De nombreux projets d’utilité publique tardent à voir le jour.
Le chef de l’exécutif de la wilaya de Béjaïa compte demander une dérogation au ministre de tutelle pour réaliser au plus vite une faculté et une résidence universitaire dans la commune d’Amizour. Lui-même sera sollicité incessamment par la direction de l’agence foncière de la wilaya pour engager les travaux d’assainissement de la cité de recasement à Aokas, pour permettre aux bénéficiaires de reconstruire leurs demeures. Ces deux marchés seront vraisemblablement attribués par la procédure du gré à gré. Bien que leur montant ait dépassé le seuil fixé par le Code des marchés, des dérogations sont possibles lorsque notamment les avis d’appel d’offres s’avèrent infructueux et l’urgence de la situation l’exige.
De nombreux projets d’utilité publique tardent à voir le jour. Le retard accumulé est tel que le recours à la procédure de gré à gré est rendu nécessaire, voire comme passage obligé. Pour les mêmes raisons et à la veille du scrutin des locales, plusieurs maires sont tentés par la même approche. Il faut coûte que coûte lancer les projets en souffrance. Il y va de leur crédibilité. Dans l’espoir de se faire réélire, certains élus entreprennent déjà de demander au chef de l’exécutif des dérogations pour engager les marchés de gré à gré. Cet ultime recours trouve officiellement sa raison d’être dans le souci de résorber le retard accumulé depuis des années mais en réalité il cache mal d’autres motivations électoralistes, dont celle de faire bonne figure dans une élection locale qui se présente pour de nombreux élus en poste comme une opportunité à ne pas rater pour garder les rênes de pouvoir local.
Plus encore, le recours à la formule de gré à gré risque de laisser la voie libre aux pratiques longtemps décriées, dont la corruption. En effet, les maîtres d’ouvrage seraient tentés pour l’octroi des marchés à des entrepreneurs choisis non pas pour leur compétence mais sur la base de considérations affairistes, voire familiales.
La dernière mouture du code des marchés stipule que la passation des marchés publics se fait suivant la procédure d’appel d’offres visant à obtenir les offres de plusieurs soumissionnaires entrant en concurrence et à attribuer le marché au soumissionnaire présentant l’offre jugée la plus favorable. Le gré à gré est l’autre procédure autorisée exceptionnellement. Elle consiste à attribuer un marché à un partenaire cocontractant sans appel formel à la concurrence. La procédure du gré à gré simple est une règle de passation de contrat exceptionnelle qui ne peut être retenue que dans les cas énumérés à l’article 43 du décret. Lequel article précise que le recours au gré à gré est possible, entre autres, quand les prestations doivent être exécutées d’urgence et ne peuvent s’accommoder des délais des procédures de passation des marchés publics, à condition que les circonstances à l’origine de cette urgence n’aient pu être prévues par le service contractant et n’aient pas été le résultat de manoeuvres dilatoires de sa part.
Dans ce cas, le recours à ce mode de passation exceptionnel doit être approuvé, au préalable, en réunion du gouvernement. Ce mode de passation de marché peut être appliqué, aussi, quand il s’agit d’un projet prioritaire et d’importance nationale. Dans ce cas, «le recours à ce mode de passation exceptionnel doit être soumis à l’accord préalable du Conseil des ministres, si le montant du marché est égal ou supérieur à dix milliards de dinars et à l’accord préalable pris en réunion du gouvernement, si le montant du marché est inférieur au montant précité».
C’est justement la situation qui s’est présentée pour la Faculté de droit de 8000 places pédagogiques et d’une cité universitaire d’une capacité de 5 000 lits. Un projet qui a pris beaucoup de retard créant une situation complexe pour la précédente et l’actuelle rentrée universitaire à Béjaïa.