Son intervention lors du Conseil des ministres se veut comme une réponse aux nombreuses voix qui se sont manifestées ces derniers jours pour exprimer des doutes et des inquiétudes sur les promesses de démocratisation du système politique.
Comme annoncé par Liberté dans une de nos précédentes éditions, un Conseil des ministres, qui marque ainsi la rentrée politique, s’est tenu dimanche. Le président Bouteflika, attendu pour une réaction sur le dramatique attentat qui avait ciblé vendredi l’Académie interarmes de Cherchell, s’est gardé de tout commentaire. Tout comme il n’a pas pipé mot sur la situation en Libye, au moment où la position de l’Algérie est l’objet de critiques récurrentes à cause de son ambiguïté. En revanche, le chef de l’État s’est montré plus disert sur les réformes politiques qui ont été au menu de ce Conseil des ministres. Et d’emblée, il renouvelle son engagement à mener ces réformes qu’il avait annoncées dans son discours du 15 avril dernier.
“Cet attachement au calendrier politique ainsi qu’à la prise en charge des propositions émises par la majorité des participants à la consultation marquera aussi les prochaines étapes des réformes politiques que j’ai initiées, y compris le projet de révision de la Constitution qui aboutira devant le Parlement dès la tenue des prochaines élections législatives”, a-t-il promis dans son intervention. En promettant ainsi de respecter l’agenda des réformes, le chef de l’État cherche visiblement à envoyer un signal fort aux partis et personnalités politiques qui commençaient à soupçonner le pouvoir de jouer la montre pour gagner du temps. Et donc faire passer aux Algériens l’envie des réformes. Louisa Hanoune, qui a pourtant pleinement adhéré aux consultations politiques du mois de juin avec la commission Bensalah, n’a pas cessé de marteler ces derniers jours des mises en garde à peine voilées contre la tentation du statu quo. Vendredi, à la clôture de l’université d’été de son parti, elle a estimé que “les conjonctures nationale et régionale exigent d’accélérer les réformes en Algérie”. Nécessité d’autant plus accrue que, l’Algérie, selon elle, à la faveur des évènements vécus par certains pays arabes, fait l’objet de provocations de l’étranger. Même méfiance et même suspicion de la part du MSP, mais avec un ton plus tranchant. Dans un récent communiqué dans lequel il se félicitait de la chute du régime de Kadhafi, le parti de Abou Djerra n’avait pas fait dans la dentelle en envoyant des messages codés au président Bouteflika. “Aux zaïms historiques de comprendre que leur génération politique est révolue”, lit-on dans ce communiqué virulent du MSP, pourtant membre de la coalition présidentielle, qui estime qu’il est temps qu’une nouvelle étape qui demande la révision des équations classiques de gouvernance sur de nouvelles bases imposées par la volonté populaire s’ouvre.
Le temps ne joue pas en faveur des régimes en place
Abdelhamid Mehri, vieux routier de la politique, qui a pourtant pris ses distances avec le système, a, lui aussi, participé aux consultations politiques. Lors d’une conférence animée dans le cadre des soirées ramadhanesques organisées par Algérie News, il avait fait part de ses doutes. “Je ne perçois, hélas, aucune volonté de changement chez le régime”, prévenait-il. Le politologue, Chafik Mesbah, dans une récente intervention dans la presse, accusait le pouvoir de “chercher à acheter la paix sociale en investissant des milliards de dollars pour faire l’économie des réformes politiques incontournables, dès lors qu’elles s’inscrivent dans une dynamique régionale qui transcende la volonté des gouvernements nationaux”. Le président Bouteflika semble a priori prendre la mesure de ce doute qui menace de plomber ses engagements. Lui aussi paraît convenir de la nécessité des aggiornamentos qui sont imposés par le sens de l’histoire qui est en train de s’écrire au présent dans les pays arabes. “L’Algérie est partie prenante aux différentes mutations en cours marquant la communauté internationale, y compris la nation arabe”, dit-il à ce propos en soulignant toutefois que “chaque peuple forge souverainement sa propre expérience. En ce qui concerne le peuple algérien, il a su instaurer son propre système pluraliste qu’il a sauvegardé malgré une tragédie nationale douloureuse”. Et comme gage de bonne foi en direction de la classe politique, une première fournée de textes endossés dimanche qui seront bientôt sur le bureau de l’Assemblée. Code électoral et code de wilaya. En attendant les projets emblématiques de ces réformes, à savoir la loi sur les partis politiques et le code de l’information. Il faut noter que ces deux textes “fuités” dans la presse ont été sévèrement critiqués et considérés comme “en deçà de ce qui est attendu par la classe politique”. La nouvelle mouture, qui sera examinée lors du prochain Conseil des ministres, intégrera-t-elle une plus grande dose d’ouverture politique ? On verra. Mais pour le président Bouteflika, “la bataille du développement économique sera désormais confortée par les réformes politiques que l’Algérie a souverainement décidées et qui seront concrétisées au cours des prochains mois, comme j’en renouvelle solennellement l’engagement”