Bien que le relogement des habitants des bidonvilles soit attendu avec impatience par leurs occupants, il y a toujours des problèmes qui accompagnent ces opérations.
Hier était une journée de joie pour les bénéficiaires et de détresse pour ceux écartés de l’opération de relogement des habitants de Haouch Mihoub de Baraki et des Ondines de Bordj El-Bahri.
En effet, les occupants de ces deux sites ont été relogés avec une présence, très timide, des autorités locales. Un relogement qui a dévoilé des problèmes sérieux et des «dérives graves», selon les déclarations des citoyens.
Cette opération qui devait concerner 151 familles de Baraki et 402 de bordj El-Bahri n’a, finalement, pas touché plus de 50 familles. Ces familles n’ont pas bénéficié d’un logement pour des raisons non identifiées. D’ailleurs, aucun responsable n’était présent pour expliquer la situation. «On nous a demandé de se préparer avant-hier pour le relogement. Ils nous ont même enlevé tous les toits de nos maisons pour faciliter la démolition.
Ce n’est qu’à la matinée d’hier qu’on a appris qu’on devait faire partie d’une liste pour être relogé. On s’est dit que c’est juste la procédure mais malheureusement, on n’a pas trouvé nos noms sur la liste et personne n’est venu nous expliquer ce qui se passe. Ils nous demandent juste de quitter nos maisons », nous a déclaré un père de famille, avec colère. «Après avoir détruit la moitié de ma maison, ils m’ont choqué par une décision illégale et injuste.
Il y a des gens qui sont venus, récemment, et ils ont bénéficié d’un logement.» Rencontrée sur les lieux, Nadia, mère de sept enfants, nous a indiqué, les larmes aux yeux, que son voisin qui est venu depuis deux ans a bénéficié de logement «et moi qui suis née dans cette maison j’était exclue de la liste. C’est la «hogra» totale.
Mon père a travaillé cette terre avant que le domaine ne soit loti. Mes frères sont tous nés sous ce toit et finalement on voit que ce sont les nouveaux débarqués qui jouissent de ce qui doit nous revenir de droit.
C’est injuste.» Ces familles étaient forcées de quitter leurs maisons et passer la nuit à la belle étoile. «Ils m’ont dupé. J’aurais dû ne pas accepter la destruction du toit de ma maison avant de voir où, je devais être relogé ou voir mon nom sur une liste de bénéficiaires. Je n’ai plus de maison. Notre cas est une leçon pour tous les citoyens qui croient encore au pays de droit», révèle un père de six filles et un garçon.
Parmi ces familles «mises à l’écart de cette action de relogement», il y avait une vielle qui pleurait tout en prenant son mal en patience. On s’est approché d’elle pour savoir les raisons. Elle nous a appris qu’elle s’est mariée dans cette maison à l’époque où la région était un domaine agricole. «Aucun de ceux qui viennent d’être relogés ne connaît ce domaine mieux que moi, d’ailleurs j’ai les quittances d’électricité depuis 1973. J’ai vécu avec mon mari et mes six enfants.
Ces derniers se sont tous mariés, ici, et au lieu de nous résoudre le problème de logement, ils nous ont mis dehors. Si je meurs cette nuit ils n’auraient même pas une maison où ils pourraient faire mon deuil et recevoir les condoléances.» Le problème des familles écartées de cette action de relogement n’est pas la seule contrainte évoquée. Il y a aussi des familles qui ont refusé de quitter leurs maisons à cause de «l’injustice dans la distribution des nouveaux logements ».
Mohamed, père de famille, nous a informé qu’il vit avec ces deux frères et leurs familles dans une seule maison et annonce-t-il, « ils nous ont attribué à tous un seul appartement de type F3.» Notre interlocuteur et ses frères se demandent maintenant «qui va occuper ce logement qui est trop exigu même pour une seule famille d’entre nous.» Un autre père de famille était déçu de l’appartement dont il a bénéficié. «Ils m’ont donné un F2 pour une famille de 12 personnes.
C’est illogique! » Pour avoir plus d’explications sur le pourquoi du comment de ces cas de figure, nous nous sommes rendus au siège de l’OPGI territorialement compétent. Sur place, nous avons rencontré Tayeb Bouaddou, chef du département de la gestion immobilière de Dar El- Beïda.
Ce responsable, en définitive, n’avait aucun commentaire à faire ou une explication à fournir au sujet des cas qu’on lui a soulevés, à savoir les familles écartées de cette action de relogement ou celles ayant bénéficié de logements exigus. «Ces familles doivent voir avec les autorités locales. À notre niveau on s’occupe des recours des bénéficiaires qui refusent le logement pour une raison ou une autre», nous a-t-il lancé en guise de mettre un terme au débat.
« Ces gens-là doivent déposer le recours et attendre la décision de la commission concernée», ajoute-t-il. Il est à rappeler que cette action de relogement intervient après celles ayant concerné les quartiers de Diar El-Kef (Bab El- Oued), Diar Echems (El-Mouradia), le bidonville de Hydra et de Zaâtcha, soit un total de 2 490 familles relogées par la wilaya d’Alger jusqu’à présent.
Abla Selles