Quel avenir pour le front des forces socialistes ?

Quel avenir pour le front des forces socialistes ?

arton8163-9ada8.jpgAprès tant d’années de combat et de militantisme, la mort de Hocine Aït Ahmed aura-t-elle raison des idéaux et des legs de l’homme ? De prime abord, deux visions émergent.

La disparition d’une des plus importantes figures emblématiques du mouvement révolutionnaire, mais surtout « le fondateur » de l’acte de l’opposition politique au pouvoir en Algérie pourrait, si l’on se réfère à l’engagement avant-gardiste de l’homme -sous-estimé au demeurant-, aboutir soit à une inhibition de toute force politique identique à celle dont il était porteur et qui lui a valu 50 années (1963-2013) de vain combat pour le rétablissement du processus démocratique énoncé dans la déclaration du Premier Novembre, soit à un déclic pour l’émergence d’une élite gravitant autour du noyau actuel du FFS ou bien issu d’un autre mouvement ou parti et dont la disparition de l’homme aura réussi à susciter l’éveil.

Il est en tout cas presque évident que la tâche ne sera pas de tout repos pour l’Etat-major actuel du plus vieux parti d’opposition, au regard du refus de toutes les forces politiques de « son » projet de sortie de crise.

D’aucuns s’accordent à dire qu’indiscutablement, la politique en Algérie est du domaine du pouvoir.

Depuis le recouvrement de l’indépendance, hormis l’amère expérience post-événement 1988 et qui a vu l’émergence d’un bipolarisme politique dénoncé d’ailleurs en son temps par le défunt Aït Ahmed, aucun mouvement d’opposition n’a réussi à s’imposer. En effet, Aït Ahmed avait jugé dangereuse pour le pays l’opposition née après octobre 1988 entre le FIS dissous et le FLN en tant que parti du pouvoir, une opposition qui allait d’ailleurs dégénérer plus tard en une confrontation armée durant la décennie noire.

Cette expérience avait en tout cas permis au plus vieux parti d’opposition de sortir de sa clandestinité et le retour de son fondateur en 1990, lequel avait alors cru en une ouverture démocratique qu’il n’a cessé d’appeler depuis le recouvrement de l’indépendance et qui lui a valu d’être emprisonné et condamné à mort par le pouvoir de Benbella.

Face au contenu de la nouvelle Constitution qui plaçait le Front de libération nationale comme seul parti en Algérie, le défunt a osé la confrontation avec feu Ahmed Benbella en créant le Front des forces socialistes. Le parti, dont les objectifs avaient une visée d’une ampleur nationale, a été aussitôt étiqueté de régionaliste, d’autant que sa création a vu le jour sur les hauteurs du Djurdjura.

Orienté dès sa création vers la social-démocratie et tourné vers la laïcité, le parti a réussi à se faire un aura sur la scène internationale et à se placer dans le giron des grandes formations de gauche rassemblées autour de l’Internationale socialiste.

Conscient de l’enjeu qui allait engager le pays dans une voie démocratique, laquelle il avait en tout cas cru, le président du FFS prendra part à la première expérience pluraliste décidée alors par le pouvoir dirigé par feu Chadli Bendjedid.

Le parti réussit à décrocher 25 sièges sur les 231 remportés au premier tour au Parlement qui compte 430 sièges (les 199 restants devaient opposer les deux meilleurs candidats de chaque circonscription au second tour) lors des élections avortées de 1991 devant le FLN qui, lui, n’a récolté que 15 sièges d’une assemblée raflée par le parti dissous avec 188 sièges.

Le FFS troisième force politique

Le président du Front des forces socialistes s’opposera par la suite à l’arrêt du processus électoral décidé par le HCE après la démission du président Bendjedid et n’hésitera guère à qualifier la manœuvre de coup d’Etat avant de prendre part en 1995 à la réunion de Saint Egidio qui devait aboutir sur ce qui fut appelé le Contrat de Rome et qui essuya un niet catégorique des autorités.

Suivra alors une série de boycotts des élections aussi bien législatives que présidentielle notamment après le départ du président du parti pour la Suisse après l’assassinat en juin 1992 de son compagnon de combat Mohamed Boudiaf appelé à la rescousse de l’Etat pour diriger le Haut comité d’Etat(HCE).

Le président du FFS refusera par la suite de prendre part à l’élection présidentielle de 1995 remportée par Liamine Zeroual et continuera avec ses coparticipants à la réunion de Saint Egidio à appeler à un contrat national pour une sortie de crise.

Toutefois, Aït Ahmed postulera pour la présidentielle de 1999. Hocine Ait Ahmed sera malgré son retrait crédité de la quatrième place derrière Abdellah Djaballah et Mohamed Taleb Ibrahimi classé deuxième après Bouteflika.

Hormis les élections législatives de 1997 au cours desquelles le parti réussira à s’imposer comme troisième force politique après les partis du pouvoir (FLN et RND) et les islamistes (MSP et Ennahda), le parti refusera par la suite de participer aux élections présidentielles de 2004, 2009 et 2014 et des élections législatives de 2002 et 2007.

En 2012, le secrétariat national du parti alors dirigé par Ali Laskri, prendra part au élections législatives et remportera 27 sièges, confortant ainsi sa position en tant que troisième force politique.

Toutefois, le parti vivra des moments difficiles après les tiraillements qui le secoueront de l’intérieur. La plus vieille formation d’opposition vivra alors une instabilité à la tête de sa direction, notamment de 2007 à 2014. Sept secrétaires nationaux se relaieront ainsi à la tête du parti. Karim Tabbou de juillet 2007 à 2011 ; il sera alors remplacé par Ali Laskri avant que celui-ci se retire en juin 2013 en faveur d’Ahmed Betatache auquel succèdera, un peu plus d’une année plus tard, en août 2014, Mohamed Nebbou.

Le parti continue toutefois de brandir sa proposition de sortie de crise qui consiste en l’organisation d’une conférence consensuelle ouverte à toutes les parties acquises à cette cause. La diversification économique, le contexte international et régional en plus des demandes sociales urgentes sont autant d’éléments moteurs du choix décisionnel du parti de feu Hocine Ait Ahmed.