Le président yéménite Ali Abdallah Saleh a finalement cédé aux pressions en se rendant hier à Riyadh pour signer un accord sur un transfert du pouvoir, après avoir réprimé pendant dix mois la révolte populaire.
Peu après son départ pour la capitale saoudienne, des combats ont brièvement opposé sans faire de victime à Sanaa les forces qui lui sont fidèles aux hommes du puissant chef tribal Sadek al-Ahmar, rallié à la contestation, selon des témoins. S’il quitte le pouvoir, M.Saleh sera le quatrième chef d’Etat arabe à être emporté par la contestation de la rue depuis le début du Printemps arabe il y a près d’un an, après ses pairs tunisien, égyptien et libyen. Mais il sera le premier à le faire en vertu d’un accord négocié. Le président contesté, qui refusait depuis avril de parapher le plan de sortie de crise proposé par les monarchies arabes du Golfe, est arrivé inopinément le matin à Riyadh pour signer un accord de sortie de crise proposé par les monarchies arabes du Golfe, selon une source officielle yéménite. Ce dénouement a été permis grâce à des amendements introduits au plan lors des négociations intensives de l’émissaire de l’ONU à Sanaa Jamal Benomar, dont un mécanisme d’application stipulant que M.Saleh demeure président «à titre honorifique» pendant 90 jours, selon des sources politiques yéménites. Des milliers de jeunes protestataires, qui campent sur une place de Sanaa depuis février, ont crié «Qu’il signe ou pas, le sang des martyrs ne sera pas perdu» et réclamé que le président soit traduit en justice. M.Benomar a confirmé à l’AFP que la cérémonie de signature de l’accord «aura lieu aujourd’hui (hier) à Riyadh», où les ministres des Affaires étrangères des monarchies du Conseil de coopération du Golfe (CCG, Arabie Saoudite, Koweït, Oman, Bahreïn, Emirats arabes unis, Qatar) tiennent une réunion. M.Saleh signera ce plan, déjà paraphé par l’opposition, et les deux parties signeront ensuite son mécanisme d’application, a-t-il ajouté. Aux termes de l’accord, M.Saleh, en échange de l’immunité pour lui-même et ses proches, doit remettre le pouvoir pour une période intérimaire à son vice-président, Abd Rabbo Mansour Hadi, un homme de consensus. Ce dernier devra procéder à la formation d’un gouvernement d’union avec l’opposition, qui sera chargé de superviser un dialogue national et d’élaborer une nouvelle Constitution, selon des sources diplomatiques. Mais M.Saleh demeurera président à titre honorifique pendant une période de 90 jours, au cours de laquelle il ne pourra pas contester les décisions de son successeur. A l’issue de ce délai, M.Hadi sera désigné président pour une période intérimaire de deux ans, au terme de laquelle des élections législatives et présidentielle seront organisées. M.Saleh, au pouvoir depuis 33 ans, avait refusé jusqu’à présent de signer le plan se rétractant à la dernière minute à plusieurs reprises, malgré les pressions régionales et internationales. Selon le secrétaire général du parti présidentiel, Sultan al-Barakani, les dernières touches ont été mises «au mécanisme d’application et à un document lié aux garanties» d’immunité pour M.Saleh et ses proches. Le fils et les neveux du président commandent les principaux organes de sécurité. Le Conseil de sécurité de l’ONU a reporté d’une semaine, jusqu’au 28 novembre, une réunion qu’il devait tenir pour discuter du Yémen, dans l’espoir d’une percée. M.Saleh a reçu un appel du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, qui l’a «remercié pour avoir répondu positivement aux efforts de l’ONU et à la résolution 2014», adoptée le 21 octobre et soutenant le plan du CCG, selon l’agence officielle Saba. La répression de la révolte populaire et les affrontements entre troupes rivales ont fait des centaines de morts depuis janvier.