Autrefois, l’enseigne de la salle de cinéma Nedjma ensoleillait à, elle seule, l’escalier de la rue Mustapha-Hadjadj qui est adjacent à la rue Arbadji-Abderrahmane (ex-Marengo) dans la Basse-Casbah. Aujourd’hui qu’elle est éborgnée par l’incivilité de l’homme et de l’affront de l’oubli, l’ancienne rue Gagliata s’emmaillote dans la pénombre où l’a laissée l’adepte de l’ignorance.
À telle enseigne que le visiteur n’a plus d’yeux pour Nedjma qui gît isolée derrière le hideux rideau de fer. Non que le visiteur est indifférent à Nedjma. Que nenni ! Mais c’est parce qu’il est difficile de croire qu’il y avait là, le cinoche d’une “houma” avec sa poésie et sa convivialité. Et depuis, ce cinoche du “Ya ouled” d’hier, s’élime de ses pierres, de sa chaiserie mais aussi de son écran.
Si tant d’amas de vestiges qu’il se fredonne aux alentours l’air Sur l’écran noir de mes nuits blanches (1962) de Claude Nougaro (1929-2004). Mais comment en est-on arrivé là ? Alors que pour le Casbadji, Nedjma et la musique chaâbi roulaient sur le même tandem. Mieux, sinon que l’historique du cinoche est buriné au fronton mémoriel de la Casbah d’Alger sous le label de “Houmat Nedjma”.
Pour le souvenir, l’endroit a été immortalisé dans une séquence du film La bataille d’Alger (1966) de Gillo Pontecorvo (1919-2006) lorsqu’un essaim de gamins taquinaient un ivrogne qu’avait incarné le regretté Ahmed Ayad dit Rouiched (1921-1999). D’ailleurs, c’est en ce lieu de loisirs mais aussi d’évasion que le “ya ouled” s’était familiarisé au genre péplum avec le titre de légende Maciste l’homme le plus fort du monde (1961) d’Antonio Leonviola (1913-1995) et le western Rio Bravo (1959) de Howard Hawks (1896-1977).
Seulement, et au-delà du rêve que procurait Nedjma, il y a eu l’inattendu scénario burlesque d’élus locaux de la Casbah de loger en 1990 les sans-logis dans l’orchestre et le balcon de Nedjma d’une capacité d’accueil de 200 places. Alors, peu importe que Nedjma ait dégringolé d’un statut de salle de spectacle au rang peu reluisant d’un centre de transit, l’essentiel est d’avoir satisfait au populisme de mauvais aloi. D’où le chaos qu’a engendré le “guet-apens” de ces ronds-de-cuir de la mairie de transformer Nedjma en un centre de transit.
Certes qu’il y a eu aussi le projet de la direction technique de l’APC Casbah d’embellir Nedjma en 2007, si ce n’est que l’intention a été vite étouffée dans l’œuf au motif que l’appel d’offres a été infructueux (sic), c’est ce qu’avait déclaré le P/APC de l’époque. Alors, et sachant que la Casbah souffre d’une carence en matière d’infrastructures de loisirs, n’est-il pas temps de relancer l’ébauche ?
Ne serait-ce que pour offrir un centre culturel que la Casbah n’a pas. Alors, pourquoi ne pas essayer cette fois-ci ? D’autant plus que c’est le même président d’APC qui est revenu aux affaires de la vieille médina. Autre argument, la faisabilité de l’affaire est d’autant plus aisée, étant donné que Nedjma est située dans l’îlot du secteur sauvegardé de la Casbah d’Alger et donc, intégrée dans le plan permanent de sauvegarde et de mise en valeur de la Casbah d’Alger.
Louhal Nourreddine