Qui est derrière la création de l’état de L’azawad? Sahel: Danger imminent

Qui est derrière la création de l’état de L’azawad? Sahel: Danger imminent

La carte géostratégique du Sahel sera chamboulée

Il sagit de savoir quel comportement adoptera ce nouveau voisin de l’Algérie par rapport aux questions sensibles qui marquent cette région.



L’Algérie suit avec un intérêt particulier ce qui se passe à sa frontière avec le Mali. L’annonce, par les rebelles touareg, de la création d’un Etat Azawad en rajoute une couche à une situation déjà très confuse dans cette région longtemps placée sur un véritable volcan sécuritaire. Les conséquences sont nombreuses. La carte géostratégique du Sahel sera chamboulée et le principe de l’intangibilité des frontières héritées du colonialisme sera sacrifié. Qui est derrière la création de cet Etat? Mais ce n’est pas la seule interrogation puisqu’il s’agit de savoir également quel sera le comportement de ce nouveau voisin par rapport à l’ingérence étrangère, au terrorisme et à Al Qaîda aux frontières?

Depuis le coup d’Etat du 22 mars, la situation est très confuse au Mali où plusieurs forces armées rivales sont en présence. Ce sont, entre autres, la junte, qui a pris le pouvoir à Bamako, la rébellion touarègue, qui poursuit son offensive dans le nord du pays, les groupes islamistes affiliés à l’organisation terroriste Al Qaîda au Maghreb islamiste (Aqmi), et l’armée régulière, fidèle au président sortant Amadou Toumani Touré, qui est en repli. Mais aussi et surtout, des forces opérant dans l’ombre, liées aux services spéciaux occidentaux. Des spécialistes des questions sécuritaires s’accordent à dire que ce qui se passe, aujourd’hui, était prévisible. Ainsi, des spécialistes des questions géostratégiques s’interrogent: comment se fait-il que le Mali, présenté jusqu’ici comme un exemple de démocratie, qui s’apprêtait à célébrer, le 26 mars dernier, le 21e anniversaire de la révolution soit, confronté à un putsch? Un coup d’Etat aussitôt réprouvé, quasi unanimement, par les opinions africaines. Un putsch d’autant plus incompréhensible que ses auteurs semblaient l’avoir commis avant même d’en concevoir les termes de sa justification…En effet, comment expliquer un coup de force à 5 semaines d’une élection présidentielle? Comment comprendre la logique de cette action dirigée contre un chef d’Etat en fin de mandat et qui n’était pas candidat à cette future présidentielle, prévue pour fin avril? C’est dire à l’évidence que le Mali, occupant le coeur du Sahel, abrite une sorte de guerre froide depuis plusieurs années. Il est devenu le centre de guerre d’intérêts géostratégiques, animés et maintenus par les garants de la «sécurité», qui sont responsables et à l’origine du climat d’insécurité qui y règne. La confuse situation au Mali répond donc à une logique machiavélique, qui menace tout le Sahel: «Il faut qu’il y ait de l’insécurité volontaire pour que l’on cède le passage aux grands de l’insécurité.» Après le Mali, le deuxième plus vaste pays d’Afrique de l’Ouest, le Niger, se trouve menacé de désintégration. L’on peut s’étonner du silence assourdissant qui y sévit. Ainsi, avec la chute de Tombouctou, Gao et Kidal les trois capitales administratives du nord du pays, les rebelles du Mnla contrôlent environ la moitié du territoire, au terme d’une avancée foudroyante de trois jours. Pourtant, c’était justement pour éviter ce scénario que la junte avait renversé le 22 mars le président Amadou Toumani Touré, l’accusant d’avoir été incapable d’endiguer l’offensive touarègue depuis janvier. Autrement dit, pourquoi la junte militaire n’a pas lancé, comme sa principale priorité, une offensive décisive contre cette rébellion qui menace l’unité territoriale du pays, on en faisant son cheval de bataille pour la destitution d’ATT? Alors que, d’un point de vue formel, le coup de force du 22 mars devient évanescent, le Mali se trouve divisé, entre le Nord où flotte aujourd’hui le drapeau du Mnla, et un «pouvoir central» à Bamako devenu ectoplasmique ou, à tout le moins, saugrenu…

L’ombre de la France plane sur le Mali

Mais, dans ce dossier malien, l’affaire n’est pas aussi simple… Pour les dirigeants membres de la Cedeao, le désamorçage de ce putsch apparaît, ce 1er avril, comme un intermède vacancier, face à un autre péril, bien plus inquiétant, et qui se déploie, comme un éclair depuis le putsch du 22 mars: la rébellion touaregue du Mnla.

Le 30 mars, une semaine après son putsch, le chef de la junte, en désespoir de cause, avait lancé un appel à l’aide étrangère pour la sauvegarde de l’intégrité du territoire malien. A ce sujet, le chef de l’Etat ivoirien Alassane Ouattara, installé il y a quelque mois à son poste grâce au soutien militaire de la France, a annoncé lundi à partir du Dakar que «la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a décidé de la mise en place immédiate de sa force militaire d’attente». S’ensuit la déclaration du ministre français de la Coopération, Henri de Raincourt, sur Radio France Internationale (RFI), qui met en évidence la position française quant à la situation prévalant au Mali. «Nous souhaitons que les rebelles du Mnla, qui ont lancé le mouvement, ne soient pas débordés par les uns et par les autres. Que ce soit eux avec lesquels on puisse engager les contacts nécessaires pour mettre sur pied un cessez-le-feu de toute urgence, et engager les négociations et discussions entre les uns et les autres», a-t-il indiqué. Pour ce qui est de la collusion des groupes terroristes, il est à signaler a priori et les Touareg eux-mêmes s’acharnent à le dire et redire: «Il n’y a pas de lien entre Aqmi et les rebelles touareg.»

A ce propos, Pierre Boilley, chercheur au Centre d’études des mondes africains (Cemaf) a expliqué: «Il n’y a pas de lien non plus a priori entre les populations touarègues, les Maures etc. et Aqmi est vraiment un corps étranger, enkysté dans la région depuis 2007.» Ce fin connaisseur du Sahel a également indiqué qu’il existe certes, des «mariages» entre Targuis et Maures, mais malgré tout, en général on estime que les Touareg et les Maures ne sont pas des terroristes, relevant que l’Islam qui est pratiqué dans ces régions n’est pas salafiste et qu’a priori, il ne faut pas faire d’amalgame.

Et le chercheur de s’interroger: «Pourquoi l’armée malienne s’est déployée largement contre quelques centaines de Targuis, qui effectivement attaquent des villes, mais elle ne s’est absolument pas déployée contre Aqmi?» Dans le même contexte, le porte-parole du Mnla, Hama Ag Sid’Ahmed, dans une récente interview accordée au journal La Tribune de Genève, est catégorique, les Touareg veulent chasser de leur territoire l’armée et Al Qaîda, qu’ils accusent de collusion. «Les Touareg restent le seul rempart possible à l’expansion d’Aqmi. Ils ont, bel et bien, avant la rébellion, dénoncé et alerté l’opinion régionale et internationale sur les relations directes et douteuses existant entre officiels et des chefs terroristes», a-t-il expliqué, soutenant que les négociations conduites dans l’ombre pour la libérations des otages occidentaux détenus par les terroristes au Sahel, en l’occurrence au nord du Mali, en sont une preuve, qu’aucune personne ne peut contester. Il reste que maintes interrogations subsistent quant au pourquoi d’un putsch qui, loin de clarifier la donne malienne, n’aura fait que compliquer la situation et induit la confusion ouvrant la porte à toutes les interprétations.