Son climat n’étant pas propice à la production et aux récoltes, l’Algérie est dans l’obligation d’importer une grande quantité de produits alimentaires. Le pays compte grandement sur les importations pour combler la majeure partie de ses besoins en produits agricoles.
C’est dans cette optique d’ailleurs que Abderrahmane Metboul rappelle dans l’une de ses contributions dans la presse nationale que « l’Algérie est un pays semi-aride » avec une productivité agricole « relativement faible ». Aussi les agriculteurs vont-ils surtout vers les cultures spéculatives se détournant des céréales. L’expert économe est allé jusqu’à affirmer, preuve à l’appui qu’il n’existe aucune réelle politique agricole en Algérie.
Le Centre national de l’informatique et des statistiques des Douanes (Cnis) vient conforter la thèse de Abderrahmane Metboul en annonçant une hausse de 59% de la facture alimentaire au premier semestre 2011 : 4,83 milliards de dollars contre 3,02 pour la même période de 2010.
S’agissant des importations massives de céréales ces dernières sont passées de 1,02 milliard de dollars au 1er semestre 2010 à 2,04 milliards durant la même période en 2011, soit une progression de 100%. Sauf que pour le ministre de l’Agriculture, Rachid Benaïssa, tout baigne.
Il indique qu’un tiers seulement des produits agricoles consommés en Algérie sont des produits d’importation. «Il faut savoir que 70% des produits agricoles consommés dans le pays sont produits localement», a-t-il expliqué, lundi, lors d’une émission de la Télévision nationale diffusée au lendemain de son audition par le Président de la République.
Et de poursuivre : «Dans de nombreuse filières agricoles, l’Algérie n’importe plus et a réussi à atteindre l’autosuffisance. Les efforts se poursuivent pour renforcer la capacité de production des autres filières», citant dans ce sens l’exemple des filières pommes de terre et tomates où des résultats très positifs ont été réalisés grâce à la synergie des efforts des pouvoirs publics et des agriculteurs.
Aux dire du ministre «la production annuelle de la pomme de terre a atteint le niveau de 95 kg/habitant en 2010, contre 57 kg/habitant il y a quelques années». L’objectif à atteindre est celui des 108 kg/habitant pour les années à venir.
Paradoxe. La hausse des prix des produits d’une manière générale, des fruits et légumes en particulier est soumise à la loi de l’offre et de la demande. Une question se pose d’elle-même. Pourquoi donc les prix de la pomme de terre se sont envolés depuis l’entame du mois de ramadhan puisque «la production annuelle a presque doublé ?». Il est aussi primordiale de s’interroger de quelles productions agricoles parle le ministre, car faudrait- il le noter, aucune précision n’a été donnée.
Faisant ainsi l’impasse sur les céréales et ainsi que la production de la filière lait, sachant que le volume des importations de la poudre du lait a atteint, à la fin du mois d’avril 2011, les 80 00 tonnes, alors que l’année 2010 s’est soldée par un volume d’importation de 110 000 tonnes, soit le double des importations enregistrées à la même période l’année précédente. Une augmentation d’autant plus inquiétante quand on sait que depuis deux ans, le cheptel bovin laitier est en nette croissance si l’on se réfère au nombre de vaches laitières importées depuis deux ans.
Il dépasse, selon le CNIS, les dix mille vaches laitières. À l’occasion, Rachid Benaïssa s’est félicité des réalisations du secteur de l’agriculture durant l’année 2010 qui était, selon lui «une année importante durant laquelle de nombreux problèmes de base comme le foncier agricole, la difficulté d’accéder au financement et la relation entre les secteurs agricole et industriel, ont été solutionnés».
Par ailleurs, le ministre a estimé qu’une exploitation efficace des terres agricoles nécessite la conjugaison des efforts de l’ensemble des intervenants, ajoutant que «certains milieux ont connu quelques problèmes au début de la mise en application du dispositif de la concession des terres». La superficie des terres mise en valeur s’élève à 300 000 hectares dont environ 60 000 hectares ne sont pas exploités en raison du manque d’eau ou d’électricité, a indiqué le ministre citant des concessionnaires.
À une question sur la menace que constitue la prolifération des constructions pour les terres agricoles, il a expliqué qu’en Algérie la réglementation en vigueur protégeait efficacement les terres agricoles. Interrogé sur la possibilité de fabriquer en Algérie certains produits alimentaires de base comme le sucre, l’huile et le coton, Rachid Benaïssa a affirmé qu’ «il est très possible de le faire car la technologie existe et les infrastructures sont disponibles.
Mais il faut que les investisseurs s’y intéressent et jugent que ce genre d’activité est bénéfique pour eux». «Cela est en train de se produire dans la filière lait qui attire de nombreux investisseurs du fait qu’elle soit rentable», a-t-il ajouté, relevant l’existence d’études de faisabilité sur la production de certains produits de base en Algérie. Concernant la tomate industrielle, le ministre de l’Agriculture a affirmé que l’encadrement des agriculteurs et l’introduction de nouvelles technologies avaient permis de hisser considérablement la production.
Rachid Benaïssa s’est félicité également du «retour en force des jeunes» au secteur de l’agriculture ces dernières années. «Beaucoup de jeunes sont intéressés par le secteur. Il suffit de se rendre aux agences de l’Ansej pour s’en rendre compte», dira-t-il. Autrement dit, tout va bien du côté ministère de l’Agriculture et du Développement rural, car selon toute vraisemblance, le premier responsable du secteur n’a jamais osé une virée dans les marchés.
Farid Houali