Quel rôle pour le nouveau parlement ?

Quel rôle pour le nouveau parlement ?
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Le constitutionnaliste et doyen de la faculté de droit d’Oran, M. Bachir Chaouche Yelles, estime que le député est non seulement doté d’un pouvoir législatif, mais également d’un pouvoir de contrôle sur l’Administration. «En réalité, le Parlement dispose d’énormément de pouvoirs, mais, dans tous les pays où l’exécutif est issu de la même majorité que le Parlement, toute proposition de loi est adoptée sans grande difficulté, ce qui donne cette impression de faiblesse du Parlement», explique M. Bachir Chaouche Yelles sur les ondes de la radio nationale Chaîne III.

Cependant, cette forme de solidarité n’est pas nécessairement négative, selon lui, et peut même aider à faire avancer la bonne gouvernance, à condition qu’il y ait en face une réelle opposition capable de la contrecarrer.



La constitutionnaliste estime, par ailleurs, que même l’adoption d’un régime parlementaire ne changera pas la situation actuelle tant que la composante de l’exécutif et du Parlement est issue de la même majorité politique. «Actuellement, nous sommes devant la concentration du pouvoir au sein d’une seule force politique, ce qui constitue un avantage et  un inconvénient à la fois puisque cette force aura à assumer seule toute la responsabilité», explique-t-il en arguant que  le FLN dispose d’une majorité relative qui peut évoluer vers une majorité absolue, dès que plusieurs députés indépendants et d’autres formations ont exprimé le vœu de rejoindre les rangs de ce parti. Mais faut-il noter que la majorité absolue, soit 50% des sièges +1,  n’est nécessaire que pour le vote des lois organiques et, de fait, la majorité relative est déjà largement suffisante.  M. Yelles fait remarquer, à ce titre, la nécessité de disposer d’une opposition à la prétention d’accéder au pouvoir : «L’opposition algérienne doit se restructurer et avoir une stratégie d’accéder au pouvoir.»

Plus loin, le constitutionnaliste revient sur la création des nouveaux partis, qui s’est effectuée au moment des élections, pour expliquer les résultats des dernières législatives :

LG Algérie

Le professeur en droit conseille à l’opposition de se constituer en alliances pour créer un pôle capable de peser face à la majorité et pour se préparer pour les prochaines élections et pouvoir influencer les résultats.

“Le boycott n’aura aucune incidence sur la 7e législature”

Le vote à la proportionnelle ne pousse pas les partis faibles à coaliser et, du fait, il  profite beaucoup plus aux partis jouissant de la majorité, selon lui.

«Contrairement au scrutin nominal qui pousse les candidats vers des alliances, sans quoi ils ne peuvent pas se faire élire, le système proportionnel fait que les petits partis mènent la bataille en solo, et, au final, ils ne pèsent pas grand-chose au Parlement. Le vote nominal est plus simple, il limite certes le nombre de partis élus puisqu’il se base sur le nombre de voix d’électeurs obtenu, mais permet  une bien meilleure représentativité.»

En outre, la décision prise par 14 partis de boycotter leurs activités au sein du nouveau parlement sera, de son avis, sans grande incidence et ne remettra en cause en aucun cas la légitimité de la 7e législature, tant que ces formations n’ont pas décidé de se retirer ou de démissionner.

Il informe que sur le plan juridique, le boycott ou le gel d’activité n’ont pas de signification et ne pèseront pas lourd sur le fonctionnement du Parlement, et ce vu le nombre infirme des boycotteurs.

En la décision prise d’interdire aux députés le cumul de fonction avec leur mandant, à quelques exceptions près pour les chercheurs et les médecins, M. Yelles voit une bonne chose pour permettre aux élus de se consacrer totalement à leur députation et pour renforcer le travail du Parlement. Cette décision ne suffira pas pour autant, poursuit-il, pour limiter le taux d’absentéisme aux séances plénières qui nécessite «de réfléchir sur la rémunération de la présence des députés dans l’hémicycle». S’agissant de la question des indemnités des députés qui suscite moult réactions de part et d’autre, le juriste préfère orienter plutôt le débat  vers la prestation fournie par les parlementaires par rapport à leur rémunération. «C’est la loi sur le statut du député qui doit prendre en charge la question des indemnités», fait-il savoir.

Sur l’élection du président de la prochaine Assemblée, il dit que même s’il n’est pas automatiquement choisi parmi la majorité, la force du nombre fait que ce siège d’une importance certaine reviendra automatiquement au parti majoritaire. Quant au changement que peut procurer la forte présence des femmes à la 7e législature, il souligne que cela dépendra de la réaction et de l’orientation des élues qui peuvent constituer une force de proposition de lois pouvant faire avancer un peu plus la cause des femmes. Idem pour la révision de la Constitution qui constitue la mission principale du nouveau parlement, laquelle dépend, demeure convaincu M. Yelles,  de la nature des changements qui seront apportés. «L’important n’est pas de changer pour changer», conclut-il.

Hamida B.