La commission d’enquête norvégienne sur les tragiques événements de Tiguentourine devra remettre, à Statoil, son rapport de conclusions avant jeudi prochain, a-t-on appris de sources bien informées.
Ce rapport devrait désavouer toutes les thèses de British Petroleum sur les circonstances de l’attaque perpétrée par un groupe terroriste en date du 16 janvier 2013 contre les installations gazières d’In Amenas, gérées par la compagnie britannique, en association avec la Sonatrach et la norvégienne Statoil.
La commission d’enquête, dirigée par un ancien général des services de renseignement norvégiens, a réalisé pas moins de 120 entretiens avec des employés et responsables de Statoil, de l’association In Salah Gaz, du gouvernement algérien et surtout consulté des experts américains de la défense et de la CIA, ajoutent les mêmes sources.
Lors de sa nomination le 26 février dernier, la commission d’enquête avait pour mission de reconstituer la chaîne des événements pertinents avant, pendant et après l’attaque terroriste de Tiguentourine, dans laquelle cinq employés de Statoil ont trouvé la mort alors que douze autres ont été libérés par les forces de l’ANP après une prise d’otages qui aura duré plus de 24 heures.
Cette commission d’enquête est chargée d’une seconde mission, visant à instruire Statoil sur les différentes failles de son système afin d’améliorer ses méthodes de gestion dans les domaines de la sécurité, l’évaluation des risques et la préparation des plans d’urgence.
Par conséquent, les recommandations de cette commission seront généralisées dans le management de Statoil partout dans les 11 pays où elle opère. Dans le mandat du conseil d’administration de Statoil, il est clairement spécifié que la commission d’enquête «doit avoir la possibilité de commander des expertises externes dans des zones définies de la sécurité», autrement dit le recours à l’expertise des consultants internationaux.
A ce titre, la commission d’enquête a préconisé des expertises de plusieurs personnalités ayant exercé dans les hautes sphères de la sécurité. Parmi ces personnalités, figure John Hamre, qui a occupé de 1997 à 2000, le poste de secrétaire adjoint à la Défense au gouvernement américain.
Il est aujourd’hui président du Centre pour études stratégiques et internationales (CSIS). La commission d’enquête a également sollicité l’expertise de McLaughlin, un ancien patron de la CIA, qui exerce actuellement à l’université Johns Hopkins aux Etats-Unis.
Les négligences de l’opérateur Les discussions avec les différents responsables et employés de Statoil, de l’association et des entités sous-traitantes ont mis à mal le système élaboré et appliqué par la British Petroleum dans la gestion des questions liées à la sécurité sur le site gazier de Tiguentourine. Avec son partenaire, le britannique Stirling Group, BP était l’opérateur responsable de toute la gestion du site, surtout de la sécurité, notamment en raison de la proximité du gisement avec la frontière libyenne où l’Etat n’arrivait plus à imposer son autorité.
De plus, les recrutements directs des personnels ou le choix des sous-traitants relevaient de ressort exclusif de BP. Dans ce système, BP a failli.
A tel point qu’elle a contracté, pendant des années, des contrats avec le frère de l’émir Abdelhamid Abou Zeïd. Au lieu de reconnaître ses responsabilités, BP a préféré contourner toutes ces questions et tenté d’influer sur son partenaire norvégien, qui a refusé de subir ce chantage. Statoil attend les recommandations de la commission d’enquête pour les adapter à la reprise de ses activités à In Amenas.
Par ailleurs, la société d’engineering Petrofac a annoncé, la semaine dernière, son intention de reprendre ses travaux qui ont été interrompus sur le site gazier d’In Salah au lendemain de l’attaque terroriste contre les installations de Tiguentourine. Petrofac a vu ses bénéfices reculer au premier semestre 2013, en raison justement de l’interruption de ses activités en Algérie, où elle devait achever des installations pour 1,5 milliard de dollars.
Du coup, BP, qui a été lâchée par ses partenaires, est condamnée à reprendre ses activités en Algérie au plus tard dans deux semaines. Mais, d’aucuns s’attendent à ce que la société anglaise exerce de nouvelles formes de préssion sur la Sonatrach pour obtenir toujours plus de concessions et continuer à jouir de la gestion totale de l’activité de l’association.
Enfin, il faut noter que le conseil d’administration de Statoil a décidé de rendre public le rapport de la commission d’enquête, mais il s’est permis d’en retirer certains passages comportant des aspects liés à la sécurité des personnels et des installations.
M. Benzaki