Dépassements ■ Au Stade Smaïl Makhlouf de l’Arbaa, hier, et à l’occasion du match RCA – CRB (2-0), le pire a été évité de justesse pour un simple match de football.
Et il faut dire que ce scénario était prévisible, au vu de tous les échos qui parvenaient de cette ville de la Mitidja quelques jours avant le jour du match. A leur entrée dans cette ville, les supporters du Chabab, tout comme leurs joueurs, ont été «terrorisés», comme ce fut le cas pour les anciens joueurs du RCA, qui portent actuellement les couleurs du Chabab, à savoir Amiri, Cherfaoui, Nemdil et Bougueroua. Ces joueurs ont été tabassés dès leur arrivée, au point où, selon des témoins oculaires, des énergumènes, munis d’armes blanches, les ont menacés en leur disant que si le RCA n’arrive pas à l’emporter, ils (les joueurs) ne rentreront pas sains et saufs chez eux. Ainsi donc, ce sont des joueurs pressés de terminer, perdre et rentrer chez eux qui ont pris part à cette rencontre.
«Heureusement qu’on n’a pas gagné», a déclaré le président Malek à la fin du match. Une déclaration qui en dit long. Les supporters du Chabab, quant à eux, ont vécu l’enfer. A leur entrée à l’Arba, plusieurs voitures ont été saccagées et ce n’est qu’après l’intervention des services de sécurité que les choses sont rentrées dans l’ordre. Au stade, placés dans la charpente métallique qui a servi de tribune, les fans belouizdadis ont été caillassés par des individus qui se trouvaient dans le bâtiment attenant. A ce moment là, l’on a enregistré plusieurs blessés, dont l’un était dans un état critique. Cette même tribune, et peu avant la fin de la première période, commençait à lâcher, ce qui a poussé les supporters du Chabab à la quitter précipitamment. Et cette bousculade a donné lieu, encore une fois, à plusieurs autres blessés. Quelques minutes plus tard, cette «tribune» est tombée. A la fin du match, l’hostilité n’a pas cessé, ce qui a poussé les services d’ordre à interdire la sortie des supporters du Chabab et les joueurs, jusqu’à ce que le calme revienne. Selon nos informations, une quinzaine de blessés a été enregistrée chez les fans algérois, et une dizaine parmi les services d’ordre. La violence dans les stades algériens n’est pas un fait nouveau. Le championnat algérien, déjà d’un niveau technique tout juste moyen, les stades qui reçoivent les matchs se sont transformés, lors de ces dernières années, en de véritables champs de batailles. La responsabilité incombe à certains dirigeants qui vendent du rêve, à des entraîneurs qui, après chaque revers, s’en prennent systématiquement aux arbitres pour le justifier, à une Fédération et une Ligue qui auront trop fermé les yeux sur cette violence grandissante jusqu’à ce que la ligne rouge soit franchie avec mort d’hommes. Et pour résoudre cela, il faudra, tout d’abord, examiner le fond du problème et dire que le peuple algérien, dans sa grande majorité, est devenu violent, chose qui peut se faire remarquer dans tous les domaines. Faut-t-il, donc, s’étonner que nos stades soient le théâtre de véritables champs de guérilla ? Absolument pas, puisque ce ne sont que les conséquences de notre vraie nature, et c’est là où ça fait le plus mal.
Mohamed Benhamla
L’accusation
Djamel Amani pointé du doigt
Les responsables du CRB ne sont pas allés avec le dos de la cuillère pour pointer du doigt une seule personne, l’accusant d’être derrière tout ce qui s’est passé hier. Il s’agit du président du RCA, Djamel Amani. Pour eux, ce dernier a tout préparé quelques jours avant même cette rencontre pour que les Belouizdadis vivent l’enfer. D’ailleurs, le président du comité de supporters du Chabab, Mohamed Benmançor, nous dira dans ce sillage : «Ce qu’a fait Amani est indigne. Quelqu’un qui se prétend être un ancien international et champion d’Afrique avec l’équipe nationale, ne peut se permettre de commettre ce genre de choses gravissimes. Il a nuit au football national et à son intégrité. Il a atteint, hélas, un niveau de bassesse que l’homme le plus vil ne saurait lui-même atteindre. La tribune que les gars de l’Arba ont réservé à nos supporters ne pouvait contenir plus de 100 personnes, alors que nos fans étaient avec un nombre triple dans les lieux, et voilà le résultat de cela, avec l’effondrement de ladite tribune. On ne va pas se taire, et à chacun, donc, d’assumer ses responsabilités». Notre interlocuteur affirme qu’il dispose de toutes les photos et vidéos qui appuient ses dires. Nous avons tenté, par ailleurs, de joindre le président Djamel Amani pour répondre à ces accusations, mais il était injoignable.
M. B.
Le geste
«Heureusement qu’il y avait des exceptions»
Certes, les supporters du RCA ont utilisé tous les moyens pour voir leur équipe garder les trois points chez elle, quitte même à utiliser des armes blanches, mais fort heureusement qu’il y avait des exceptions. En effet, des témoins oculaires affirment que certains habitants de la ville de l’Arba, ont fait des pieds et des mains afin d’assurer une sortie en sécurité des supporters du Chabab. Parmi ces habitants, certains ont même utilisé leurs moyens personnels pour transporter des supporters jusqu’à la sortie de la ville, en prenant des raccourcis qui leur permettaient d’éviter de rencontrer les supporters du RCA. Ceci, comme pour dire qu’«il y a toujours des exceptions à la règle».
M. B.
Le cri
Dékimèche : «prenez les trois points, et laissez nous partir»
A la fin de la rencontre, l’entraîneur des gardiens de but du Chabab, Khaled Dékimèche, était dans tous ses états. Il a indiqué que des responsables du RCA ont rendu ce match spécial pour la simple raison que des joueurs qui évoluaient chez eux la saison dernière ont rejoint le CRB à l’intersaison. «Le football national perd de ses valeurs, notamment avec la présence de dirigeants pareils. Un simple match de football tourne à l’émeute en raison d’histoires banales. Quand un joueur se voit menacé, dès son arrivée au stade, par des armes blanches, cela veut dire que nous avons touché le fond. Honte à ces dirigeants ! Maintenant qu’ils ont pris les trois ponts, qu’ils nous laissent rentrer chez nous. De jour en jour, cette manière d’agir et de gérer les affaires de notre football me dégoûte», a déclaré l’ancien gardien de but international.
M. B.
La décision
Plus de partage de tribunes au stade 20-Août
Dans un moment de colère, après les scènes graves d’hier, le président du Chabab, Réda Malek, a annoncé que, désormais, les tribunes du stade 20-Août d’Alger ne seront plus jamais partagées avec les supporters adverses. Pour lui, il est illogique que sa direction veille, à chaque rencontre dans ledit stade, pour que les supporters des autres équipes soient mis les meilleures conditions, alors que les Belouizdadis sont traités de la plus hostile des manières lors de leurs déplacements.
M. B.
La procédure
Malek devrait déposer plainte
D’une source au fait des affaires du Chabab, nous apprenons que le président Réda Malek, devrait déposer, dans les heures qui viennent, une plainte contre les responsables du stade de l’Arba, ainsi que les dirigeants du RCA. Pour appuyer sa position, Malek devrait se servir des photos et vidéos en sa possession. «De ma vie, je n’ai jamais vu une hostilité pareille. Nos supporters étaient mis en danger, et fort heureusement que notre équipe n’a pas gagné, sinon, le pire aurait été survenu. Que chacun assume ses responsabilités, donc. On ira le plus loin possible dans cette affaire», a-t-il déclaré. A la fin de la rencontre, Malek n’a pas voulu quitter les lieux jusqu’à ce qu’il s’est assuré que ses supporters sont partis chez eux.
M. B.