L’ancienne gloire, et ancien sélectionneur des Fennecs, Rabah Madjer, porte un regard très critique sur la performance des Algériens lundi dernier contre le Malawi (0-3).
Il remet en cause la préparation effectuée en France, mais espère tout de même des jours meilleurs pour les Verts.
M. Madjer, quel regard portez-vous sur la performance des fennecs contre le Malawi ?
J’avoue être extrêmement déçu comme la plupart des Algériens. On ne s’attendait pas à une telle performance de la part d’une équipe qualifiée pour la Coupe du monde. Surtout que jusque-là elle affichait un visage satisfaisant, qu’elle avait réussi à redonner un certain espoir au public sportif. C’est une grande surprise, on a vraiment du mal à trouver des réponses à cette déroute.
On va justement essayer de trouver des réponses si vous le permettez. Etait-ce selon vous une défaillance tactique ou une faillite individuelle des joueurs ?
Ni l’une ni l’autre, le problème est plutôt d’ordre physique à mon avis.
Pour comprendre cela, il faudrait revoir les conditions dans lesquelles ce match a été préparé. On a vu des joueurs en manque de condition physique, qui avaient du mal à bouger sur le terrain. Le facteur du climat les a incontestablement handicapés. A partir de là, il est clair que c’est la préparation qui a fait défaut. On n’a pas préparé les joueurs à évoluer dans ces conditions. Sans physique, aucune tactique ni technique individuelle ne peut s’exprimer.
Selon vous c’est donc le choc thermique qu’ont subi les joueurs qui explique cette performance ?
Entre autres, oui. La plupart de nos joueurs évoluent en Europe dans des climats froids, surtout à cette période de l’année. De plus, on les prépare en France dans un temps froid et pluvieux. Puis, directement, on les envoie jouer une grosse compétition dans un pays chaud et humide. Dans des conditions pareilles, les joueurs manquent d’oxygène et ont du mal à déployer leurs efforts. On aurait dû prévoir ça !
Donc vous remettez en cause la préparation qu’a effectuée l’équipe d’Algérie ?
Absolument ! Sans vouloir dénigrer le travail mis en place, j’estime que c’est un choix illogique. De plus, je ne me focalise pas que sur l’aspect climatique. Quand je parle de préparation, c’est un tout. Nous avons beaucoup de joueurs qui viennent d’arriver en sélection et qui manquent d’expérience africaine. Beaucoup ne savent pas ce qu’évoluer en Afrique signifie vraiment. On aurait dû leur faire programmer un stage dans un pays limitrophe de l’Angola par exemple, avec un match amical à la clé. Cela les aurait aidés à mieux appréhender ce tournoi.
Pouvons-nous parler d’un défaut de préparation psychologique ?
Il y a une culture des grandes compétitions que l’on a perdue en Algérie. Sur ce point, il ne faut pas oublier que nos joueurs ne sont pas habitués à disputer de phase finale. Notre dernière CAN remonte à six ans, et cette expérience des grands rendez-vous a fait défaut. Nos joueurs ont peut-être oublié que seuls les meilleurs arrivent à ce stade. Jusque-là, ils n’avaient disputé que des phases éliminatoires où l’on retrouve du bon et du moins bon au niveau de l’adversité. Mais une fois en phase finale de la CAN, ce sont les seize meilleures équipes qui sont présentes et l’on se doit de hausser son niveau de jeu. En face, on avait une équipe du Malawi motivée, bien préparée et qui a réussi à battre une équipe algérienne qui, par son statut de mondialiste, est devenue une équipe à abattre. Les Malawites étaient plus forts.
Quels sont les correctifs à apporter selon vous en vue du match contre le Mali ?
Il va falloir que cette défaite nous serve de leçon afin de mieux préparer notre prochain match. Le Mali est une grande équipe pleine de talents, et qui a prouvé contre l’Angola qu’elle a beaucoup de ressources. Considérant à présent que le mal est fait en ce qui concerne la préparation, il va falloir travailler l’aspect du placement. Il faudra faire en sorte qu’on coure le moins possible derrière le ballon, qu’on se dépense le moins possible. C’est comme ça qu’on pourra jouer au mieux pendant 90 minutes, et retrouver notre efficacité offensive et notre imperméabilité défensive.
Pensez-vous que cette défaite aura une incidence sur la Coupe du monde ?
C’est clair que quand on perd contre le Malawi 3 buts à 0, ça amène à se poser des questions sur ce que cette équipe pourra faire en Coupe du monde. Mais si elle arrive à se remobiliser et à jouer avec plus de rigueur, je suis sûr qu’elle saura gagner ses prochains matches. Ensuite, seulement, on pourra dire que cette défaite n’était qu’un incident de parcours.
Pessimiste ou optimiste pour le prochain match ?
Honnêtement, je ne saurais le dire. C’est un match difficile à pronostiquer, et je n’ai pas envie de dire de bêtises. J’espère juste que l’équipe fera un bon match, et que la victoire soit algérienne inch’Allah.
Reda Zinedine (Rédaction Football365/FootSud)