Deux ans à peine après que le groupe Haddad ait pris l’USM Alger, et après une saison de disette l’an dernier, le club a réussi cette saison à remporter deux titres : la coupe d’Algérie et la Coupe arabe. Voulant revenir sur ces deux consécrations et sur toute cette saison, le président Rebouh Haddad a bien voulu répondre à nos questions sans langue de bois et en toute franchise. Entretien.
L’USM Alger a remporté deux titres cette saison, la coupe d’Algérie et la Coupe arabe. Est-ce une surprise ou c’est plutôt logique ?
– Ce n’est ni une surprise ni logique. C’est le fruit du travail. Tout le monde, qu’il s’agisse de la direction, des joueurs, du staff, a bossé dur durant deux ans. Tous les moyens ont été mis en place pour en arriver où nous en sommes aujourd’hui, à savoir remporter deux coupes.
– Comment expliquez-vous le fait que malgré tous les moyens mis en place, vous n’ayez pas atteint vos objectifs en championnat, à savoir le titre ?
– Le titre nous a échappés de justesse cette saison par rapport essentiellement au calendrier. Nous devions jouer sur tous les tableaux, à savoir coupe, championnat, Coupe arabe et coupe d’Afrique, mais nous n’avons pas pu gérer tout cela. De plus, nous sommes un peu l’équipe attendue au tournant, et à chacun de nos déplacements, c’est une finale de coupe. Tous les clubs veulent accrocher l’USMA à leur tableau de chasse…
– Pour rappel, la saison dernière, vous n’avez rien remporté ?
– L’année dernière, nous avons fini 3es à un point du champion, malgré les évènements de Saïda où nous avions eu 13 blessés. Même si nous avons loupé le coche deux fois en championnat, notre plan est à long terme. Ces deux années sont pour moi très positives, car nous avons fait un pas de géant et nous sommes très en avance sur la feuille de route que nous avions établie lorsque nous avons pris le club. 4e ou 5e après deux années seulement, c’est très bien.
– Vous dites travailler à long terme et vous recrutez chaque année énormément de joueurs. N’y a-t-il pas une contradiction dans votre discours ?
– En fait, cette politique de recrutement massif lors des deux premières saisons avait pour but de «lancer la machine». Aujourd’hui, nous ne sommes plus dans un recrutement massif. Nous sommes tournés vers la formation et les jeunes. La meilleure des preuves est que toutes nos équipes des jeunes ont terminé champions. Nous avons un gros réservoir de jeunes, car même si nous avions misé gros sur l’équipe fanion, nous avons aussi mis une grosse enveloppe sur les jeunes, leur détection et leur formation. Et nous en récoltons aujourd’hui les fruits. La meilleure des preuves est qu’avec notre calendrier infernal, nous avons incorporé pas mal de jeunes dans le groupe des pros en championnat.
– Donc, les gros recrutements à l’USMA, c’est terminé, n’est-ce pas ?
– Cette saison, nous allons faire un recrutement plus ciblé sur nos manques, à savoir l’attaque. Le but étant que dans deux ou trois ans, il ne faut plus recruter, mais utiliser que notre vivier de jeunes. Mieux, notre ambition sera de vendre des joueurs aux autres clubs. Le meilleur exemple de notre politique de jeunes, c’est Ferhat, qui a donné pleinement satisfaction. De plus, nous avions 8 joueurs, dont 7 titulaires dans l’équipe nationale U20. Nous n’avons pas lésé les jeunes, la preuve, nous préparons ardemment notre centre de formation qui ouvrira ses portes à Aïn Benian.
– Avez-vous commencé les travaux de ce centre de formation ?
– Non, les travaux n’ont pas encore commencé à proprement dit, car nous avons encore des petits problèmes administratifs à régler. Mais ne vous inquiétez pas, dès qu’on aura toutes les autorisations, ce centre de formation verra le jour rapidement. N’oubliez pas que le BTP, c’est notre domaine.
– Ce grand attaquant que vous comptez recruter, il sera algérien ou africain ?
– Cela dépendra. Algérien ou Africain, peu m’importe. Il faut que l’on ramène des attaquants qui feront la différence. C’est ça le véritable critère.
– Avez-vous un ou plusieurs noms en tête ?
– Pour le recrutement, nous avons laissé ça pour la fin de la saison. Au moment où je vous parle, nous n’avons même pas encore décidé qui nous allions conserver et qui nous allions libérer.
– Ya-t-il une malédiction qui frappe les attaquants de l’USMA ? Ziaya, goleador dans ses anciens clubs, s’est éteint à l’USMA. Pareil pour Gasmi…
– Je ne suis pas d’accord pour Gasmi. C’est un bon joueur au comportement positif. Nous n’avons pas vu le grand Gasmi de Béjaïa, mais je pense que dans les années à venir, il va exploser. Concernant Ziaya, il n’a jamais adhéré à notre système. Andréas s’est blessé et je remercie le ciel que le vieux renard des surfaces, Daham, a fait le travail. Pareil pour Boualem, qui s’est blessé. En ce début de saison, la malchance ne nous a pas épargnés.
– Justement, concernant Boualem, comptez-vous le libérer cette saison, puisqu’il est en fin de contrat ?
– Boualem n’est pas en fin de contrat. Il y a une différence entre la licence et le contrat. Certes, on ne lui a pas signé de licence, mais concernant le contrat, il doit juste être rémunéré régulièrement. Boualem est encore sous contrat avec nous, il lui reste un an. Il y a un climat de confiance entre Boualem et nous, c’est un jeune que j’apprécie beaucoup.
– Daham aimerait bien continuer. Quelle est votre opinion ?
– Daham est toujours sous contrat avec nous, donc la question ne se pose pas. Nous ne sommes pas ingrats avec nos joueurs, la seule chose que nous exigeons, c’est le sérieux.
– Président, comment expliquez-vous vos problèmes au stade Omar Hamadi où on ne vous sent pas à l’aise. Vous êtes meilleur à l’extérieur. Pourquoi ?
– Honnêtement, je ne sais pas. Je ne me l’explique pas. Peut-être à domicile, il y a une pression. L’USMA, c’est l’équipe à battre. Si on gagne, c’est normal, ou alors qu’on a acheté l’arbitre. Et si on perd, on nous critique en disant que nos investissements ont été jetés par les fenêtres et que nous ne savons pas gérer. C’est sans doute tout ça qui a agi sur le moral des joueurs. Nous sommes critiqués quoi qu’il se passe. Mais il y a un bon groupe de joueurs unis.
– Lors des deux finales, cela s’est vraiment ressenti. Les joueurs ont joué avec cœur. Comment expliquez-vous ça ?
– En fait, il fallait un déclic, et la finale de coupe d’Algérie a été ce déclic. Les joueurs ont tout fait pour remporter ces trophées, et Incha Allah, ces deux victoires en coupe marqueront le véritable départ de l’USMA.
– Qu’avez-vous dit à vos joueurs la veille de la finale, car ils avaient perdu 4 fois face au MC Alger quand même ?
– Je n’ai dit qu’une chose à mes joueurs, ne faites aucune déclaration. Ne répondez pas à la provocation, laissez-les parler et donnez leur la réponse sur le terrain, car c’est là que tout se décide. Sinon, nous avons mis toutes les chances de notre côté sur le plan psychologique et médical. J’ai même fait appel à un kiné ostéopathe de l’étranger. J’attendais ce match depuis le match retour de championnat face au Mouloudia, et grâce à Dieu, on a donné la réponse sur le terrain. Je voulais les affronter en finale pour vraiment leur montrer notre valeur.
– Une première victoire et face au Mouloudia en plus. C’est bon pour le moral, non ?
– Oui, une victoire en coupe d’Algérie, après un bon match et une cerise sur le gâteau face au MC Alger qui nous avait déjà battus quatre fois. Je ne pouvais rêver mieux. Nous avons battu notre bête noire et nous avons vaincu le signe indien. Nous les avons matés d’une manière professionnelle qui a remis les compteurs à zéro.
– N’avez-vous pas faussé le championnat en affrontant le MCO par exemple avec les espoirs ?
– Notre but n’était pas de fausser le championnat, mais de répondre légalement au calendrier infernal qui nous a été proposés. Je vous dis que si l’équipe première avait joué tous les matchs, nous aurions perdu la Coupe arabe. Le championnat, on l’a perdu à Saoura à domicile et contre Chlef. Arrivé au match du MCO, le championnat était déjà plié…
– Vous n’avez cessé d’évoquer ce calendrier cette saison ?
– Jouer tous les trois jours, c’est trop. Les joueurs sont humains, ils ont besoin de repos. De plus, face au MCO, nous n’avons aligné que 3 espoirs. Les autres joueurs étaient des remplaçants, mais ils sont de bons joueurs. Tout le monde dit que notre effectif est riche, et aujourd’hui, on dit que c’est l’équipe B. Et même avec cette équipe là, nous avons fait de grands matchs, nous n’avons pas eu de chance, c’est tout. Nous n’avons jamais voulu fausser le championnat.
– Vous l’avez dit, l’USMA a d’énormes moyens. Et à côté, il y a El-Harrach qui en manque cruellement. Malgré cette différence de budget, El-Harrach joue la deuxième place. Comment l’expliquez-vous ?
– Le championnat est à l’image de la société algérienne. Certains vivent dans des bidonvilles et d’autres dans des villas de luxe. Et il arrive fréquemment qu’un enfant des bidonvilles soit plus fort à l’école qu’un enfant issu des quartiers chics. (Rires) Non, plus sérieusement. La différence entre El-Harrach et nous, c’est que pendant que nous jouions sur les 4 tableaux, eux ne se concentraient que sur le championnat. De plus, M. Charef est là bas depuis plus de cinq ans et il fait un excellent travail dans la continuité. Il y a la stabilité et un fond de jeu. N’oublions pas que l’USMH est une école de football reconnue et tous les joueurs ont grandi ensemble. Nous ne sommes là que depuis deux ans, et dans 5 ans, Incha Allah, nous serons comme eux.
– Vous ne pensez être champion que dans 5 ans, pas dès l’année prochaine ?
Incha Allah, pourquoi pas.
– Comment gérez-vous tous ces égos. N’y a-t-il pas de frictions entre des joueurs habitués à être titulaires ? Par exemple Maïza et Ziaya où ça ne s’est pas très bien passé.
– Si le football algérien ne comptait que 25 bons joueurs, nous serions champions d’Algérie et tous nos joueurs seraient en équipe nationale. Ce n’est pas le cas. Donc, vous voyez bien que tous les meilleurs joueurs ne sont pas chez nous. Nous n’avons pas de grands joueurs. Sinon, nous les aurions vendus au Real Madrid, au Barça ou au PSG, ça c’est un grand joueur. Nous n’en avons pas. Concernant les cas Maïza et Ziaya, je vous répondrai juste que lorsqu’on signe une licence chez nous, on ne signe pas une licence de titulaire. Celui qui n’accepte pas les choix de l’entraîneur se met sur le côté et laisse les autres travailler.
– Ziaya souhaite une résiliation à l’amiable. Vous en pensez quoi ?
– C’est ce qu’il souhaite comme vous dites. Le jour où il passera devant la commission de discipline, il connaîtra son sort, car son sort dépend de la commission de discipline. Ils n’ont pas encore tranché, car, moi, je ne me mêle pas des prérogatives de certains. Chacun son job. Ici tout est fait dans les règles de l’art.
– Zemmamouche a déclaré dans la presse qu’il voulait quitter l’USMA. Etes-vous surpris ?
– Franchement, la presse de chez nous, même si je respecte cette corporation, des fois, certains journalistes disent n’importe quoi. Si Zemmamouche a déclaré cela et qu’il décide de partir pour l’étranger, je le libère. Si c’est pour l’Algérie, je ne pense pas qu’il quitte le luxe dans lequel il se trouve pour partir ailleurs. Je l’ai toujours soutenu lorsqu’il a eu des problèmes. Il est en fin de contrat et je souhaite qu’il reste. C’est un brave garçon qui a toutes les qualités, mais je ne peux pas le retenir.
– Courbis a dit qu’il en avait marre de se faire insulter et qu’il réfléchirait à deux fois avant de prolonger. Qu’allez-vous lui dire pour qu’il reste ?
– Dans notre pays, malheureusement, le stade rime avec les insultes. Les gens insultent au stade et vont prier ensuite. C’est incompréhensible. Je lance d’ailleurs un appel à tous les supporters pour arrêter d’insulter Courbis ou un autre. Courbis est payé et se fait insulter. Moi, je mets de mon argent personnel et je me fais insulter par des gens qui ne payent même pas leur ticket. Concernant Courbis, nous devrions nous mettre à table en fin de saison. Et en fin de saison, nous discuterons, puisque le championnat n’est pas fini. Moi, je souhaite qu’il reste pour travailler dans la continuité, mais s’il ne souhaite pas rester, je respecterai son choix.
– Pourquoi vous avez déclaré que pour la saison prochaine, le championnat et la Coupe arabe seront la priorité de l’USMA ? Pourquoi faire l’impasse sur la coupe d’Afrique qui est pourtant plus prestigieuse, est-ce un manque d’ambitions de votre part ?
– Mes propos n’ont pas été compris. Moi, je veux qu’on se focalise sur le championnat l’année prochaine pour jouer la Ligue des champions africaine. Nous ne voulons pas jouer la coupe de la CAF et prendre le risque de manquer une place pour la Ligue des champions l’année suivante. La Coupe arabe, ce n’est que 8 matchs, c’est jouable. Voilà mon plan, la coupe d’Afrique, oui, mais la Ligue des champions.
– Quelle est la prime de la Coupe arabe que toucheront les joueurs ?
– 600 000 dollars à partager entre les joueurs, le staff et tous ceux qui ont contribué à ce titre.
– Saïd Allik vous a félicité. Vous en pensez quoi ?
– On me félicite parce que j’ai gagné. Et je suis conscient que si nous avions perdu, on me serait tombé dessus. Mais je suis bon prince et je remercie tous ceux qui ont soutenu l’USMA, y compris M. Allik. Et ceux qui veulent briser le projet USMA, Allah yahdihoum.
– Un dernier mot ?
– Je dédie ces deux coupes à mon père et mon frère Allah Yarhamhoum et aux supporters de l’USMA. Je leur demande de nous soutenir dans les bons et mauvais moments, car les joueurs sont humains.
A. H. A.
«On ramènera 2 ou 3 joueurs qui feront la différence»
«Notre politique à présent, c’est de lancer nos jeunes»
«Notre centre de formation à Aïn Benian ouvrira bientôt ses portes»
«Faux, à l’USMA, il n’y a pas de grands joueurs»
«Cet été, nous ne renforcerons que notre attaque»
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«Cette victoire face au MCA a remis le compteur à zéro»
«La commission de discipline tranchera bientôt sur le cas Ziaya»
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«Zemma ne quittera pas le luxe de l’USMA pour un autre club algérien»
«Gasmi va exploser, j’en suis sûr»
«Boualem ne partira pas, il est sous contrat»
«Daham restera avec nous, car nous ne sommes pas ingrats»
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«Courbis, je souhaiterais qu’il reste, mais s’il décide de partir, je respecterai»
«Lui est payé et se fait insulter, moi je paye de ma poche et on m’insulte»
………….
«Les 2 trophées constitueront notre vrai départ»
«Voilà pourquoi je choisis la Coupe arabe et non la CAF»