“Malheureusement, dans notre pays, l’on assiste à une prise en charge clientéliste des dossiers d’investissement”, déplore l’économiste Chafir Ahmine.
Le Conseil national de l’investissement (CNI) a décidé récemment de retirer des listes négatives du décret exécutif n°17-101 du 5 mars 2017, les activités déclarées déficitaires par les walis. Le CNI a chargé les ministères des Finances et de l’Industrie de la mise à jour de ces listes instituées par ce décret fixant les listes négatives, les seuils d’éligibilité et les modalités d’application des avantages aux différents types d’investissement. Or, cette dernière instruction du CNI reste aux yeux des économistes entachée d’irrégularités. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette mesure impose un traitement inéquitable, d’un investisseur à un autre et/ou d’une région à une autre. Mais en toile de fond, cela cache des “objectifs politiques et des intérêts économiques inavoués”, affirme l’économiste Chafir Ahmine. “Malheureusement, dans notre pays, l’on assiste à une prise en charge clientéliste des dossiers d’investissement quand bien même, ces projets serviront l’intérêt général du pays”, déplore Chafir Ahmine. Pour lui, les hommes d’affaires proches du cercle du pouvoir sont les plus avantagés et les mieux protégés. Tous les privilèges et les facilitations possibles leurs sont accordées, notamment l’accès aux crédits bancaires, au foncier industriel, la célérité dans l’étude et la réponse à leurs différentes demandes…
“En revanche, pour service rendu, ces privilégiés du système finissent toujours par renvoyer l’ascenseur, en répondant présent à la moindre sollicitation de leurs mentors ou sponsors, surtout lors des campagnes électorales et autres évènements”, relève l’universitaire. Chafir Ahmine parle d’un “véritable problème de fonctionnement politique et économique du pays”. Car, argue-t-il, tout opérateur économique qui a l’esprit nationaliste et qui veut investir dans son pays et contribuer à son développement refusant le diktat de ce régime, subira le même sort que ce que vit actuellement comme blocages le président de Cevital. “Quelle que soit la wilaya ou la région où il décidera de lancer son projet, il aura droit à la même attitude de la part des responsables locaux qui appliqueront des ordres venus d’en haut”, explique Chafir Ahmine.
L’économiste soutient que l’État ne doit pas interdire à quelqu’un, dans l’absolu, d’investir pour peu que son projet reste viable et a eu toutes les autorisations nécessaires. “Cette situation montre clairement que l’État continue toujours de naviguer à vue dans sa politique économique”, conclut l’expert. Pour rappel, des sources sûres ont indiqué qu’au cours d’une récente réunion, le CNI, que préside le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a retiré de la liste négative 21 créneaux d’investissement inclus dans une “liste négative” de secteurs inéligibles aux avantages fiscaux. Parmi les activités concernées, on trouve celle de “l’extraction d’huiles d’origine végétale (trituration de graines oléagineuses), huiles végétales brutes”. Selon les mêmes sources, la résolution du CNI a demandé aux départements ministériels concernés d’autoriser des activités dans des wilayas “où il y a un déficit”. Mais curieusement, la nouvelle instruction du CNI qui énumère une liste des “wilayas qui ont fait la demande”, exclut celle de Béjaïa. Pourtant, c’est dans cette wilaya qu’une demande est exprimée pour la construction d’une usine de trituration de graines oléagineuses.
Dans un décret exécutif publié le 8 mars 2017, le gouvernement avait établi “une liste noire” d’activités qui n’étaient pas éligibles aux avantages fiscaux de l’État. Or, sur une liste d’activités que l’Exécutif jugeait en saturation, l’on trouve “l’extraction d’huiles d’origine végétale (trituration de graines oléagineuses), huiles végétales brutes”, une activité qui n’existe même pas dans le pays.
B. K.