Au-delà de l’encouragement de la consommation, le pouvoir est appelé à mener une lutte sans merci contre les barons parasitaires. En a-t-il les moyens ?
Pour avoir été éprouvée sans grand succès par le passé, la campagne “Consommons algérien”, lancée en grande pompe par le ministre du Commerce, risque de s’avérer un prêche dans le désert si l’on se fie au constat de certains économistes.
Ou du moins, son impact sera limité sur l’économie nationale. Non pas que les ménages algériens rechignent à consommer le produit local, mais parce que les entreprises locales accusent un retard en matière technologique et que l’offre pèche par l’absence de qualité aux normes universelles de nature à soutenir la concurrence avec les produits importés.
“Les entreprises doivent rattraper le retard qu’elles ont sur le plan technologique (…) Il s’agit d’une condition nécessaire pour parvenir à convaincre le consommateur algérien d’acheter le produit made in Algeria”, de l’aveu même du ministre du Commerce, Amara Benyounès, qui parraine la campagne, et dont la mission ne s’annonce pas aisée.
Résultat des courses : tous les efforts déployés pour réduire les importations n’ont pas atteint les objectifs fixés et il reste beaucoup à faire, selon lui. “Le problème pour l’Algérie réside dans la faiblesse de l’offre, donc de la production locale (…) Le modèle keynésien de relance de la production par la consommation, qui part de l’hypothèse de l’existence d’une offre sous-utilisée (n’est) pas transposable à l’Algérie qui souffre d’absence de facteurs de production compétitifs en termes de coût/qualité, et non pas d’oisiveté de la part des consommateurs”, soutient, pour sa part, l’expert, Abderrahmane
Mebtoul, dans les colonnes d’un confrère.
Mais au-delà de cette tare, l’incapacité de l’Exécutif à réduire les importations semble résider dans l’existence d’un puissant lobby qui bénéficie même de relais au sein du pouvoir politique.
La chronique populaire pullule de ces noms de pontes du régime ou d’anciens dignitaires — mais sans que personne ne dispose de preuves — qui activent dans l’importation du médicament jusqu’aux fruits exotiques, en passant par les produits pyrotechniques, quand bien même ces derniers sont formellement interdits ! À l’inverse de l’investissement productif, l’importation a ceci d’avantageux que le risque des investissements est quasiment nul. On se souvient d’ailleurs de la fameuse phrase du président Bouteflika : “Le commerce extérieur est contrôlé par 15 chats !”
Faut-il conclure alors, que, faute d’une lutte sans merci contre ces lobbies, du moins les plus parasitaires d’entre eux, la campagne est vouée à l’échec ? S’il faut sans doute se garder de conclusions hâtives, il reste que la solution globale passe inévitablement par la transition vers une économie hors rente. La réforme du système bancaire — l’un des plus archaïques du bassin méditerranéen —, l’amélioration du climat des affaires, la lutte contre la corruption et la bureaucratie, le règlement du problème foncier sont les seuls garants pour encourager l’investissement productif.
Mais, le gouvernement en a-t-il la volonté et les moyens ? C’est la grande question.
K.K.