependant je constate que les prix sont brûlants» dira Mustapha visiblement contrarié de ne pas pouvoir réaliser son souhait.

10h. Le marché est vide. Il y a longtemps que les dernières voitures ont quitté les lieux. Des lieux qu’a investis Mustapha depuis 5 h du matin. Pourtant, il doit se résigner encore une fois à retourner bredouille.

Une Peugeot 404 à 26 millions de centimes

Pour comprendre toute l’inquiétude et l’incapacité de Mustapha à s’offrir un véhicule, il faudra méditer longtemps cette anecdote restée sur toutes les lèvres en cette matinée brumeuse.

Une Peugeot 404 vieille de 45 ans vendue à 26 millions de centimes. Du jamais vu à Tidjelabine !

Cette vieille bagnole a ravi la vedette à une Renault 9 année 86 abordée à 20 millions, une Renault 4 qui n’a accroché aucun client et tant d’autres.

Dans ce marché régi par l’offre et la demande, les potentiels acheteurs «se font de plus en plus rares» selon quelques habitués même si le marché est plein à craquer.

Des centaines de véhicules voire plus, venant des quatre coins du pays fréquentent ce marché.

Devant cette chute des ventes, tout le monde à Tidjelabine, surtout les acheteurs, reconnaît une tendance à la hausse des prix surtout à la faveur de la suppression du crédit à la consommation.

L’impact de cette restriction est vivement ressenti par les candidats à l’achat d’un véhicule d’occasion faute de pouvoir s’en offrir un flambant neuf.

La perturbation et le flou caractérisant le marché ont laissé revendeurs et acheteurs sur la défensive.

La légère augmentation des prix n’est toutefois qu’un prélude à une flambée sans précédent qui s’annonce, au grand dam des consommateurs qui projetaient d’acquérir une voiture d’occasion.

Outre la remise en cause de ce choix, quand sous d’autres cieux, on propose la prime à la casse, aucune autre formule d’aide à l’achat d’un véhicule n’est encore envisagée par les pouvoirs publics.

Toutefois, la rentrée scolaire, la période des vacances et notamment le Ramadhan, qui grèvent la maigre bourse, ont freiné quelque peu l’envolée des prix de ce type de voitures.

Les prix devront reprendre leur envolée juste après le Ramadhan, prédisent quelques usagers avertis des différents marchés de voitures sur le territoire national.

Revendeurs et propriétaires s’accusent mutuellement

Devant cette tendance à la hausse un peu hésitante, les principaux acteurs de ces marchés se rejettent la balle.

«C’est les revendeurs qui spéculent sur le marché en tentant toujours de casser les prix pour mieux monopoliser celui-ci et vendre ainsi à leur guise» disent les acheteurs.

«On y gagne très peu dans nos modestes transactions. Nos marges bénéficiaires sont insignifiantes. C »est plutôt le propriétaire du véhicule qui bloque le marché en maintenant toujours la barre très haut pour les prix» rétorque Ali de Bordj Menaïel, revendeur de son état.

Au- delà, de ces bulles spéculatives, que n’a-t-on pas fait pour faire grimper la cote aux bagnoles d’occasion !

Interdiction des importations de véhicules de moins de trois ans en passant par sa surtaxe à la vente jusqu’à l’interdiction des crédits automobiles sont autant de mesures gouvernementales dont les retombées ont donné des ailes à la voiture d’occasion.

Une Citroën Berlingot mise en circulation en 1998 est proposée à pas moins de 45 millions de centimes, une Renault Clio année 2001 à 41 millions, une Peugeot 307 HDI année 2003 à 93 millions de centimes, une Peugeot 406 année 99 à 85 millions de centimes, une Peugeot 206 année 2001 à 58 millions.

D’autres prix affichés seraient même excessifs selon quelques usagers de ce marché. Une Citroën Xsara 2002 est vendue à 60 millions de centimes, une Nubira année 2000 à 45 millions, une autre Renault de type Megane béret est à 115 millions de centimes tandis qu’une Toyota Yaris 2008 était à pas moins de 100 bâtons.

Les voitures allemandes sont également chères, une Wolswagen de type Bora année 2000 est proposée à 90 millions de centimes, une Golf, la 110 chevaux à 93 millions de centimes.

Il faut dire que le prix est tributaire de l’état du véhicule. De ce fait, les éventuels acquéreurs s’accompagnent volontiers d’un tôlier ou d’un mécanicien pour éviter de se faire avoir sur l’état réel du véhicule.

Par ailleurs, les prix des poids lourds ne sont plus si lourds. Paradoxalement, la tendance pour ce type de véhicule est plutôt à la baisse.

Les GBH cédés auparavant 600 millions se laissent emporter à moins de 400 millions.

Un grand tonnage de type MAN année 2005 est proposé à 500 millions de centimes un Sonacom de type K66 année 2000 est estimé à 165 millions de centimes.

Enfin, l’état des lieux du marché laisse à désirer. La fumée des grillades et la poussière soulevée par les véhicules, se mêlent sous un soleil brûlant.

Les accès menant vers le marché sont défoncés et impraticables. Pis encore, l’aménagement est pratiquement inexistant en ces endroits loués à plus de 10 milliards de centime, l’année.

Mohamed BOUFATAH