C’est une conclusion qui ne va certainement pas plaire aux responsables des télévisions algériennes publiques et privées. La femme serait tout simplement mal vue, mal représentée voire discriminée dans ces médias. C’est ce qui en est ressorti d’une étude menée par la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), en association avec l’ONG Mena Media Monitoring, entre le 28 janvier et le 17 février 2015 et dont de larges extraits ont été publiés par Al Huffington Post Algérie.
Ce rapport présenté aujourd’hui dimanche par Abdelmoumène Khelil, SG de la LADDH, et Nedjaa Amirouche, directeur de programme de Mena Media Monitoring, montre et démontre le chemin qui reste à parcourir à la femme pour se hisser au niveau de l’homme dans les médias audiovisuels. Il met également en lumière les clichés misogynes qui collent à la peau des femmes malgré leurs compétences et leurs talents, souvent non reconnus ou pas suffisamment mis en valeur.
L’étude s’est appuyée sur un suivi d’émissions de quatre radios publiques et de quatre télévisions, dont la chaîne publique A3 et trois chaînes privées, Ennahar, Echourouk et KBC., soit les plus regardées en Algérie.
Au pays de Hassiba et Djamila…
La bonne nouvelle du reste très visible, c’est la quasi-parité entre les femmes et les hommes dans ces médias. On y apprend ainsi que les femmes professionnelles des médias font 42,61% des reportages, elles représentent 55,70% des journalistes envoyées sur le terrain. Les présentatrices (53%) sont plus nombreuses que leurs homologues masculins. Mais cela donne-t-il autant de privilèges et de respectabilité ? Pas vraiment souligne le document. En effet la «visibilité» des femmes dans les médias est jugée «très faible» par rapport aux hommes et ne dépasse pas les 19,10%.
Pis encore, elles héritent assez souvent de sujets dits «légers» de la périphérie alors que les choses «sérieuses, comme la politique et l’économie, sont réservées aux hommes». Appréciez donc ces chiffres qui en disent long sur le «poids» des femmes dans les médias audiovisuels : Sur un total de 14.108 des apparitions des sujets externes, 19,10% seulement sont des femmes. «Une personne seulement sur cinq dont parlent les télés est une femme et une sur sept à la radio».
La femme, un objet pas un sujet
Pour cause, l’étude de la LADDH souligne que les femmes participent «peu aux débats et ne constituent que 21,80% des personnes invitées». Et quand la femme est le sujet central du débat c’est assez souvent pour reproduire des clichés ou pointer sa «faiblesse», lit-on encore dans le rapport.
«Sur un total de 5.750 nouvelles, seulement 160 sont centrées sur des femmes (2,7%), note l’étude qui relève «l’extrême focalisation sur les personnes masculines». Plus généralement les productions médiatiques sont «37 fois moins centrées sur les femmes que sur les hommes», note l’étude. Aussi, est-il précisé que les femmes sont pratiquement «absentes ou très peu visibles» dans les des sujets politiques et économiques (10,05% et 9,86%).
Elles sont pratiquement persona non grata pour les sujets jugés «sérieux». Ces quelques chiffres donnent vraiment froid dans le dos dans un pays qui prétend être en avance en matière de droits de la femme. Ce qui n’est pas tout à fait faux puisque, elles sont tout de même plus d’une centaine de femmes députées à siéger à l’APN, soit le tiers de la composante de l’Assemblée. De même l’Algérie est le premier pays arabe à avoir une femme général de l’armée et une autre plusieurs fois candidate à la présidentielle. Un paradoxe très algérien.