Comment se passent le Ramadhan pour vous ?
Personnellement, je retrouve le Ramadhan chaque année avec un très grand plaisir. Je m’y retrouve vraiment car c’est un mois où il ne doit y avoir que des choses positives.
C’est donc positif pour vous de jeûner toute la journée par une journée de chaleur et d’humidité, en plein été ?
Wallah, c’est une question de mental. Tout se passe dans la tête. Que ce soit en été ou en hiver, que les journées soient longues ou courtes, ça dépend de la volonté de chacun.

Oui, mais il y a des métiers physiquement exigeants, comme celle de footballeur. Ça ne doit pas être facile…
Je n’ai pas dit que c’est facile. Je dis seulement que c’est gérable quand il y a de la volonté.
Vous jouez avec autant d’énergie un match en Ramadhan et un autre en dehors ?
Pour ce qui est de moi, il n’y a aucune différence. Lorsque j’entre sur le terrain, j’essaye d’oublier le Ramadhan en me concentrant sur le jeu. Croyez-moi, c’est quand on gamberge trop dans sa tête qu’on ressent les effets du Ramadhan. Que voulez-vous qu’on en fasse ? Qu’on mange ? C’est prohibé par notre religion. De plus, nous, Algériens, sommes des gens de nif. s’il faut jouer à jeun, on doit le faire, un point c’est tout.
Ne nous dites pas que vous appréciez l’époque où les matches se jouaient à 13h !
C’était valable pour les deux équipes car tous les joueurs jeûnaient. Pourquoi alors pleurnicher là-dessus ? Je vous le répète encore une fois : ça se passe dans la tête. Quand on est pratiquant et qu’on a la foi, on ne se pose pas de question : on jeûne et on fait son travail.
Y a-t-il des matches disputés au mois de Ramadhan qui vous ont marqué ?
Incontestablement, il y a eu la finale aller de la Coupe de la CAF de 2002 contre les Camerounais du Tonnerre de Yaoundé. Il n’y a pas seulement le match en lui-même. Il y a eu surtout le f’tour que le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, avait partagé avec nous, joueurs de la JSK, ce jour-là.
Il a mangé le même repas que vous ?
Oui, je le pense. Comme le match allait se jouer dans la soirée, nous avions mangé légèrement pour ne pas s’éloigner des règles d’un repas de sportif de haut niveau. Nous avions donc évité la chorba que nous avions juste goûtée, pour la forme, et nous l’avions remplacée par des salades. Nous avons ensuite, si mes ouvenirs sont bons, enchaîné avec des pâtes.
Et comme boissons, vous aviez bu quoi ?
De l’eau minérale. A trois heures d’un match important, il ne fallait pas prendre le risque de consommer des boissons gazeuses ! Nous avons complété le repas avec des fruits. Un peu plus tard, nous avons pris du thé avec des sucreries. Il y en a qui avaient mangé du qalb ellouz. Comme il fallait faire une provision de sucres et de glucides, c’était permis.
Et au match retour, aviez-vous jeûné ?
Chaque joueur a été laissé libre de jeûner ou de ne pas jeûner. Une fetwa nous avait été délivrée pour manger car nous avions le statut de «moussafer» (voyageur). Moi, personnellement, j’avais jeûné.
Visiblement, vous jeûnez systématiquement durant les matches. Réussiez-vous, au moins, de belles prestations ?
Ah, oui ! D’ailleurs, il y a eu un match que j’ai disputé il y a quelques années avec l’ESS en étant à jeun et où j’avais sorti une très belle prestation. C’était en Ligue des champions africaine contre les Diables Noirs du Congo, à Brazzaville.
Puisque vous dites avoir bien joué, c’est que vous avez gagné ce match…
(Rire) Non, nous l’avons perdu (3-2). Mais j’avais quand même fait un très bon match, l’un de mes meilleurs en Afrique subsaharienne. Vous savez, ça arrive de faire de grands matches sans les gagner.
En évoquant le Ramadhan, il y a aussi cette semaine de stage de préparation avec les Verts avant le match contre la Zambie à Blida, en 2009…
Quel excellent souvenir ! Vraiment, c’est l’un des moments qui ne s’oublient pas dans une carrière. Durant une semaine, nus avions tout fait ensemble : jeûner, rompre le jeûne, nous entraîner et même accomplir nos prières ensemble. Au fait, nous avons même gagné ensemble !
Pour ce qui est des prières, vous étiez le vice-imam, lorsque Boubakeur Cheniouni était indisponible…
Oui, c’est vrai, et c’est aussi un moment que je n’oublierai pas. Je sentais une réelle piété chez les joueurs. D’ailleurs, en dehors des entraînements, nous avions passé beaucoup de moments à parler de l’islam.
Y a-t-il des joueurs à qui vous avez appris des choses sur la religion ?
Oui, mais j’ai également appris, de mon côté, beaucoup de choses de ces joueurs. En fait, c’était un échange fructueux et c’est pour ça que je dis que c’est un moment inoubliable.