Le cyber, un lieu de loisir très prisé par les jeunes
Les jeux de dominos accompagnent harmonieusement les discussions et la nostalgie à propos d’un souvenir des années d’enfance passées au village natal.
Chaque arrivée du mois de Ramadhan met en évidence un phénomène sur lequel l’on ferme les yeux et une fois l’Aïd venu, on oublie: les cafés.
Cinquante années après l’Indépendance, il est indéniable qu’ils sont les seuls lieux de loisir et de distraction, voire même de refuge des Algériens. Cette réalité amère se trouve mise en évidence en ce mois sacré. Les gens ne font que tourner en rond toute la journée pour une seule raison: les cafés sont fermés jusqu’à la rupture du jeûne. D’où la question de connaître l’impact des milliards investis par l’Etat dans la construction d’infrastructures dédiées à la jeunesse et aux loisirs en général.
Une autre question mérite aussi d’être soulevée, à savoir aussi que les réflexes innés relèvent de la sociologie et que malgré l’existence de milliers de maisons de jeunes, foyers de jeunes, stades, aires de jeux, Internet, les gens de toutes catégories sociales, n’arrivent pas à se passer du café.
Une virée à travers les villes, les villages de la wilaya de Tizi Ouzou ainsi que les témoignages recueillis renseignent aisément sur ce constat. En ces jours de Ramadhan, la place du café démontre toute son importance.
Les gens déambulent. «Où voulez-vous qu’on y aille. On n’a que la route pour circuler et l’arbre pour se reposer à l’ombre quand on est fatigués», dit Samir, la vingtaine. «Les maisons de jeunes? Il y en a beaucoup. Mais que faire dedans? Il n’y a que les murs et quelques tatamis usés. Non, il n’y a rien à faire dans ces lieux» poursuit son camarade à propos de notre question.
Alors, faute de cafés ouverts, les jeunes se rabattent sur de multiples places. Dans les villes, on les retrouve assis sur les escaliers et autres rebords de trottoirs. «Le café est fermé, alors comme vous voyez, on s’asseoit devant sa porte. Le cyber? Pardon, je n’ai pas de connexion à la maison et dans les cybers c’est trop cher. Je préfère me balader ou, si vous préférez, tourner en rond jusu’au soir», répond un jeune assis parmi une dizaine d’autres devant la porte d’un café fermé.
A défaut de terrasses de café et de cyber, d’autres jeunes se rabattent sur le commerce de fortune d’un de leurs amis. «On préfère rester ici, discuter de tout, histoire de tuer le temps» affirment des jeunes regroupés à proximité de la table de leur ami posée à même le trottoir pour vendre des diouls et pain fait à la maison. Les vieux, quant à eux, se rabattent sur les espaces verts pour ceux qui ont la chance d’habiter des cités qui en disposent.
Les jeux de dominos accompagnent harmonieusement les discussions et les soupirs à propos d’un souvenir des années d’enfance passées au vilage natal. «Mon fils, dans les villes, les vieux sont morts au premier jour de la retraite. Si mes enfants étaient d’accord, je serais en ce moment dans mon village là-haut», nous lance un vieux à Draâ Ben Khedda.
En fait, le village dont nous parle le vieux à Draâ Ben Khedda ne rend plus ses enfants heureux comme jadis. «Nous restons ici à l’ombre de ce caroubier jusqu’à la rupture du jeûne. Où voulez-vous qu’on aille?», nous interroge Youcef, un jeune avoisinant la trentaine. Il était assis sous cet arbre peut-être millénaire en compagnie d’une dizaine d’autres. Dans les villages, en ces temps de Ramadhan, les cigales ont une sérieuse concurrence.
Les insectes chantent en haut et les villageois en bas. Tous les arbres sont occupés pour leur ombre et parce qu’il n’y a pas d’autres lieux où se mettre à l’ombre.
Enfin, ce rythme de vie, un pas dans le passé un autre dans le présent, caractérise les deux espaces urbains, la ville comme la campagne.
Le malaise est le même. La femeture des cafés en ces journées de Ramadhan met en évidence une eloquente incapacité d’évoluer avec le temps et les moyens. Les causes de ce blocage restent à éluder.