Les habitants de Ghardaïa tentent de renouer avec le train-train quotidien, mais appréhendent toujours une nouvelle flambée si le problème de la violence n’est pas attaqué à la racine.
Plusieurs magasins ont rouvert hier, à Ghardaïa. Après plusieurs jours de grève, les commerçants ont décidé de reprendre leur activité, mais pour un mois seulement. “J’ai repris le travail aujourd’hui (hier, ndlr), mais je dois d’abord installer la marchandise dans mon magasin, que j’ai déplacée chez moi par peur”, a fait savoir un des commerçants de la rue Ibn Rostom. Mais contrairement à l’activité qui a repris presque dans sa totalité dans la quasi-majorité des quartiers de la ville, il y a lieu de signaler que dans certains autres quartiers, elle n’était que timide. Comme à la rue dite Zgag Lihoud ou à Ameyar, où certains commerces avaient encore rideau baissé. Selon Hamou Mesbah, responsable de la fédération du FFS de la wilaya de Ghardaïa, “ces commerçants exigent la sécurité”. Pour lui, le nombre impressionnant d’éléments des services de sécurité dans la ville ne réglera pas le problème. “Cela reste appréciable sur le plan du nombre seulement”, a-t-il dit, pour expliquer qu’il faut plutôt “agir sur le plan de l’efficacité”. Le gel de la grève des commerçants est perçu par les responsables locaux comme un signe d’apaisement. M. Abaza Yahia, maire de la localité, estime que c’est une sage décision qui contribuera à la baisse de tension.
La délinquance source de problèmes
Le maire de la commune de Ghardaïa explique que l’origine du conflit est loin d’être religieux ou intercommunautaire. “Ce sont les voyous qui mettent le feu aux poudres”, accusent-ils. Ces “voyous” mis à l’index par les responsables locaux agissent ainsi “lorsque l’étau se resserre autour d’eux”, explique, pour sa part, Omar Daddi Addoune, P/APW. Élu sur une liste d’indépendants, ce jeune avocat précise que même du côté des autorités locales, “la population a ressenti une passivité”. Rien n’explique réellement cette passivité. Le P/APW a souligné que plusieurs rapports et requêtes ont été adressés par le passé à des responsables, mais sans suite. Dans quel objectif certains responsables n’agissent pas avant le pourrissement ? La réponse est donnée par plusieurs citoyens qui ont affirmé qu’avant les affrontements, “plusieurs jeunes drogués ont été signalés, mais rien n’a été fait pour les arrêter”. D’autres évoquent les réprimandes dont ils étaient victimes de la part des responsables lorsqu’ils avaient arrêté des délinquants.
Un calme précaire
Hier, une réunion a regroupé plusieurs responsables de la wilaya sous la présidence d’Ahmed Adli, SG du ministère de l’Intérieur et ancien wali de Ghardaïa. La présence de M. Adli est perçue comme un gage de réussite des pourparlers par plusieurs citoyens. “C’est un homme qui connaît assez bien la région et connaît les détails du conflit”, explique Baba Ahmed, un jeune commerçant dont la boutique a été fermée depuis plusieurs jours. Pour lui, “la présence des gens qui connaissent la région contribue favorablement au règlement de la crise”, même si, a-t-il estimé, que “cette accalmie est ressentie comme le silence qui précède la tempête”. Et c’est pourquoi il juge “impérieux de trouver une issue définitive à la crise”. La majorité des citoyens interrogés sur ce qu’ils attendent des pouvoirs publics n’ont qu’une seule réponse : “Un règlement rapide de la crise” et surtout “Une issue durable”. Parmi leurs exigences, ils pensent qu’un programme de développement local sera d’un grand apport à la résolution du conflit. Ces citoyens confrontés à une crise qui dure depuis 1975 sont persuadés que sans une intervention efficace et durable de l’État avec comme apport “une gestion démocratique” assurée par des institutions de la République, la ville restera otage de ce conflit, et ce, pour longtemps. Hier, à Ghardaïa, on évoquait la visite pour la semaine prochaine du Premier ministre, Abdelmalek Sellal. Elle interviendra, selon des informations, le jour de la célébration du Mawlid Ennabaoui, une fête célébrée avec un éclat particulier dans cette wilaya. Cependant, jusqu’à hier soir, les services de la wilaya n’ont pas été en mesure de confirmer ou d’infimer cette information.
M. M