Relations algéro-américaines: Lune de miel entre Alger et Washington

Relations algéro-américaines: Lune de miel entre Alger et Washington

Les échanges algéro-américains s’intensifient de manière très perceptible depuis un moment. L’heure est aux grandes rencontres, aux débats sensibles, signes d’un rapprochement évident dans une conjoncture particulière où l’Algérie tente une transition en douceur.

Des faits marquants se succèdent en fait depuis l’été dernier. C’est le moment où Donald Trump fait connaître son intention de changer le patron de la représentation américaine en Algérie.

Décrié à travers le monde pour ses positions racistes envers (entre autres) le monde arabo-musulman «porteur d’extrémisme», le nouveau Président semble avoir adopté une tout autre démarche avec les Algériens.

Homme d’affaires reconnu, il confie son envie d’investir dans cette contrée méconnue des Américains. Peu de temps après son élection, il fait d’ailleurs inviter une délégation de parlementaires algériens à un «petit-déjeuner de la prière» organisé par le congrès à Washington. Donald Trump y assiste.

Seddik Chihab, porte-parole du RND, et d’autres invités algériens présents rapportent à leur retour l’intérêt marqué et la «disponibilité» américaine à se rapprocher davantage du pays. Tout le monde sait donc aussi qu’il s’apprête à changer son ambassadeur à Alger. Un nom est susurré aux Algériens : John Desrocher, un parfait économiste, fin connaisseur du Maghreb ayant mené de nombreuses missions en Irak. Alger accepte immédiatement la proposition.

Dans le pays, certains titres de presse laissent entendre que ce dernier s’intéresse de près à la manière dont s’effectuent les transitions et les changements prévus au sommet du pouvoir. Desrocher s’informe de manière assidue, veut tout comprendre, y compris la langue amazighe à laquelle il s’essaye. Les Algériens retiennent également de lui son déplacement à un derby USMA-MCA. L’évènement le rend populaire.

Sur le plan politique, son récent déplacement dans les camps de réfugiés sahraouis confirme qu’un petit changement de cap s’opère progressivement. Au moment où des pressions intenses s’exercent pour imposer une nouvelle solution au conflit sahraoui, l’ambassadeur des Etats-Unis se rend à Tindouf, s’entretient avec de hauts responsables algériens, fait le tour de la question avec les responsables de la RASD (République arabe sahraouie démocratique) et s’entretient avec la jeunesse sahraouie qui veut reprendre les armes. Au lendemain de son retour, il évoque le drame humanitaire des réfugiés et espère l’organisation d’un référendum d’autodétermination. Il exprime la position de son pays, celle de l’ONU et de l’Algérie qui milite pour cette option.

Son geste est fort et ne passe pas inaperçu. Ses activités ne sont pas isolées. Elles relèvent visiblement d’une démarche bien tracée. Car au même moment dans le pays, les échanges s’accélèrent, s’intensifient. Mercredi encore, le président de la Commission renseignement au Congrès américain était reçu par Abdelkader Messahel.

David Nunes a eu cette réflexion en quittant la table des discussions : «Nous avons eu une excellente réunion, nous sommes ravis d’être ici.» Les Algériens aussi, apparemment. Le ministre des Affaires étrangères a, en effet, déclaré que «les Etats-Unis sont un pays extrêmement important et que ce dernier porte un intérêt tout particulier à la lutte antiterroriste et à l’expérience algérienne». A ses côtés, le président de la Commission renseignement du Congress évoque la stabilité qui règne dans le pays.

Mardi, le sous-secrétaire américain à la Défense, lui aussi en visite à Alger, a exprimé le souhait de son pays «de mettre à profit l’expérience algérienne dans le domaine de la lutte antiterroriste afin de contribuer au maintien de la sécurité et de la paix dans la région et partout dans le monde». Mardi toujours et de manière séparée, des entretiens ont également eu lieu entre le MAE algérien et le coordonnateur-adjoint de la lutte antiterroriste au département d’Etat. Décision a été prise d’organiser à Alger la cinquième session du dialogue stratégique entre l’Algérie et les Etats-Unis sur la sécurité et la lutte antiterroriste.

Le discours américain est uniforme, quelle qu’en soit l’origine. A quelques heures d’intervalle, l’ambassadeur américain, reçu par le président de l’APN, mettait l’accent sur «la nécessité de relayer l’image réelle de l’Algérie en tant que pays important en Afrique du Nord», s’engage à le faire et appelle au «renforcement de la coopération bilatérale». Il fait beau temps entre Alger et Washington.

Abla Chérif