Antonio Guterres tentera de sensibiliser Washington sur “les problèmes financiers graves”, qui mettent en danger ses nombreuses missions, notamment celles de maintien de la paix à travers le monde.
Le secrétaire général des Nations unies sera à Washington aujourd’hui et demain pour discuter avec les autorités américaines du financement des opérations de paix, dont le budget est déséquilibré par la baisse de la contribution des États-Unis.
De plus en plus alarmé par la trésorerie défaillante de l’ONU, Antonio Guterres s’attèle à multiplier les initiatives pour sensibiliser les États membres aux “problèmes financiers graves” auxquels est confrontée l’institution, après avoir consacré à la question une rencontre mensuelle avec le Conseil de sécurité et adressé une lettre alarmante aux 193 membres des Nations unies réunis récemment pour trouver à des solutions. Adopté chaque année en juin, le budget de l’ONU pour sa quinzaine d’opérations de paix employant plus de 100 000 Casques bleus est de 6,689 milliards de dollars. Il faut dire que la décision du président Donald Trump de réduire la contribution financière américaine à 25% représente le plus gros casse-tête pour Antonio Guterres.
De nombreux pays sont réfractaires à se substituer aux États-Unis, qui ne sont pas parvenus fin 2018 à faire entériner par l’ONU le principe d’une part américaine réduite. Selon Washington, la répartition des contributions n’est plus juste, avec des pays ne payant pas assez au vu de leurs possibilités. En ligne de mire des États-Unis figurent l’Arabie Saoudite, le Qatar, les Émirats arabes unis, la Turquie, Singapour, Brunei, le Brésil, le Mexique ou l’Inde. “La capacité américaine devrait plutôt se traduire par une contribution à 29%”, rétorque un diplomate africain, en soulignant que Washington est “le premier bénéficiaire” des opérations de paix.

En plus de la réduction depuis 2017 de 28% à 25% de la contribution américaine (soit 220 millions de dollars par an en moins), Antonio Guterres fait face à de plus en plus de retards de paiement par les États membres, pouvant atteindre au total plusieurs centaines de millions. Parmi les conséquences de ces réductions dans les contributions, l’ONU qui doit rembourser les pays ayant déployé des troupes dans des opérations accuse elle aussi des retards conséquents. Jusqu’à présent, le problème n’a pas poussé les pays à proposer moins de troupes, note-t-on à l’ONU. Il n’en demeure pas moins que l’on se pose la question : mais jusqu’à quand ? Les répercussions sont particulièrement importantes pour les gros fournisseurs de Casques bleus.
En tête des pays auxquels l’ONU doit de l’argent figurent l’Éthiopie qui attend 41,6 millions de dollars, l’Inde 40,5 millions et le Pakistan 35,7 millions. Sans mission de l’ONU dans certains pays, l’engagement et le coût pour les États-Unis seraient démultipliés, note une source. Alors, quelles solutions, sachant qu’aucune sanction n’est prévue pour ceux qui ne paient pas la totalité de leur dû ou s’exécutent avec retard, et “qu’une réduction des dépenses ne peut compenser le manque à gagner” comme l’a admis lui-même Antonio Guterres ?
Merzak Tigrine