Décidément, le projet Renault semble véritablement tenir à coeur les politiques algériens. Leurs réactions ont été immédiates, du moins de la part de ceux qui y croient et qui tiennent à ce qu’il voie le jour.
« Immédiates» par rapport à la publication d’un article sur le même sujet dans notre édition du jeudi dernier (11 octobre). Première précision de taille aux yeux des responsables algériens qui ont réagi à sa lecture, le projet Renault, disent-ils, «ce n’est pas un projet français mais c’est une société de droit algérien, alors l’Algérie se doit de le défendre». En outre, l’Algérie y est, précisent-ils, «majoritaire sur la base de la règle 51-49%. Elle y gagne beaucoup».
A propos de l’exclusivité imposée par Renault, à savoir la vente des véhicules produits uniquement en Algérie, nos interlocuteurs estiment qu’«il est normal et même évident que cette condition soit posée, mais cette exclusivité est accordée à la vente des seuls trois modèles qui vont être produits en Algérie».
Ils considèrent que «c’est tout à fait normal de l’exiger, ils ne veulent pas avoir une rivale en face !» En fait, les réactions ont été exprimées non pas pour démentir ce qui a été rapporté dans le premier article mais quelque peu nuancer l’esprit des conditions françaises à l’Algérie.
Pour ce qui est ainsi de leur condition de ne permettre à aucun autre constructeur automobile de s’installer en Algérie et ce, pour au moins cinq ans, ces responsables nous disent qu’ils se doivent de préciser que «c’est SNVI qui est interdite de signer avec un autre constructeur étranger autre que Renault, sinon, s’il y a une société nationale, publique ou privée qui voudrait investir dans l’automobile, elle est libre de lier un partenariat dans le domaine avec n’importe quel autre constructeur».
Nos interlocuteurs avouent, en outre, qu’il ne sera effectivement pas question d’intégration dans un premier temps, comme l’a exigé Renault. «C’est un démarrage, on est obligé de passer par une étape», nous dit-on. Autre remarque, il est affirmé que le site de pose de l’usine est bien situé dans la wilaya d’Oran et non pas à Mostaganem.
«Il a été visité par plusieurs responsables y compris par le ministre de l’Intérieur quand il avait réuni les walis de l’ouest du pays à Oran», nous fait-on savoir. Les deux parties sont convenues, selon eux, de produire ensemble «durant les premières années, 75.000 véhicules par an».
Pour l’instant, il nous a été confirmé que la «Symbol» sera produite en Algérie avec deux autres modèles dont «on ne veut pas parler». Ce qui pousse les responsables, qui accusent les autorités algériennes d’avoir «trop cédé» au profit des Français, à dire que «c’est le bas de gamme qui va être produit et vendu en Algérie».
Ceux des responsables qui défendent le projet estiment pour leur part à cet effet, qu’«on les a bien serrés pour accepter nos conditions et produire un véhicule de bonne qualité et qui sera à la portée des bourses des citoyens algériens moyens». Une grosse polémique continue ainsi d’entourer ce projet qui a trop fait parler de lui.
Il est évident que les multiples déclarations vantardes et les grandes promesses de Benmeradi, alors ministre de l’Industrie, à propos de ce partenariat pendant qu’en face, les diplomates français y affichaient un scepticisme inquiétant et un manque de précision flagrant, laissent sincèrement douter de sa faisabilité, du moins dans les temps qui lui ont été impartis.
Il semble surtout qu’au niveau des responsables politiques algériens, le consensus sur le projet n’a pas été atteint du moment que certains le défendent fortement alors que d’autres le dénoncent violemment.
La signature du pacte des actionnaires, au début de décembre prochain, à la faveur de la visite d’Etat qu’effectuera le président français en Algérie, pourrait peutêtre lui donner une consistance palpable et non virtuelle comme c’est le cas. Ce qui pourrait, éventuellement, apaiser quelque peu les esprits qui doutent de la bonne foi des Français à vouloir établir des relations de partenariat et lancer des projets importants en Algérie. Ils attendent de voir pour y croire.
Ce qui est sûr pour les deux «camps», c’est que le projet pour l’Algérie n’a rien à voir avec celui déjà réalisé à Tanger au Maroc par le même constructeur. Ce dernier est, selon eux, «bien plus important, l’usine est bien plus grande et ses capacités de production et de commercialisation sur le continent africain et pour le Moyen-Orient, toutes aussi importantes et garanties.»
Ghania Oukazi