Qui fait courir le Gouvernement ?

Qui fait courir le Gouvernement ?

vote-a-l-apn_859019_679x417.jpgC’est au moment où on décrétait que l’assemblée était en vacances qu’elle est sollicitée par le gouvernement pour expédier une batterie de textes de Lois ; une sollicitude en plein mois de ramadhan qui ne manque pas de susciter des interrogations dans la mesure où certaines Lois appellent un examen en profondeur.

Pas moins de six projets de Loi sont, en effet, programmés pour adoption ce lundi : Le projet de loi portant promotion de l’investissement, deux ordonnances relatives à l’obligation de réserve imposée aux retraités de l’armée et aux réservistes, la loi relative aux commissaires-priseurs, la loi portant règlement budgétaire et enfin la loi régissant les relations entre les deux chambres parlementaires et le gouvernement. D’autres projets qui ne manquent pas d’intérêt, comme la Loi relative au régime électoral et à la haute instance pour l’organisation des élections, sont en débat en plénière depuis dimanche. Cette célérité semble avoir pris de court même les députés de la majorité dont un bon nombre a préféré déserter les allées de l’assemblée. Non seulement, les parlementaires n’ont pas suffisamment de temps pour débattre en profondeur les textes de loi en question, ballotés entre les contraintes du ramadhan, le travail en commission et les plénières, mais beaucoup, du moins au sein des partis majoritaires le RND et le FLN, ont laissé l’impression, après la désertion de jeudi, qu’ils redoutent de s’impliquer et à prendre parti. En d’autres termes : certains textes de Lois, comme ceux imposant l’obligation de réserve aux officiers en retraite sont, aux yeux de la plupart des députés, « énigmatiques » car ils les invitent non pas à faire front contre l’opposition mais à prendre parti dans un antagonisme interne au système.

Et l’appel de l’ancien ministre de la défense, ancien chef d’Etat-major de l’armée, Khaled Nezzar appelant les députés à ne pas voter les deux textes en question n’est pas pour clarifier les débats, aux yeux de certains députés, si prompts à se ranger du côté du plus fort. Pour l’opposition, en revanche, cette cascade de Loi est un « coup de force » qui obéit à un agenda visiblement bien ficelé. «A l’approche des élections législatives de 2017, le gouvernement est entrain de baliser le terrain. Il a mis en place un dispositif législatif qui lui permet d’agir en toute quiétude aussi bien sur le terrain politique, à travers des élections bien ficelées sans aucun contrôle et sur le terrain économique avec des décisions aux conséquences douloureuses pour les citoyens. Il ne peut pas prendre le risque d’attendre la rentrée sociale. Le mois de ramadhan et le début de l’été constituent des moments propices pour faire passer tous les textes liberticides, en profitant de l’absentéisme et du désintérêt des uns et de la vulnérabilité des autres. Les députés n’ont pas le temps d’aller au fond des textes, ni d’en étudier la forme pour relever les articles les plus pernicieux», ont relevé certains députés.

Plusieurs partis d’opposition représentés au parlement se sont d’ailleurs regroupés dans l’espoir d’arrêter une démarche commune face à ce qui s’apparente à un rouleau compresseur du pouvoir exécutif. Mais sans trop d’illusion probablement : hormis la dénonciation, ils n’auront pas les moyens de changer la donner face au poids de la majorité. «Il nous semble inutile de nous attarder dans la dénonciation répétitive et stérile d’un système de fraude, dont les instruments résident essentiellement en amont dans la dépolitisation brutale de la société, le contrôle du fichier électoral et le dispositif d’intimidation de l’électorat et des candidats», a admis le chef du groupe parlementaire du FFS. «Quand le pouvoir viole les lois et utilise les deux poids deux mesures dans l’application du droit en fonction des allégeances, il devient le premier pourvoyeur de désordre dans le pays», accuse-t-il. S’il est vrai que certains textes de Loi inspiré essentiellement par le FLN, étant majoritaire au gouvernement, visent à lui baliser le terrain en perspective des législatives, il reste que la promptitude avec laquelle l’assemblée est saisie, la nature d’autres textes laissent suggérer que des scénarii se mettent en place pour un enjeu plus important, celui de la succession. Tout indique que le temps presse pour l’exécutif.

Sofiane Tiksilt