Qu’en est-il dix ans après?

Qu’en est-il dix ans après?
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grâce aux dispositions de la Charte sur la paix et la Réconciliation nationale, plus de 6000 terroristes se sont rendus dans les mois qui ont suivi son application.

Six ans après son élection, le président de la République annonçait le 15 août 2005 un référendum portant sur un processus de loi sur la Charte et la Réconciliation nationale. Cette Charte qui intervient après l’adoption de la loi sur la concorde civile, a permis «l’absolution définitive des islamistes non incriminés, l’atténuation des peines qui écarte la peine capitale et la perpétuité à condition qu’ils se rendent aux autorités dans un délai de six mois après la promulgation de la loi».

La charte intervient, cependant, pour «interdire l’activité politique à ceux qui ont instrumentalisé la religion pour l’utiliser à des fins de prise du pouvoir par la violence». Sont donc exclues du bénéfice des dispositions de la Charte «les personnes détenues condamnées définitivement pour avoir commis ou qui ont été les complices ou les instigatrices de massacres collectifs, de viols ou d’utilisation d’explosifs dans les lieux publics». 10 ans après sa promulgation, la Charte a permis le retour à la paix, le développement économique et une émergence de la société, même si celle-ci est encore relative. Néanmoins, grâce aux dispositions de la Charte sur la paix et la Réconciliation nationale, plus de 6000 terroristes se sont rendus dans les mois qui ont suivi son application. Ils étaient nombreux à avoir souligné en exclusivité à L’Expression que leurs leaders les avaient trompés. Ce fut en mars 2006.

Ils se sont confiés sans condition à nos quotidiens pour exprimer leurs regrets, leur misère et surtout leur volonté de se rattraper et réintégrer la société. Ceux-là étaient dans les maquis de Skikda, où se concentrait le plus grand nombre de terroristes après Jijel. Il s’agit entre autres d’Abdelmadjid Broche alias Ikrima. Il a 36 ans. Il était descendu du maquis, après l’adoption des textes de loi portant sur la Charte pour la paix et la Réconciliation nationale. C’est grâce à des personnes crédibles et dignes de confiance que sa rencontre avait été possible, à Skikda.

LG Algérie

Il nous a parlé du maquis, des groupes armés et des interminables luttes intestines entre les factions rivales. A l’époque il nous avait été impossible de croire qu’il s’agissait bien de l’émir Ikrima, chef de katibet Er-Roûhb (la terreur), ex-katibat «Chouhada» (les martyrs) qui a fait tant parler de lui dans la région de Skikda, Collo, El Ancer. Mesurant à peine 1,60 m, on croyait difficilement qu’il avait été, durant 13 ans à la tête d´un groupe de plusieurs dizaines d´éléments, puis réduit à 28 membres. Inutile de rappeler son passé douloureux et comment qu’il a rejoint les maquis. Son histoire ressemble à celle de beaucoup d’autres jeunes qui ont été trompés à l’image de ces quatre terroristes qui se sont rendus avec armes et bagages 48 heures après la parution de l’entretien avec leur émir. C’est un afflux de repentis qui sera enregistré par la suite dans différentes région du pays.

On estime que «la Réconciliation nationale a été appliquée à 85%», avec la reddition en 2013 de 25 terroristes contre 23 en 2014 dans les wilayas concernées par ces redditions lesquelles sont Illizzi, Adrar, Tlemcen, Skikda, Jijel et Bouira. Un nombre qu’il faut ajouter aux 15 000 repentis comptabilisés jusqu’au 9 décembre 2014. Le nombre est appelé à être vu à la hausse car la lutte contre le terrorisme se poursuit, notamment suite au climat d’insécurité dans les pays voisins conjugué à des crises politiques.

Cela dit, il reste encore des dossiers en suspens pour ne pas dire à la traîne: «Celui des terroristes qui se sont rendus après l’expiration des délais», sachant que «les dispositions de la Charte pour la paix et la Réconciliation nationale n’attribuent pas d’indemnités directes aux repentis». Dans ce sens on propose au chef de l’Etat «de décréter l’amnistie en faveur des 140 détenus jugés par les tribunaux spéciaux et militaires». Le processus de la Charte pour la paix et la Réconciliation nationale n’a pas exclu de ses textes les familles de terroristes abattus par les forces de sécurité dont le nombre s’élève à 16.200. Elles ont reçu des indemnisations dans le cadre du Fonds de solidarité nationale dédié aux victimes du terrorisme.

Selon le président de la cellule d’assistance juridique aux victimes de la tragédie nationale, maître Merouane Azzi, «les familles des terroristes abattus par les services de l’ordre dans le cadre de la lutte contre le terrorisme bénéficient de montants allant de 1,4 million à 1,7 million de dinars», a-t-il déclaré à un quotidien national, précisant que «cette indemnisation est prévue par les dispositions de la Charte pour la paix et la Réconciliation nationale».

A ce jour on estime le nombre de personnes ayant été victimes des violences terroristes étudiées par les autorités s’élève à 41.000.

Dans le cadre du dixième anniversaire du déclenchement du processus de paix en Algérie, l’assistance judiciaire pour l’application de la Charte pour la paix et la Réconciliation nationale s’apprête à remettre au président de la République un rapport global sur les activités de la cellule.

C’est encore Azzi Merouane président de cette structure qui avait déclaré avant-hier «il s’agit d’un rapport final et global sur les activités de la cellule depuis sa création (juin 2006- juin 2015). Il contient aussi un nombre de suggestions pour consolider les acquis de la Charte pour la paix et la Réconciliation nationale».

Azzi Merouane s’exprimait lors d’une conférence au forum d’un autre quotidien animé conjointement avec le président de la Commission nationale consultative pour la protection et la promotion des droits de l’homme (Cncppdh), Farouk Ksenini.

Lors de cette conférence il a été question de proposer des recommandations «à la lumière des séances d’écoute menées à travers le territoire national depuis 2006».

Relativement à cette initiative, Azzi a fait savoir que «ces suggestions concerneront, entre autres, la révision de l’indemnisation des victimes du terrorisme, le statut des enfants nés dans les maquis, l’indemnisation des personnes ayant subi des dégâts matériels et économiques durant la période de la tragédie nationale ainsi que ceux qui étaient détenus dans le sud du pays». Le même conférencier a jugé nécessaire d’attester qu’ «il n’y a jamais eu de vengeance ou de règlement de comptes», par contre, il vantera «l’ancrage de la culture de la concorde, de la tolérance et du pardon».

Le président de la Commission nationale consultative pour la protection et la promotion des droits de l’homme (Cncppdh), Farouk Ksenini, souligne que le processus de paix portant sur la Charte et la Réconciliation nationale est irréversible et doit être appliqué dans toutes ses dispositions, n’écartant pas un chemin vers une amnistie générale, une décision qui revient au chef de l’Etat. En marge de toute autre considération, objective ou subjective, négative ou positive, le constat nous amène à reconnaître que le processus de paix a depuis sa promulgation permis le retour à une vie normale, dans les écoles aux sourires longtemps effacés du visage des Algériens, au développement, même si la société souffre d’un manque de confiance il n’en demeure pas moins que l’Algérie revient de très loin.

Non seulement avec la Charte pour la paix et la Réconciliation nationale, mais aussi avec la loi de la concorde civile et la loi sur la Rahma qui avait été initiée par l’ex-président de la République Liamine Zeroual qui a également joué un rôle primordial permettant la reddition de centaines de terroristes.