Alger la Blanche. Dans les récits anciens, les voyageurs de tous horizons décrivent l’approche d’Alger, souvent par la mer, à travers la beauté de cet amphithéâtre qui protège la somptueuse baie.
Alger la Blanche. Dans les récits anciens, les voyageurs de tous horizons décrivent l’approche d’Alger, souvent par la mer, à travers la beauté de cet amphithéâtre qui protège la somptueuse baie. La luminosité qui s’en dégage rappelle aux nouveaux arrivants qu’ils abordent une authentique ville méditerranéenne séculaire.
Avec les siècles et les affres du temps et des nombreux événements qu’à connue
«Dzayer», la ville des Ibnou Ziri a accusé le coup et a fini par connaître quelques décrépitudes. La capitale de l’Algérie a été construite graduellement tout au long des âges, des conquêtes et de sa population cosmopolite. A l’arrivée du colonisateur français, la ville fut étêtée de tout un pan de son architecture. Une ceinture haussmannienne est venue s’intercaler entre la vieille Casbah et le front de mer. Alger avait changé de visage.
En ce début du XXIe siècle, la célérité et les nouvelles donnes de l’urbanisme ont poussé à entamer une réhabilitation des vieux bâtis. Pour mieux y vivre et pour conserver sa mémoire architecturale si riche et si variée.
Les raisons d’une lenteur
Au début de l’année 2014, le coup d’envoi fut donné par les autorités pour entamer les travaux au niveau du centre historique de la cité. Les grandes artères concernées sont les boulevards Zighout- Youcef, Krim-Belkacem, Frantz- Fanon, Didouche-Mourad, Mohamed-V, docteur Saâdane, Hassiba- Ben Bouali, Colonel Amirouche, Asselah-Hocine et Larbi-Ben M’hidi. Les immeubles, au nombre de 792, attendent les échafaudages ou sont déjà en cours de réfection.
Les chantiers vont bon train dans leur majorité, mis à part quelques contraintes techniques qui retardent ça et là les travaux. Entre autres facteurs de blocage, l’enchevêtrement des réseaux électriques et téléphoniques qui attendent une sérieuse et longue opération d’enfouissement.
La raison de cette lenteur réside dans la configuration même de l’architecture algéroise. Les architectes et les entrepreneurs à pied d’œuvre ont buté sur un autre os de taille : l’occupation anarchique et illégale des terrasses et des caves. Ce qui pousse à inscrire une opération de relogement dans les meilleurs délais.
La restauration du cachet architecturale; mosaïques, marbres et céramiques, s’annonce, quant à elle, très ardue, vu les multiples, et pratiquement irréversibles, dégâts causés par l’installation à tout-va des paraboles et climatiseurs qui amochent sérieusement le décor.
Un plan de réhabilitation étalé sur 5 phases
Quant aux cages d’escalier, la réfection nécessite beaucoup de temps et de minutie devant l’état de délabrement avancé des rampes et des escaliers. Les ascenseurs, au grand bonheur des habitants, auront leur part de mise à neuf.
On compte, rien que sur les boulevards Didouche-Mourad et Mohamed-V, 40 immeubles à réhabiliter dans une liste globale dans la commune d’Alger qui en totalise 1.433 abritant 22.859 logements. Actuellement, les échafaudages sont accrochés sur 792 immeubles, soit 13.791 habitations concernées par les chantiers.
En fait, le plan général de réhabilitation du vieux bâti «pré-existant» est étalé sur 5 phases de 55.302 logements identifiés par une étude de diagnostic technique et socio-économique réalisée en 2006.
Rappelons que le dernier séisme qui a frappé la capitale
durant l’été dernier a catalysé la
décision de réhabilitation
d’urgence du centre historique aux «œuvres architecturales uniques», de l’avis des experts urbanistes.
Dans la lancée, une seconde enveloppe financière de 120 millions de dinars, débloquée par le ministère de l’Habitat, sera allouée au lancement de la deuxième tranche des «études de diagnostic et économique de diagnostic et socio-économique du parc immobilier des 7 communes restantes de l’hypercentre d’Alger, à savoir, Rais Hamidou, Bologhine, la Casbah, Oued Koreiche, El Biar, El Mouradia et Kouba d’une consistance arrêtée provisoirement à 10.571.
Blancheur et ornements
Dans une récente déclaration, un responsable auprès du ministère de l’Habitat, de l’urbanisme et de la ville donne le chiffre de 300.000 logements qui sont sous la loupe des experts pour un diagnostic à travers le territoire. L’organisme national de contrôle technique de la construction (CTC) a été chargé de ces études de diagnostic. Celles-ci visent l’évaluation des risques qui menacent 304.113 logements sur 12 sites de vieux bâti à travers 11 wilayas. «Il s’agit d’Alger, Blida, Oran, Annaba, Béjaïa, Souk Ahras, Mascara, Sidi Bel Abbès, Constantine, Relizane et Mostaganem, sachant que pour les quatre dernières wilayas, les travaux d’expertise sont sur le point d’être achevés». La wilaya d’Alger, représente plus de 120.000 logements à diagnostiquer dans des bâtisses datant des XVIIIe, XIXe et XXe siècles. Chaque bâtiment aura impérativement sa «carte d’identité».
Ce même responsable précise que le CTC est désormais doté d’équipement électronique de dernière génération pour mener à bien cette opération d’envergure. Chaque bâtisse livrera ses capacités en vue d’une solution, tels, la démolition, le confortement, la transformation ou la réhabilitation.
Sur le plan juridique, les conditions et les modalités d’intervention seront encadrées. «C’est dans ce sens qu’un projet de décret a été élaboré et soumis au Secrétariat général du gouvernement pour concertation et enrichissement», selon le même responsable.
Enfin, et pour conforter tout ce processus délicat, «une agence va être mise en place pour prendre en charge le vieux bâti sur tout le territoire national, et dont la mission consistera à planifier et à organiser les interventions sur les anciennes constructions touchées par la dégradation». Les sièges d’institutions publiques ou de services publics, de mosquées et de théâtres seront également visés par ce plan.
En ce mois où le soleil d’été enlumine Alger, plusieurs immeubles et édifices du centre-ville se sont défait des échafaudages pour exhiber leur blancheur et leurs ornements, comme s’ils étaient nés ce matin à l’aube. Alger la Blanche retrouvera sa superbe et narguera la Méditerranée comme dans les temps anciens.
Kamel Morsli